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  • CHRONIQUES DE POURPRE 483 : KR'TNT ! 483 : DAVE KUSWORTH / COUNTRY TEASER / BLONDSTONE / JOHNNY BURNETTE ( + R'N'R STORIES )/ ROCKAMBOLESQUES

    KR'TNT !

    KEEP ROCKIN' TILL NEXT TIME

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    LIVRAISON 483

    A ROCKLIT PRODUCTION

    FB : KR'TNT KR'TNT

    05 / 11 / 20

     

    DAVE KUSWORTH / COUNTRY TEASERS

    BLONDSTONE / JOHNNY BURNETTE ( + R'N'R STORIES )

    ROCKAMBOLESQUES

     

    Un Kusworth qui vaut le coup

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    Alors qu’une moitié de la planète se réjouit de la disparition de Dave Kusworth («Ah encore un drogué de moins !»), l’autre moitié se morfond dans un abîme de chagrin. Jusqu’en septembre dernier, Dave Kusworth était encore une légende vivante, une race qui est comme vous le savez en voie d’extinction. On le vénérait pour sa fière allure (cool Keef clone) mais surtout pour ses chansons. Oui, Kus est infernalement doué, tellement doué qu’il finissait par faire de l’ombre à son complice Nikki Sudden, tout aussi légendaire, mais trop mélancolico-dylanesque, alors que Kus remplissait des albums entiers de compos somptueuses qui avaient pour particularité de sonner comme des hits imparables dès les premières mesures. Ce n’est pas courant. Avec Kus, Brian Wilson, Frank Black, Bob Mould, Lanegan et Robert Pollard comptent parmi les surdoués de la surenchère compositale.

    En quasiment quarante ans de «carrière», Kus a enregistré une bonne vingtaine d’albums, soit en solo soit en tant que Jacobite à l’air avec Nikki Sudden. Dans le cas d’un cat comme Kus, on peut parler véritablement d’une œuvre car bon nombre de ses albums sont devenus des classiques, dans l’underground, c’est vrai, mais chacun sait que c’est l’underground qui choisit les élus, et non le mainstream. Quand on parle de classic album, il faut l’entendre au sens artistique. Lanegan et Kus sont des auteurs classiques, au même titre qu’Apollinaire et Guy Debord. Supertramp, Dire Straits et Barbara Cartland ne sont pas des auteurs classiques, mais simplement des machines à fric, ce n’est pas la même chose. Tant mieux pour eux, mais si tu préfères l’oxygène, c’est Kus qu’il te faut.

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    Quand on n’a pas le privilège de connaître l’homme, alors il faut savoir se contenter de l’œuvre. Et quelle œuvre ! Nik & Kus enregistrent le premier Jacobites en 1984. Ils fondent une sorte de lignée romantico-balladive directement inspirée du côté tendre de Keef. Le «Big Store» qui ouvre le bal de l’A reste du Sudden classique, un mélopif extrêmement prévisible. Aucune surprise n’est possible chez Nikki, tout est claquemuré dans une insondable mélancolie - Say my love to the girl in the big store - Les deux points forts de l’album sont «Hurt Me More» où Kus se tape une belle partie de slide dans l’esprit de «Dead Flowers», et «Kings And Queens», fantastique élégie qui finit par sonner comme un hit. Eh oui, Kus signe ce big balladif gratté à la merveilleuse insistance. Ils s’inscrivent avec ça dans la tradition du mythique «You Got The Silver». Ils baignent aussi leur «Silver Street» dans l’ambiance de «Sister Morphine». En B, «Hanging Out The Banner» fait dresser l’oreille, grâce à son élément tri-dimentionnel. Kus rôde dans le son avec de vieux arpèges de cristal. Et puis voilà «Need A Friend» qui sonne comme un balladif enchanté gratté à coups d’acou charmants. Tout est monté sur le même modèle, avec une foison de coups d’acou. Dans la réédition CD de Jacobites, on trouve l’EP Shame For The Angels qui est assez explosif, ne serait-ce que par le morceau titre, cut esprit-es-tu-là en forme de cavalcade effrénée. Encore une fournaise de taille avec «Fortune Of Fame». Oui, ça peut chauffer chez les Jacobites à l’air. C’est même très hot. Et quand on tombe sur «Heart Of Hearts», on crie au génie, ca voilà un hit faramineux, mélodiquement invincible, avec tout le power de la romantica. Rassurez-vous, on retrouvera cette merveille un peu plus loin dans ce panorama.

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    Dans les liners, Nikki raconte qu’il a rencontré Kus à l’époque où il jouait dans les Subterranean Hawks et qu’il le trouvait extrêmement doué. Il lui indiqua qu’il aimerait bien monter un groupe avec lui si les Hawks splittaient, ce qui allait se produire en 1982. Nikki sentait qu’ils pouvaient bien cliquer ensemble. Il raconte aussi qu’à l’époque de leur rencontre, ils chantaient dans la rue tous les deux pour se faire un peu de blé (busking). Un jour, Nikki alla acheter un paquet de clopes et à son retour, Kus avait composé «Kings And Queens» - the all-time Kusworth classic - Il indique aussi que la photo de la pochette fut prise dans la cuisine de l’appart qu’ils occupaient sur Norwood Road, à Brixton. C’est aussi l’époque où Kus joue encore dans les Rag Dolls à Birmingham.

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    Ça tombe bien, car un digipack des Rag Dolls est arrivé sur le marché en 2015. Il s’appelle Such A Crime et vaut le détour car Kus y rend hommage aux Dolls, particulièrement avec «Fortune Of Fame» qu’on retrouve d’ailleurs sur le Shame For The Angels EP. On croirait y entendre la guitare de Johnny Thunders. Lorsqu’on entre dans cet album, on est vite surpris pas la qualité des cuts, par ce big tempo de Kus on the run. Ils font pas mal de power-pop («Pin Your Heart To Me») et Kus cavale bien son affaire avec «What You Don’t Know (You Don’t Show)». Le son est là, bien présent. Avec «Lucky Smiles», les Rag Dolls rendent hommage aux Stones et aux Beatles, ceux de la période psyché («Rain»). Et puis voilà un «Nine Times Out Of Ten» assez puissant, presque garage, bien bardé de barda. C’est incroyable comme ils sont bons. Et puis alors qu’on ne s’y attend plus, une énormité surgit : «Snow White», un slow rock gorgé de son. C’est inespéré de qualité. Sur certains cuts on entend même du sax. Ces mecs ont des moyens considérables. Vers la fin du disk, vous trouverez aussi une version live de «Fortune Of Fame» et deux démos de répète, «Silken Streets» et «Vanity Box». Kus avait déjà tout à l’époque. Dans les liners du Rag Dolls, Pat Fish rappelle tout de même que l’idée des Rag Dolls ne plaisait pas trop à Nikki qui voulait avancer avec les Jacobites à l’air. Dès que les Rag Dolls ne jouaient pas, Nikki jammait avec Kus pour préparer Robespierre’s Velvet Basement, n’hésitant pas à reprendre certains cuts des Rag Dolls. Fish rappelle aussi qu’en voyant la pochette du premier Jacobites, il s’était dit que le type de droite semblait destiné à orner les pochettes. Eh oui, Kus avait déjà l’allure d’une rock star. Il ajoute qu’il s’inspirait de toute évidence du Keef de la période la plus dissolute, celle d’Exile, mais qu’il allait par la suite réussir à créer son propre style. Il n’empêche nous dit Fish que si Keef est un père parfait pour Jack Sparrow dans Pirates des Caraïbes, Kus ferait un oncle idéal. Tim Sendra dit aussi que Kus is one of the most exciting electric guitatists on this island, both powerful and melodic. Bien vu, Sendra.

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    Avec Robespierre’s Velvet Basement, on entre dans l’âge d’or du team Nik & Kus. Ils sont même au sommet de leur art avec trois Beautiful Songs : «Snow White» (cut de Kus dans les Rag Dolls), «Ambulance Station» et «I’m Just A Broken Heart». «Snow White» est même un balladif plus enchanté qu’enchanteur, comme éclairé de l’intérieur, en tous les cas, il séduirait un régiment de hussards. Ces deux dandies se situent dans la parfaite expressivité du rock anglais, dans l’essence même de ce qui en fait le classicisme. Ils chantent leurs trucs au clair de la lune. Il semble que ce soit Kus qui chante «Ambulance Station», parfait balladif intimiste et mordant. On peut dire la même chose de Broken Heart, chanté à deux voix, chargé de British melancholia, autre merveille jacobine. On entend même des chœurs timides derrière. Effet pince-cœur garanti. C’est d’ailleurs le décalage des chœurs qui fait la grandeur du cut. Tiens, la dernière chanson de la B est aussi une Beautiful Song. Nikki chante «Only Children Sleeping» sur du velours, des notes de mandoline s’égrènent autour de lui alors que les chœurs à la dérive passent au loin. Tout flotte en suspension, à la pire admirabilité des choses. On soulignera aussi la qualité du «Big Store» d’ouverture, rescapé du premier album, quasiment mad psyché bien soutenu par une sorte de tension virale. «Fortune Of Fame» revient aussi à la surface. C’est excellent, bien vivace et serti d’un solo joué sur une note. Quelle classe ! Avec «Where The River End» Nik & Kus nous proposent un mid-tempo longitudinal hanté par une phrasé symptomatique. Ils font du rock richissime. Ils semblent parfois se livrer pieds et poings liés à la facilité, comme on le constate à l’écoute d’«All The Dark Rags» - And I don’t know what to do/ Don’t know what to say/ Who cares anyway - C’est vrai, tout le monde s’en fout.

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    Les voilà tous les deux perdus dans un océan d’écharpes en soie pour Lost In A Sea Of Scarves paru en 1985. Le hit de l’album s’appelle «Heart Of Hearts» et on se régale de sa fluidité mélodique. C’est une admirable déculottée de belle eau pure, le véritable archétype de l’apanage jacobin. Un jolie bassline porte le doux beat des Jacobites à l’air. Ils ouvrent leur bal d’A avec le vieux «Shame For The Angels», rescapé de l’EP du même nom, un bel up-tempo cavaleur, selon la formule Sudden. Mais le reste de l’album ne provoque pas forcément d’émoi dans les muqueuses. Ils ne cherchent pas à réinventer le fil à couper le beurre, ils se contentent de ressortir quelques éclats de «Moonlight Mile» dans «Sloth» et de cultiver leur profond désespoir dans «Before I Die» - Before I die/ let me talk to you.

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    En 1987, Kus souhaite faire un break avec les Rag Dolls et les Jacobites, alors il monte les Bounty Hunters avec Alan Walker, Glenn Tranter et Mark McDonald. On les voit tous les quatre au dos de la pochette de leur premier album simplement titré The Bounty Hunters. Album intéressant, beaucoup plus vif et alerte que les albums des Jacobites à l’air. Kus et ses amis démarrent avec «Riches To Rags», un beau pulsatif effervescent et fragile à la fois, une énergie qu’on va retrouver en B dans un «Sleeping Love» doté d’un refrain bien élastique - Is anybody going to help my sleeping love - Et toujours ce son de guitare tiré à quatre épingles. Kus monte sa pop en neige et cette façon qu’il a d’appeler sa poule my angel ! Et puis alors qu’on ne s’y attend pas du tout, Kus nous fait le coup du lapin avec «A Puppeteers Son». Le cut éclate dans les montées de gamme - Chasing clouds in the morning sun - Le grand art de Kus consiste à l’élever soudainement - Whats it all to a puppeteers son/ As I sit watching clouds in the morning sun - Kus dispose d’un talent pour la mélodie qui va exploser au fil des albums à la face du monde. Encore une chose intéressante : «A Very Good Wife» sonne comme l’early Bowie de «Space Oditty». Kus tente d’étendre son balladif jusqu’à l’horizon. On les voit aussi développer une jolie power pop dans «Orphan (All His Life)». Serait-ce leur beat de prédilection ? Allez savoir ! Tous les cuts de l’album sont admirablement bien ficelés, «The Story So Far» vaut pour du big atmospherix de sweet sweet love gratté à la wild romantica. Autre bonne surprise : «A Glimpse Of Your Heart», heavy balladif solidement ouvragé et décoré de beaux arpèges scintillants, un cut long et doux au regard comme une campagne anglaise, ou une compagne sensuelle, au choix. Kus n’en finit plus de produire de l’enchantement. Il nous gratte ensuite «To My Love» à l’acou sauvage, mais c’est une énergie différente de celle des Jacobites à l’air. Alors attention, car sur la réédition CD de l’album chez Easy Action, les bonus raflent la mise, et ce dès l’effarant «Hooked To Your Heart», pus jus de Stonesy claironnante. On voit que Kus aime la musique d’amour alors wham bam, il ramène dans ce cut charmant et capiteux tout le tatapoum dont il est capable et c’est la fête au village. Les virées de basse dans «Broken Tooth For A Broken Heart» sont superbes, le son te court entre les jambes. On sent encore l’orfèvre dans «The Kiss That Cuts In Half». Avec Kus, ça prend vite des proportions spectaculaires - In the garden of the kiss - Quel fabuleux heavy balladif ! Kus rajoute des couplets pour le cas où on n’aurait pas compris. On reste en territoire sacré avec «Apartment To Compartment». Fantastique power, Kus est prolifique en matière de dégelées mirifiques, il arrose ça au solo de feu, il jerke son cut à la flambée sonique. C’est gorgé de disto aphrodisiaque. Kus a du génie, maintenant tout le monde le sait. Et ça continue avec «Blood On Your Knife». Il part en mode gaga brit mais sur le beat des démons de Birmingham. Il excelle dans le demonic. Il fait du shhhh pour calmer sa bête mais elle repart de plus belle. Il sait aussi chanter à la folie Méricourt. Bel hommage aux Stones avec une cover de «Child Of The Moon». Heavy rampage d’hommage, dirons-nous. Inespéré de grandeur tutélaire. Aw my child of the moon, Kus le chante heavy, à la meilleure heavyness de fan transi. Ça se termine avec un hommage à Dan Penn, une reprise d’«Im Your Puppet». Merveille des merveilles. On est content d’avoir rencontré Kus, rien que pour cette cover. Kus et Dan même combat ! Il se fond dans le mood du génie de Dan Penn. Voilà une cover fabuleusement sonnante et trébuchante. Ce démon de Kus la soigne, on peut lui faire confiance. Il pipette dans l’éther.

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    Leur deuxième album s’appelle Wives Weddings & Roses et retombe malheureusement comme un soufflé. Ils attaquent pourtant à la Stonesy pure avec un «Yesterday’s Hearts» ultra-joué aux belles guitares de Kus. Il sait doser son éternité et s’installe pour jouer à l’abri des critiques, au plus profond de l’underground. Mais l’album s’enferre ensuite dans une romantica de bon aloi, avec des choses comme «All The Violet Lights», un balladif chargé de don’t cry for innocence, don’t cry for pain, don’t cry for her/ In this wedding game. Avec «Streets Of Gold», il sonne comme «Heart Of Gold». II faut attendre «Riverboat Blues» pour frémir un court instant, car ce rock kussy se révèle être d’une belle tenue compatissante.

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    Le troisième album des Bounty Hunters s’appelle Threads A Tear Stained Scar et sort sur Creation. On les voit assis tous les quatre sur un lit, avec au premier plan un Kus un peu prostré. Il démarre avec une belle lichée de pop languide intitulée «Everything’s For Her». Kus adore les horizons flamboyants. Ils va toujours chercher à atteindre le mieux des possibilités. S’ensuit un big Bounty rock intitulé «Threads». Ces mecs savent jouer de la cisaille. On ne peut pas se lasser de ce son plein et de l’excellence de la prod. Et ça monte encore d’un cran avec «From Your Eyes», une sorte de petite apothéose psyché qui fait dresser l’oreille. Le refrain est de ceux qu’on qualifie habituellement de vainqueurs. Il emporte tout. C’est avec ce genre de cut qu’on commence à prendre Kus sacrément au sérieux. «Another Change Of Heart» sonne dès les premières mesures comme une beautiful Song. Just perfect, dirait l’Amiral Nelson à Trafalgar. C’est un balladif de l’âge d’or kusworthien visité par les vents d’Orient et il fait monter son dernier couplet d’un ton. Admirable ! Et la B ? Pareil, ça sonne dès «Hooked To Your Heart», avec une sacrée virulence dans l’excellence. Kus ressort enfin sa Stonesy et claque sa riffalama à tout va. Il enchaîne avec «I’ll Be Your Angel Again», un balladif de très grande envergure. On note l’admirable aisance de Kus à kisser the sky. Nous ne sommes pas au bout de nos surprises car voici «A Picture Of You» qu’il va gorger de jus d’acou et doter en prime d’un final éblouissant. Kus n’en finira donc jamais d’exceller ? Apparemment, non. Il passe ensuite à un solide slab de pop rock gorgé de guitares er de chœurs d’Hunters. Oui «Hanging Your Arms» sonne comme un hit underground et cet album inespéré s’achève avec «In What She Says», un balladif qui enrichit les pauvres et qui rehausse l’éclat des cathédrales.

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    En 1991, Kus enregistre un album solo avec Glenn Tranter et deux autres mecs. All The Heartbreak Stories est un album très beau et très recueilli. Kus drive sa pop de troubadour dans les aléas des arpèges célestins. Ce beautiful jouvenceau gratte ses poux sous les remparts de Birmingham. La perle de l’album s’appelle «One Sunny Morning» et Susan Dillane l’éclaire de sa voix diaphane. On se régalera aussi de «The Last Drop Of Wine», car on y entend les oiseaux. Une flûte favorise le transfert intestinal. Toute blague à part, c’est excellent car gorgé de bonne énergie. On s’émerveille ici et là de la transparence des thèmes. Kus invente un genre nouveau : le groove préraphaélite, une sorte de perfection artistique translucide, pas facile à manier, mais ça marche. Voilà ce qu’il faut retenir de Kus : sa quête du Graal. Il s’arrange toujours pour finir en beauté comme c’est le cas avec «Lost Words». Pour «The Most Beautiful Girl In Town», il fait le choix du boogie urba orbi. C’est très spécial. Il moissonne ses coups d’acou et des filles font les chœurs. Ce mec a du son et du yeah yeah à revendre. Il faut bien dire qu’il ne relâche jamais la pression, il orchestre tous ses cuts au mieux des possibilités, il romantise et il électrise à gogo, comme le montre le morceau titre. On croit parfois entendre Nikki, mais non, Kus mène sa barque, son goût du balladif le conduit loin en amont du rock, il tâte du big heavy groove d’arpèges. Il termine avec «I’ll Be Your Angel Again», et n’en finit plus de faire son Nikki, broken legs and broken glass, et replonge de plus belle dans la romantica. Il pourrait commencer à nous fatiguer, mais il ramène toujours des retours de manivelle. Il Kusse sa légende jusqu’à la dernière goutte de son.

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    Deux ans plus tard, les Jacobites font un retour en fanfare avec Howling Good Times. Un album considéré comme le classique des Jacobites à l’air, au point que Troubadour en ressort une version enhanced en 2009. On trouve sur Howling deux joyaux de la couronne, «Don’t You Ever Leave Me» et «Chelsea Springtime», co-écrits par Nik & Kus. Le premier sonne comme un hit dès l’intro, les guitares sont vertigineuses et dressent une fabuleuse cathédrale de son. Quelle science de la prescience ! Bouquet final hallucinant, Kus dresse des tours de heavy riffing. Par contre, «Chelsea Springtime» est monté sur le modèle de «Sister Morphine», au suspensif du suspense. Avec ce turn-over, ils montrent qu’il savent retourner une savonnette pour qu’elle mousse jusqu’au paradis. Oui ils cultivent ensemble l’art des passages d’accords paradisiaques. Ils gerbent des régalades de boisseaux d’argent. Leur musique contient des développements de paysages d’une beauté surnaturelle. Puisqu’on rend surtout hommage à Kus, on pourrait se contenter de mettre le focus sur ses compos, comme par exemple «100 Miles From Here», dont la romantica s’étend jusqu’à l’horizon, ou encore ce «Some People» beaucoup trop bardé de barda. Quant aux compos de Nikki, pas de surprise, il cultive toujours ses vieux accents dylanesques, il adore traîner sa voix dans le gutter de feu, mais son «Older Women» finit pas tourner en rond. On est avide d’aventures, mais là, pas d’aventure. Comme souvent, c’est dans les bonus qu’on trouve le plus de viande, et sur l’enhanced, on a un disk entier de bonus, alors miam miam. «Can’t You See» sonne comme une invasion par la côte. Ils jouent le meilleur boogie rock d’Angleterre. Ces mecs avancent en terrain conquis. Dans les Trident Sessions, on retrouve tous les grands hits de Nik & Kus : «Heart Of Hearts» (magique), «Silver Coin» (d’une infinie mélancolie, donc forcément beau), «Liquor Guns & Ammo» (belle histoire que raconte Nikki - Liquor guns & ammo made a man of me), «That Girl» (pus jus dylanesque, yeah yeah just you that girl), «Puppeteers Son» (Balladif de très très haut vol, merci Kus). Et puis il y a le Making Of d’Howling sur DVD. Ce petit film sans prétention de Stephen Gridley montre bien l’ambiance d’une session d’enregistrement. Ça se passe en 1993 au Woodbine St. Studio. Dans la première scène, Carl Eugene Picot (bass), Mark Williams (drums) et Kus jamment tous le trois sur «Don’t You Ever Leave Me». La scène vaut vraiment le détour car on y voit Kuss riffer sur une Tele et wow, quelle classe et quel son ! On s’y rince bien l’œil. Pendant tout le film, Kus porte des tas de bracelets, des shades et cette grosse casquette noire de Gavroche à la Keef. Il n’en finit plus de voler le show.

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    L’Old Scarlett des Jacobites à l’air pourrait bien être leur meilleur album. On y trouve au moins cinq coups de génie signés Kus, à commencer par «Over & Over», chargé comme une mule de Stonesy et d’hospital. Power & style ! Giclée historique ! Over and over I care for you. Rien de plus beau que l’instance du chorus de guitare dans l’écho du temps et la dégringolade du refrain dans le lagon d’argent. Kus appartient à la caste des plus grands rockers d’Angleterre. Nouveau coup de Jarnac avec «Falling Apart». Les cuts de Kus mordent aussitôt, ils sont d’une effarante qualité, le son s’envole comme dans un rêve de rock anglais, c’est-à-dire comme chez les Beatles et les Stones. On retombe plus loin sur «Puppeteers’s Son». Comment s’y prend-il, on ne sait pas, toujours est-il qu’il réussit chaque fois à transplanter l’ambiance, à ressortir des Jacobites à l’air pour faire du Kus, il échappe aux routines, c’est miraculeux, il crée une ambiance slightly différente, mais ça suffit car ça devient vite fascinant, même chanté à la glotte blanche. Les atonalités mélodiques relèvent du pur génie constructiviste. Il y a même des étapes de chant intermédiaires absolument poignantes. En fait on aime bien Kus car il peut nous pondre «Love’s Cascade», un cut d’une telle beauté qu’il finit par exploser. C’est dirons-nous une power pop exubérante noyée d’accords, claquée dans l’azur immaculé, avec en plus des solos de Kus absolument dévastateurs. C’est lui qui referme la marche avec «Wasted». On salue chaque fois le retour de Kus, car chaque fois ça redevient fascinant : toutes ces guitares ! Et ce beat ! Et cette énergie ! Il est l’un des dieux du rock anglais, il faut entendre ce son saturé d’électricité, c’est inespéré de big improving DK, aw wasted, il faut voir comme ça dégouline de jus. Quant aux compos de Nikki, elles semblent toutes taillées dans le même son : esprit dylanesque et nappes d’orgue pour «When Angels Die» et «Boutique». Il ne parvient pas à larguer les amarres. «What Am I Living For» pourrait se trouver sur un Dylan de l’âge d’or. On aime bien Nikki, mais on a bien compris que le magicien dans cette affaire, c’est Kus. «The Rolling Of The Hearse» ne marche pas non plus.

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    On retrouve Nik & Kus sur Kiss Of Life, un album live enregistré à Hanovre en 1995. Live, leur son se caractérise par une stupéfiante musicalité. Ce qui semble logique vu qu’ils jouent à trois guitares : Nikki, Kus et Glenn Tranter. On les sent aussi très déterminés sur «Older Woman», gratté au contrefort d’acou avec un thème en disto brodé au long cours. Que de son ! Nikki chante au nez pincé, comme son idole Bob Dylan. On trouve en fin d’A une fantastique version de «Kings And Queens», monté comme les autres cuts sur un heavy heartbeat et ravagé par une mélancolie constante. Pourtant, Nikki vise la flamboyance, il s’en donne les moyens, il chante à l’éperdue jacobite ses rois et ses reines, alors oui, c’est vrai, ça sonne comme un hit, les accords scintillent dans l’éclat mordoré d’un verset rimbaldien. Le «Road Of Broken Dream» qui ouvre la bal de la B sonne aussi comme un classique jacobin. Ah ces vieux classiques un peu froissés, on les reconnaîtrait entre mille ! Et Nikki annonce : «This is Dave Kusworth on lead guitar !» Ils continuent d’enchaîner leurs petits mid-tempos narrant des épisodes de la vie de bohème. Les cuts fuient comme les instants, parfois merveilleux, parfois transparents.

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    La même année paraît Heart of Hearts, the Spanish album des Jacobites à l’air qui est aussi une sorte de Best Of. On les retrouve dans leur exercice de style préféré, la Stonesy. Ils pompent l’intro de «Street Fighting Man» pour leur «Can’t You See». Ils renouent avec toute la bravado des Stones, cette flamboyance à jamais perdue. Ils chargent la chaudière avec du piano, et Kus n’en finit plus d’essayer de rallumer ce vieux brasier. Puis ils vont faire un peu de boogie avec «She Belongs To You», un peu de balladif tentaculaire avec «Liquor Guns & Ammo» et un peu de monotonie avec «Penicillin».

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    Nouvel album solo de Kus en 1996 : Princess Thousand Beauty. Un bon conseil, chopez l’enhanced paru en 2014, car il grouille de big bonus. Et vous l’avez bien compris, les bonus de Kus valent tout l’or du monde. Dès le morceau titre d’ouverture de bal, on est conquis comme une ville d’Asie mineure au temps d’Alexandre le Grand. Kus nous propose un big heavy groove somptueux - Here she comes now - S’ensuit un terrific «Temptress» chargé de you got a love life et traversé de fusées de disto jusqu’à une fin apocalyptique. Encore une fois, tout l’album est bon, largement au-dessus de la moyenne des albums de rock anglais. Kus sait allumer un cut à la petite voix et comme le montre encore «Stangers Together», il peut sortir le meilleur son du monde. Kus croit encore au bonheur avec «Always Be There For You», puis il drive «She Lives In A Movie» avec du happening d’au fur et à mesure et du beau solo à n’en plus finir. Retour au heavy balladif avec «Just A Girl». Il sait doser ses effets et passer des solos liquides. Sa passion pour le beau formel vaut bien celle de Keef. Kus ne jure que par l’émotion, alors il éclate chaque cut au meilleur shaking. Tout est extrêmement bien balancé, dans l’intention comme dans le son. Il adore l’idée d’une «Fantasy Island». Il oblique même en cours de groove, c’est du sérieux, il va chercher la vraie vibe en passant par des petits ponts. Et pouf, il termine avec une cover de «Sympathy For The Devil» biens secouée aux maracas. Kus tente le diable, il n’est plus à ça près. Please allow me, il paraît trop appliqué, on sait bien qu’il en pince pour Keef, alors il opte pour une version hantée. Il n’a pas la niaque de Jag alors il fait du great big Kus. Il connaît les paroles par cœur. Le disk de bonus équivaut à une overdose. Donc il faut rester prudent. Il joue 17 cuts live à coups d’acou, accompagné par Glenn Tranter. Dans «Shame For The Angels», on entend les accords d’«All Along The Watchtower», exactement les mêmes, outside in the cold distance, ces deux démons claquent tous les coups permis en matière de coups d’acou, awite ! C’est un festival, ils frisent l’espagnolade. Kus lance à un moment : «I guess you know that one and it’s called Torn Pages.» Il croit que les gens connaissent ses chansons. Il joue cependant avec toute la maestria dont il est capable et il devient héroïque. C’est le destin d’un mec comme Kus : devenir héroïque, perdu dans le néant des petits booklets d’Easy Action. Un mec si brillant. Il en perd sa voix à force de wanna kiss you. Ce démon de Kus tartine la même plaintive de romantica à longueur de temps et se condamne aux ténèbres de l’underground. Et quand on écoute ça, on pense à tous les fans qui ne pratiquent pas l’Anglais et qui assistent au concert sans comprendre ce que raconte Kus. Comme ça doit être long ! Oui, car le set live dure plus d’une heure et au bout d’une heure, Kus ne fait plus illusion. Mais il ne lâche rien, il gratte encore ses poux, cuts after cut. Comme s’il grattait en désespoir de cause. On l’a dit : héroïque. Il est increvable, il repart de plus belle avec «It’ll All End Up In Tears» et ressort du passé le vieux «Fortune Of Fame», histoire de piquer une violente crise de coups d’acou, but the fame, yeah baby, what a fortune that you broke my heart. Cut très fascinant, claqué à l’adossée d’accords et soloté à la note d’acou fébrile. Kus sait secouer un cocotier sans électricité. The bluesy one annonce-t-il et pouf, il envoie une cover de «Bright Lights Big City». Il n’a plus de voix, mais c’est un héros. Il groove ça au bord de la route, il est épuisé, néanmoins il y va - It sums off my feelings sometimes, you should recognize this one - Oui, il enchaîne avec une version magique de «Dead Flowers», alors on est bien content d’être resté jusqu’à la fin. Kus rentre dans le lard de l’upholstered chair et du don’t you know, il se prend pour Keef, mais un Keef crucifié au Golgotha. Oui, Little Susie, Kus te crie sa flamme, il accompagne le pain away de Keef with a needle and a spoon, il fourbit son petit solo d’acou de sortie, take me down, I know you’re the queen of the underground. Il finit avec «Before I Die» et comme il est à bout, il gratte comme un forçat. Ça reste bardé de barda jusqu’au bout.

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    Dernier album des Jacobites à l’air en 1998 : God Save Us Poor Sinners. C’est Nikki qui compose le morceau titre, une violente flambée de Stonesy. Pus jus de bienvenue. Ils tentent bien le diable. Ça repose sur de solide piliers. C’est bien sûr Kus qui signe le hit de l’album, «Heartbreaks», les accords fuient sous l’horizon, c’est encore une fois gorgé de son, Nikki se fond comme il peut dans le vent du Nord, c’est servi sur un plateau d’argent avec du Kus plein les chorus. L’autre merveille de l’album s’appelle «So Unkind», slab de heavy rock taraudé au Kus. Ils savent claquer des retours de manivelle, ils cognent dans le mur du son, avec des effets de bas de manche à gogo. Ils envoient aussi ad patrès l’excellent «Cramping My Own Style», une belle déboulade que Kus arrose de jus de chaussette. Avec «I Miss You», ils retombent dans la Nikkimania, ce mec adore tartiner sa romantica, alors il tartine. Ils grimpent le «Wishing Well» d’Epic Soundtrack au sommet du rocking troubadourism d’Albion, ooh baby what you’re wishing for - Tout cela reste énorme.

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    En 2001, Kus entre dans une nouvelle ère magique avec les Tenderhooks et un premier album, Her Name In The Rocks. Ils ne sont que trois, Kus, Dave Twist au beurre et Dave Moore on bass, the three Dave. Pas de problème. Tu veux des coups de génie ? Tiens en voilà un qui s’appelle «Children Of The Computer Generation At Our Feet». Kus fond sa romantica dans le sleaze et le son coule de partout, ses solos éclatent au grand jour et quand il reprend la main, c’est toujours avec une maîtrise qui laisse coi. Il mise tout sur la saturation du son, mais en même temps il ramène des éclairs de chant lumineux. Il démolit ses accents dylanesques dans les descentes, il dévale littéralement sa mélodie et se racle le kul dans des grumeaux de computer generation. On voit rarement de telles descentes. Kus ramène toujours plus de son dans son monde. Le «Citizen» d’ouverture de bal est d’une violence sans appel. Ça t’explose en pleine gueule, attention ! Il taraude le rock anglais à coups de city sin. Profitez-en bien car vous ne recevrez pas tous les jours des giclées de cette qualité dans l’œil. Dave Twist bat ça au ventrail du poitrail. Son «Where The Head Used To Lay» est cousu de fil blanc comme neige, mais chargé de son à ras la gueule, comme un canon de mitraille. Le truc de Kus, c’est d’enfoncer le clou. Il va loin dans les all nite long. Nouvelle énormité avec «Threads», battu sec et net par Oliver Twist. Kus a du pot, il a de bons amis derrière lui et son rock court fièrement sous l’horizon. Il cadre au carré le power rock anglais à coups de yeah yeah yeah. «Golden Star» est aussi écrasant de son. Kus ramène des orages dans sa mélodie, il chante au pas pressé de golden star, c’est fusillé aux chorus et encore une fois très décisif. Il finit en déclenchant l’enfer sur la terre avec «Salisbury Road» et ses vagues de wah. On a là l’un des meilleurs sons d’Angleterre. C’est un paradis pour l’amateur de rock. Des vents terribles balayent Salisbury Road.

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    Encore un petit shoot de Tenderhooks ? Essaye English Disco, tu ne seras pas déçu du voyage. Un peu de garage à la Louie Louie ? Alors voilà «Need You No More». Kus gère ça bien wild. Oliver Twist bat tout ça en connaissance de cause et voilà un «Dandelion Boy» bien intentionné et bardé de barda. Kus passe des coups de guitare déchirants. Solide romp de downhome gravitas que ce «Tonight & Forever» et grosse désaille d’accords dans «Depressed About Nelly». Ça n’arrête pas. Kus sait mettre le turbo quand il faut. «Through & Back Again» sonne aussi comme un hit de vieux rumble jacobin et pour l’achever, Kus l’éclate au remugle de guitare. Tout ici n’est que luxe, calme et heavy sound. Quand il ressort son vieux «Blood On The Knife», il devient fou. Il cavale à perdre haleine. C’est assez spectaculaire. On se demande comment il fait pour jour aussi vite.

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    Le Dave Kusworth & The Tenderhooks sans titre paru en 2003 restera sans doute son meilleur album. L’album fétiche des trois Dave. Un son anglais aussi inespéré que celui des Stairs ou de Mansun. Un son immédiat. On peut même parler de démesure dès «Dandelion Boy», slab de pop-rock infiniment délectable, chantée au long du bras blanc de lock-up company. C’est comme quand tu es défoncé, tu sais que ça balance dans le bon son, alors tu peux tout comprendre. Kus c’est ça. Tu sais que tu vas t’écraser dans le mur, mais watch your body, Kus te chante ça dans l’oreille, c’est le power du shaman de Birmingham, il se fige au sommet de son art comme s’il était frappé par une balle. Rien de comparable au sommet de cet art. C’est joué magnifiquement. Il nous plonge le museau dans la légende des siècles avec «Temporary Genius». Kus devient le temps d’une chanson roi d’Angleterre, il claque son heavy balladif en toute liberté, il diligente son rock avec magnanimité. C’est une merveille. On dira la même chose d’«Another Teardrop», explosé aux remugles de guitare. Kus drives it wild. C’est un peu comme s’il jouait tout à la grandeur d’âme. Il ne se connaît aucune limite. Nouveau coup de génie avec «The Test Of Time». Le son monte bien, porté par des nappes d’orgue. Kus cherche à percer le secret du heavy balladif définitif et il le perce ici, il fait du grand art comme d’autres du grand œuvre, il fait même du génie contenu, et si l’on doit se souvenir de Kus, c’est avec The Test Of Time. Son «Depressed About Nothing» est excellent de non-prétention. Et puis il faut le voir titiller son «Stevie’s Radio Station» au tu tu tu. Il ressort aussi son vieux «Apartment To Compartment». Il l’attaque au petit gratté d’acou et ça vire heavy stuff de Kus. Alors il se met à le tortiller, il aplatit le Dylanex pour le faire entrer dans sa vision de la Stonesy, il rebat les cartes des influences, il charrie dans son flux un vrai chaos de big time. Il termine avec une resucée de «Blood On The Knife» qui vire à la stoogerie. Ce mec joue et gagne à tous les coups. Merci Kus pour cet album. Pour les autres aussi, mais surtout pour celui là. Pour le rose et gris d’une heure de pure magie.

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    Glenn Tranter remplace Dave Moore sur Like Wonderland Avenue In A Cold Climate paru en 2004, voici déjà 15 ans. Eh oui, ce temps qui passe et qui ne repasse pas. «It Comes And It Goes», dirait Kus qui attaque comme un géant, c’est-à-dire comme Dylan ou Lou Reed, avec la même autorité et c’est tout de suite brillant car bombardé de son, au-delà du raisonnable. Mine de rien, Kus chante le plus beau rock de tous les temps, le rock des pirates de romans d’aventures, il explose dans l’azur immaculé des Caraïbes du rock. On a rarement vu un rock aussi convaincu, aussi chargé, aussi juste, Kus outrepasse Dylan et Lou Reed, il sonne comme un démon évaporé dans l’air du temps, il se fond dans la mélasse de sa légende avec un art qui en dit long sur son côté Arsène Lupin. «The Right Track» ? Il est là, il veille sur nous. Il nous aide à ne pas sombrer dans l’ennui. Kus nous propose sa mélancolie, qui est plus belle parce que plus électrique. Kus on te suivrait jusqu’en enfer si seulement l’enfer existait. Il continue de jouer le rock de rêve, il reste dans sa veine d’imbalance Keefy, il chante la douceur maussade du void et l’éclaire de manière spectaculaire. Les nappes d’orgue nous ramènent sous le soleil de Dylan avec l’édentée de Keef, oui Kus monte les choses aux degrés mythiques, ce n’est pas par hasard qu’on cite des noms, ce fabuleux navigateur croise dans les mêmes eaux que ses modèles. Il étire ses cuts en longueur pour qu’on en profite. Le cœur sur la main. Avec «Come With Me», il s’enfonce dans le heavy beat de Tenderhook, il l’explose et revient au point de départ pour mieux repartir. Voilà qu’il décrit des cercles magiques, on l’attend et il revient, magic Kus ! Il s’accroche à «How Come I Always Dream About You» comme Brel s’accrochait à ses chansons. Kus dispose du même tonic, du même singalong. Il revient fier et victorieux au milieu des coups d’acou. Il a une façon particulière de provoquer les événements, à tel point qu’il semble lui aussi dépassé, comme emporté par les vagues. Fais gaffe amigo, c’est une drôle d’expérience que d’écouter un album des Tenderhooks. Kus shake son shook en permanence et en profondeur. Il bourre son «All I’ve Got Left» de heavy disto. Cette façon de travailler le son dans la longueur est exceptionnelle. Tout sur cet album est extrêmement joué, «Are You Girl» finit même par troubler. Trop de qualité ? Trop de power ? Et la voix de Kus en guise de cerise sur la gâteau. Il chante son gut out. Il amène son «Tell Me About Your Love» sous un certain boisseau et choisit de l’adapter à sa notion de classe expressive, suivant une progression harmonique irréelle. Puis, comme si de rien n’était, il allume «A Real Girl» à la Stonesy d’alerte rouge. Quel fabuleux brasier d’accords ! Quel festin de son ! Il sait se glisser dans les culasses. Il trucide sa Stonesy à coups d’accords, il farcit le son d’une grenaille de prédilection et ça part en big shoot, suspendu un moment, et ça bascule. Et cette façon qu’il a de rappeler les troupes ! Il termine avec un «Street Imagery» qui sonne comme du Ronnie Lane, à cause de l’accordéon.

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    C’est en 2008 que Kus entame une petite série d’albums sur un label espagnol, Sunthunder. Un beau portrait cadré serré de Kus orne la pochette de Tambourine Girl qui comme tous ses autres albums, va tout seul sur l’île déserte. Car oui, what an album ! Il nous envoie directement au tapis dès le morceau titre, un «Tambourine Girl» d’une extrême violence. Il explose l’osmose du cosmos, il ne craint ni le diable ni la mort, il claque sa tambourine girl avec l’énergie du désespoir, awite ! Pur genius ! C’est à la fois bardé et équilibré, on ne sait pas comment il réussit ce coup de Jarnac, et en plus il fait son Keef à la surface. Encore un Kus kut qui te cloue au mur. C’est en plus claqué à coups d’harmo, donc pas de répit. Nouvelle foutue laitue avec «Colour Your Eyes», véritable shoot de big Kus gratté au clair de la lune. Kus ça n’est que ça : la beauté du geste pour le geste. Il va trop loin, beaucoup trop loin. On se demande en permanence si on est à la hauteur. Ces albums finissent par devenir surnaturels. «Paint & Sugar» ne fait qu’enfoncer le clou. L’exaction à l’état le plus pur. Kus it down. Pur power ! Allumé aux chœurs de lads, sugah ! Kus n’en finit plus de cavaler au loin sur la crête du rock anglais. On s’effare du doux des chœurs. Personne n’a jamais emmené un balladif aussi loin. L’autre énormité de l’album est le retour de «Come With Me». Alors oui, on vient. Avec Kus ça ne traîne pas. Incroyable qualité de l’entraînement. C’est d’une puissance inexorable, le son atteint un rare niveau d’effervescence. Tout l’album tient en haleine. Kus fait partie de cette rare catégorie d’artistes extrêmement impliqués. Il pique encore une crise de Stonesy avec «Threads». Parmi les compañeros de Tambourine Girl, on note la présence de Glenn Tranter et de Darrell Bath. Par sa seule puissance, «All Of My Love» peut affoler les compteurs. Ça se termine comme souvent chez Kus en fin explosive de non-retour. Encore du big Sunthunder sound avec «It’s Too Late» et Kus nous gratte «Grown» à la petite mort du cheval blanc.

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    Il monte le Dave Kusworth Group avec Dave Twist et deux autres mecs pour enregistrer The Brink, un album qui sort en 2008, doublé d’un disk entier bardé d’un barda d’outtakes et de demos. «Sherry High» se présente comme un rumble de big guitars et Kus fait vite monter la pression. Il tire ça à quatre épingles et aux tortillettes alarmistes et parvient à garder son calme au cœur du chaos. Stupéfiante leçon d’élégance ! Ça dégouline de musicalité. Il allume en permanence, ses gimmicks semblent illuminer le ciel du kut et il n’en finit plus de lancer des virées spectaculaires. Son «Brink» est lui aussi bombardé de son - Brink in my roots/ And tearing away at my soul - Terrific ! S’ensuit un «Someone Else’s Shoes» tout aussi demented, Kus ramène une chaudière dans sa fournaise. Ça coule comme un fleuve de lave, c’est nettoyé au bottleneck, l’enfer sur la terre, véritablement. S’il est un cut qui lui va bien, c’est «Chainsmoking». Pas de photo de Kus sans la klope. Et puis voilà un «Silver Blades» assez sauvage. Kus s’enhardit encore, il vire gaga, il tatapoume dans la pampa en flammes, c’est assez fascinant de le voir cavaler son Silver Blades dans les flammes et dans les rappels de gimmicks, il n’en finit plus de dégringoler au long cours. S’ensuit un «Into My Eyes» explosé aux accords en coin, comme chez le MC5. Incroyable déclaration d’intention. On admire cette désinvolture de vulture dans le ciel noir du rock anglais. Et ça repart de plus belle avec l’extravagante dégelée de ce «Still Waiting For You» joué à l’éclatée de bonanza, à la grandeur tutélaire du Kus, avec un bassmatic dévorant. Kus embarque son kut en enfer, still waiting for you now. Comme Ray Davies, il chante les louanges d’«Hollywood», et avec le même génie balladif. Kus illumine le rock anglais mais peu de gens le savent. Alors évidemment, le disk 2 est une véritable caverne d’Ali Baba, car on y retrouve un alt. mix miraculeux de «Sherry High» et ses poussées de voix, sans parler du solo de gloss quasi-mythique. Encore du rab d’alt. mix avec «Still Waiting For You» et «Someone Else’s Shoes», une belle crise d’alt. qui s’enflamme tellement que ça sent le brûlé. Ils stoogent «Into My Eyes». Kus adore la niaque, c’est son pain béni. C’est tellement bon qu’on finit par se demander si tout cela est bien raisonnable. Le rock de Kus est pulvérisé au vivifiant. Il a vraiment du pot d’avoir Dave Twist au beurre. Il faut le voir filer tout droit. On trouve aussi un «GI On Blues» explosé de guitares. Kus fait les Dolls, il chante ça au pur jus. Il fait aussi du boogie rock underground avec «Reportee». On est bien récompensé d’écouter ça car voilà un outtake de poids : «Citizen». Kus le chante à la folie du pire underground, il dégomme les mots en haut des falaises de marbre et il joue les accords des Stooges. C’est encore une fois explosif. Encore un outtake avec «Where Do You You Go To My Lovely». Décidément, ce tas de bonus grouille de merveilles. Kus y évoque le boulevard Saint-Michel. C’est un romantique, un vrai. Il s’accroche à sa rampe, tellement c’est énorme et il va jusqu’au bout de son kut. Kus is one of the kings.

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    Il entame ensuite un petit bout de chemin avec un groupe espagnol, Los Tupper, toujours sur Sunthunder. Throwing Rocks In Heaven paraît en 2012. On y trouve des hits faramineux, comme sur chacun de ses albums, à commencer par «Something Must Change». Quelque chose de réellement puissant se dégage de ce balancement d’accords. On s’effare une fois encore de l’ampleur de ce son. S’il fallait résumer Kus en deux mots, on pourrait dire : éclat & power. Son rock relève du dandysme britannique. Avec «Lady Lady», il fait de la Stonesy. Il claque des accords à la Keef. Parti-pris évident et bienvenu. Il sonne les cloches de l’auberge espagnole. Il passe en mode boogie pour «Pocket Rocket». Il flirte même avec le glam. Il scie bien la syllabe du rocket. Encore une merveille avec «She Sits By The Window». Chaque fois, la magie opère. Il sait aussi brouiller les pistes, comme le montre «Better Person» : il démarre un petit balladif à la Nikki et puis l’air de rien, il prend de la hauteur, claquant des rafales d’accords magistraux. C’est confondant et bouleversant à la fois. On le sait, Dave bat le nave, il ne tourne jamais en rond et rien de sautait le submerger. Son rock présente toujours les mêmes caractéristiques : catchy & elegant. Il faut aussi écouter son «Isabel», as my blue turns to grey my Isabel, car c’est sublime. Il a ce côté plus emballant ke n’a pas Nikki. Kus tape dans son son, il a une façon unique de faire sonner sa Isabel/ My princess Isabel.

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    Si on manque de place ou qu’on peine à rassembler tous ces albums déments, on peut à la rigueur se contenter de deux compiles : In Some Life Let Gone Anthology 1997-2007 et The Monkey’s Choice/ The Kitchen Sink. La première balaye toute l’histoire de Kus, en passant bien sûr par les Bounty Hunters : «Kings & Queens», incomparable chef-d’œuvre de power-pop, «Threads», claironnant et bien ramoné de la cheminée, «Hooked To Your Heart», chanté à la Keef et ce «Dollar Kiss» qui n’en finit plus de s’envoler, sans oublier l’extraordinaire «Temporary Genius» de Bounty feast. Mais on a déjà dit tout le bien qu’il fallait en penser. On trouve aussi quelques cuts des Jacobites à l’air : le terrific «So Unkind», cette dégelée de Stonesy qu’est «Can’t You See» et cette merveille définitive qu’est «Heart Of Hearts». Arrêtez, n’en jetez plus ! Mais si, on trouve en plus de tout ça quelques hits des Tenderhooks («It Comes & It Goes», quadrature du cercle, power inexorable, «Dandelion Boy» chanté au sommet de l’art, «Where Her Head Used To Lay» chanté à la voix éteinte et noyé de son et de sax, puis des choses extraordinaires tirées des albums solo comme l’insubmersible «Riverboat Blues», ou encore le magical «Next Tuesday» et sa résonance universelle, et puis aussi la patate chaude de «Citizen», authentique stoogerie d’exaction parabolique, enfin, c’est une extraordinaire profusion de son et de punch, tiens comme ce «White Stockings» des Bounty Hunters qui justifie à lui seul le rapatriement de cette compile. Kus flashe sur les white stockings !

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    The Monkey’s Choice/ The Kitchen Sink est un Best Of de Dave Kusworth & The Tenderhooks qui va lui aussi tout seul sur l’île déserte. Encore un double CD qui grouille littéralement de puces. On le sait maintenant, à force de l’écouter en long, en large et en travers : Kus sait faire sonner les guitares. Il attaque son voyage aux pays des merveilles avec ce vieux hit des Tenderhooks qui s’appelle «It Comes & It Goes». Comme la vie, ça va, ça vient. Kus fait partie des gens pour lesquels le Dylan de 65 est resté un modèle absolu. Tout ici est visité par les vents d’Ouest et chaque cut se voit paré d’un solo flamboyant. S’il est un hit visité par la grâce, c’est bien «The Right Trade», typique du balladif dylanesque nappé d’orgue. Ça s’envole. Kus est une sorte de magicien spécialisé dans l’élégiaque. On reste dans la belle pop anglaise avec «Dandelion Boy» - Spend your money on dandelion boy ! - Il nous lie ça aux accords dylanesques et aux transitions scintillantes. La basse pouette dans le décorum, on croit entendre les meilleures guitares d’Angleterre, c’est un véritable ramdam de riffalama. Il sait aussi taper dans la chanson de marin soutenue à l’accordéon («Street Imagery») et bien sûr dans la Stonesy («Another Blonde»). On croirait même y entendre Keef, Kus nous joue ça en profondeur, il va loin, comme dans Le Grand Bleu, blonde blonde, c’est un vrai yeah man. Tous les cuts s’éternisent et finissent par nous envelopper, comme la mort. Kus renoue avec l’énergie de la beauté dans «How Come I Only Dream About You». Il se livre là à une nouvelle échappée belle sur fond de coups d’acou, de slides et de belle poussées de fièvre. Tiens, encore une énormité avec «All I’ve Got Left», emmené par une basse bien ronde. Kus chante toujours sur le même ton, mais ses kuts n’en finissent plus de s’envoler. C’est un peu comme s’il réinventait le romantisme à l’Anglaise, avec la klasse du Keef de 1968. Ses balladifs sont tellement inspirés que ça finit par devenir écœurant. C’est nappé d’orgue, foisonnant de son, il semble qu’il re-fabrique son monde à chaque nouvelle occasion et voilà un solo de claquemure suprême sur fond de shuffle lumineux. Ces mecs sur-jouent leur empire underground à la roulette russe et Kus explose sa fin de kut avec l’aisance d’un prince de l’underground. On croit rêver. Koi ? Autant de son ? Autant de slide d’Americana voluptueuse ? Autant de nappes d’orgue Hammond dans un seul kut ? Impossible ! Mais si ! Et ça continue avec «Tell Me About Your Love». Kus ne vit que pour les balladifs ensorcelants. Il ne chante k’à l’insistance du cœur brisé. Retour à la Stonesy avec «A Real Girl». Il nous klaque une féerie d’accords superbes. Que de son, my son ! Kus ne force pas sa voix, il tape dans le dylanex flamboyant - I just don’t know when - Final étourdissant, ces mecs font ce que les Stones n’ont jamais réussi à faire : exploser en plein vol. Il se pourrait bien qu’on entende Darrell Bath à la guitare sur «When Her Head Used To Lay». Et nos amis se fâchent avec «Blood On The Knife». Kus continue de prodiguer des miracles, ce blast de garage en est un, Kus le prend au chant haleté et insistant. Ce mec a tous les bons réflexes. Derrière lui, ça joue jusqu’à plus soif.

    La fête continue avec Kitchen Sink : «Apartment To Compartment» pourrait très bien figurer sur l’un des albums du Dylan de l’âge d’or. Kus gratte comme Bob. On entend des coups d’harmo et ça repart en mode Stonesy. Quel hommage faramineux ! Voici un «Salisbury Road» explosé aux écumes de wah et ça bascule très vite dans la folie. Kus s’y aménage des montées en température. Avec «Terminus», il tape dans la meilleure Stonesy. Il n’a pas de voix, mais il passe comme une lettre à la poste. Il a toujours de sacrées guitares autour de lui. Chez lui, tout est prétexte à rock anglais, ce que montre clairement «Temporary Genius» qu’il nous explose aux guitares de non-recevoir. Il repart de plus belle avec «Another Teardrop» et ramène se petite voix dans l’incroyable dégelée de son. Quelle injustice de voir un mec aussi brillant s’enterrer dans les catacombes de l’underground ! Son rock chargé d’accords et de bracelets compte parmi les meilleurs crus. On le voit même faire du Louie Louie dans «Need You No More». Il fait tout avec rien. Il montre avec «Hanging Around Here» qu’il sait crever le ciel. Il détient ce pouvoir. Voilà encore l’un de ces balladifs chargés d’ambiance, il chante sans voix mais avec une foi inébranlable. On croise à nouveau les excellents «Dandelion Boy» et «Blood On The Knife». «Tonight & Forever» démarre au buzz de Kus. Il n’en finit plus de faire rouler sa petite industrie de mid-tempos intermédiaires et ça devient assez fascinant, il faut bien l’admettre. Il tape «Split Milk» à l’amertume révélatrice, ça sent bon l’aventure, c’est joué aux passades de verdeur foudroyante. Ah comme ce mec peut être doué ! Au moins autant que son compère Nikki Sudden. Ces mecs connaissent les secrets du rock. Kus n’en finit plus de taper dans le limon du Split Milk, ça devient effarant de qualité au finish, tapé à fond la caisse et chanté à pleine voix. Admirable «Through & Back Again» ultra secoué du cocotier. Kus y casse du suck sur le dos du doom. Il sort le big sound de sa manche et produit une fois encore un final grandiose ultra gratté des poux. Il tape dans la démesure d’exception, les guitares vitupèrent, le beat palpite d’énergie et ça vaut tout l’or du Rhin. On sort épuisé de ce mish mash électrique de burning down.

    Signé : Cazengler, heiiiiin ? Kus que c’est ?

    Dave Kusworth. Disparu le 19 septembre 2020

    Nikki Sudden & Dave Kusworth. Jacobites. Glass Records 1984

    Nikki Sudden & Dave Kusworth. Robespierre’s Velvet Basement. Glass Records 1985

    Nikki Sudden & Dave Kusworth. Lost In A Sea Of Scarves. What’s So Funny About 1985

    Dave Kusworth. The Bounty Hunters. Texas Hotel 1987

    Dave Kusworth & The Bounty Hunters. Wives Weddings & Roses. Kaleisdoscope Sound 1988

    Bounty Hunters. Threads A Tear Stained Scar. Creation Records 1989

    Dave Kusworth. All The Heartbreak Stories. Creation Records 1991

    Jacobites. Howling Good Times. Regency Sound 1993

    Jacobites. Old Scarlett. Glitterhouse Records 1995

    Jacobites. Heart Of Hearts (The Spanish Album). Por Caridad Producciones 1995

    Nikki Sudden & Dave Kusworth. Kiss Of Life. Swamp Room Records 1995

    Dave Kusworth. Princess Thousand Beauty. Glitterhouse Records 1996

    Jacobites. God Save Us Poor Sinners. Glitterhouse Records 1998

    Dave Kusworth & The Tenderhooks. Her Name In The Rocks. Wagging Dog 2001

    Dave Kusworth & The Tenderhooks. English Disco. Wagging Dog 2001

    Dave Kusworth & The Tenderhooks. ST. Wagging Dog 2003

    Dave Kusworth & The Tenderhooks. Like Wonderland Avenue In A Cold Climate. Mod Lang Records 2004

    Dave Kusworth. Tambourine Girl. Sunthunder Records 2008

    Dave Kusworth Group. The Brink. Troubadour 2008

    Dave Kusworth & Los Tupper. Throwing Rocks In Heaven. Sunthunder Records 2012

    Dave Kusworth. In Some Life Let Gone Anthology 1997-2007. Troubadour 2007

    Dave Kusworth & The Tenderhooks. The Monkey’s Choice/ The Kitchen Sink. Troubadour 2017

    Rag Dolls. Such A Crime. Troubadour 2015

     

    Le teasing des Teasers - Part One

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    Voilà qui est complètement inespéré : paraît cette année un film sur le plus underground des groupes Crypt, les Enfants Terribles d’Édimbourg, les Country Teasers. L’eusses-tu cru ? Comme c’est un film underground sur un groupe underground, on est à peu près sûr de ne pas pouvoir le choper, car les salles de cinéma bon chic bon genre à la mormoille ne proposent jamais les films underground. Les films underground servent uniquement à faire baver les amateurs d’underground. Donc tu peux faire une croix dessus, sauf dans deux cas. Soit tu habites Toulouse, l’une des rares villes civilisées qui organise des festivals de cinéma underground. Soit tu as une copine toulouso-underground qui te fait des cadeaux underground.

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    Alors God bless her, car un beau matin, le film underground est arrivé ici dans une grande enveloppe-pochette surprise. Le film s’appelle This Film Should Not Exist, réalisé par le plus underground des trios underground, Gisella Albertini/Massimo Scocca/Nicolas Drolc. Ce n’est pas tout : le DVD se présente sous la forme d’un véritable objet d’art : pochette sérigraphiée au noir intense sur carton brun cru, numérotée à la main, avec à l’intérieur un insert qui est la set-list d’un concert des Country Teasers en Allemagne, à Crailsheim. Une vraie set-list, mon gars, écrite à la main, avec le feutre qui bave à travers le papier. C’est pas du bidon. Bienvenue au paradis des objets d’art bénis des dieux de l’underground. Le pire c’est que le film est superbe. Et tu comprends bien que la superberie monte encore d’un cran si en plus tu vénères les Country Teasers.

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    Les pauvres Country Teasers ont toujours eu mauvaise réputation : trop provocateurs, trop ancrés dans Mark E. Smith et le no sell out. Les film est tellement bien foutu qu’il restitue à la perfection leur génie foutraque. L’âme de ce gang de pieds nickelés s’appelle Benedict R. Waller que tout le monde appelle Ben Waller. Il porte des lunettes, un stetson, une chemise blanche, une cravate noire et se fait appeler the Rebel. Dès le début du film, il présente ses compagnons d’infortune : Al ‘Ek’ King on drrrums, Simon Stephens on beiss, Richard ‘Country & Western’ Geennan on guitah et Alan Crichon on rhythm guitah. Le film raconte le Rock’n’Roll Riot Tour, la première tournée européenne des Country Teasers en 1995 avec les Oblivians, organisée par Tim Warren, qui à l’époque était le grand visionnaire du gaga américain. Le film propose donc un montage de footage d’époque et d’interviews de Ben Waller et de Simon Stephens plus récents puisqu’ils datent de 2008. Ben Waller explique qu’il n’a aucun souvenir de la tournée, car il était trop défoncé - Always stoned, drinking a lot, poppers - Par contre, Stephens indique qu’il s’est ennuyé pendant cette tournée, car il n’aimait pas trop la défonce systématique.

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    Ben Waller est très bien conservé. Il a en fait la même tête qu’en 1995. Il nous explique qu’il a fini par devoir prendre un job pour vivre et le voilà cariste chez Jardiland. Il conduit un fenwick. Il rappelle aussi qu’à l’origine de l’histoire des Teasers, en 1992, il avait envoyé une K7 avec deux morceaux chez Crypt, parce qu’un copain lui avait conseillé de s’adresser à Crypt. Bingo ! Les morceaux ont plu à Tim Warren. Et du coup, Tim Warren fait une apparition dans le film pour dire à quel point il adore les Country Teasers. Il fucking love these guys. Simon Stephens va encore plus loin : pour lui, Ben est un authentique genius. Le footage n’en finit plus de nous le rappeler, footage d’autant plus explosif qu’il mélange les plans des Teasers sur scène avec ceux des Oblivians qui étaient eux aussi assez révolutionnaires à leurs débuts. On voit les Teasers tripoter «Gay Nurse» et traîner «Wandering Star» dans la boue.

    Dans la deuxième partie du film, Ben Waller rend hommage à Datblygu, un welsh duo lo-fi composé de David R. Edwards et Pat Morrison qu’on voit aussi témoigner dans la foulée. Et ça monte encore d’un cran avec un hommage superbe à Mark E. Smith, qui, nous dit Ben, a inventé a new way of writing - Mark E Smith invented the idea you can sing everything - Puis il cite encore deux grosses influences, Pussy Galore et les Butthole Surfers, plus la country qui lui apprend la discipline narrative - Pussy Galore était invincible, scary - Alors pour qu’on comprenne mieux, il nous fait un schéma pédagogique : «Mark E. Smith et Pussy Galore forment un entonnoir. Je verse ma cervelle dedans et ce qui sort par le petit bout, en dessous, c’est ma chanson, my song.»

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    Tim Warren vient de rééditer les fameuses Too Rag Sessions des Country Teasers qui datent de 1994. Dans le petit texte de présentation, il revient sur la fameuse K7 de Ben trouvée dans une boîte postale qu’il avait encore aux États-Unis et qu’il relevait deux fois par an. Il écoute la K7, flashe dessus, fait un single avec les deux cuts et prend contact avec Ben. Il lui propose de financer une session chez Toe Tag à Londres pour un premier album. Okay then. Les Teasers enregistrent. Manque de pot, le résultat ne plaît pas à Ben Waller qui vire le batteur et qui refait tout. Tim Warren a raison de penser que les Teasers avaient du génie, avec cette espèce de punk abject et squelettique, une sinécure qui n’en a cure. L’«I Don’ Like People» est du pur Mark E. Smith, c’est un son dont on s’entiche comme d’une potiche, ça joue sec et net et sans bavure, dans l’esprit du Pastoral. Mais c’est en B que ça se corse avec «Henry Crinkle», une jolie mélasse de la rascasse, essence d’une science du son. Ben Waller sonne le glas du punk. Avec «Kill», les Teasers se montrent aussi irrespectueux des conventions de Genève que l’était Mark E. Smith. Pas de plus belle irrévérence que celle-ci. Ils se montrent vraiment dignes de Captain Beefheart. Leur «No Limits» est complètement hypno, encore très Fallique dans l’esprit. Brutal et décidé. Et tout ceci se termine avec «Black Cloud Wandering» et sa clameur démente. Ces mecs ont du génie, ça crève les yeux - I was born/ Under a wandering star - Ils en font une horreur tribale et gluante.

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    Les Teasers démarraient leur anti-carrière en 1995 avec un mini-album paru sur Crypt et intitulé The Pastoral - Not Rustic - World Of Their Greatest Hits. On est hélas forcé de parler de coups de génie pour au moins deux raisons : «Black Cloud Wandering» et «Number 1 Man». Ils tapent leur Black Could au pire shuffle de garage qui se puisse imaginer - I was born under a black cloud wandering - Ben Waller fait ce qu’on appelle du groove de garage-punk. Ça devient très sérieux. Il joue pour de vrai. Il impose un son et une façon de chanter le gaga cra-cra. Il va loin, encore plus loin que Van Morrison dans «Gloria». Il sonne comme une plaie d’Égypte. Il transforme le wandering star en enfer punk. Il travaille plus loin son «Number 1 Man» à la concasse de type Magic Band. Assez atroce. C’est claqué dans l’œuf du serpent. C’est le son dont rêvent chaque nuit les Écossais. Ben Waller tâte du punk extrême et s’entiche de raw to the bone. On le voit gratter ses puces à rebrousse-poil dans «How I Found Black Brodie». Pour créer la sensation, il décide d’irriter. Avec Ben, la rigolade est terminée. Il ramène des rengaines puantes («Only My Savior»), du sale garage à la cocote («Bitchers Fuck Off») et de la country lo-fi lardée d’excès de violence («Oh Nurse»). Ben veut que ça dégueule alors il ramène «Anytime Cowboy» - They don’t need art to be confontional bastards - C’est un vrai shoot de teasy teasing, some kinda damaged country & western. Poweful ! Ce disque plairait infiniment à Bernadette car il grouille de révélations. Ben explose Elvis avec «Been Too Long». C’est très spectaculaire car explosé de l’intérieur du son. Ce mec va loin dans la vérité crue de la véracité. Il enfonce bien son clou country avec «Stand By Your Man» qu’il chante d’une voix de clochard céleste. Il reprend son mighty «Anytime Cowboy» pour le plonger dans un son plus Velvet, histoire de l’exacerber. Il frise le Lou Reed, ce qui vaut pour un compliment.

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    Pour caractériser les Teasers, on peut parler d’un son assez distinctif, une sorte de fouillis zébré peu aimable. Paru sur Crypt en 1996, Satan Is Real Again n’est pas fait pour plaire au grand public. Ils grattent leur post dans un coin de studio et se moquent du qu’en-dira-t-on. Ben Waller charge sa petite barquasse à la ramasse de la rascasse. C’est avec des cuts comme «Panty Shots» qu’ils ont construit leur réputation de mal aimables écossais. Ils trempent souvent dans la country démobilisée, avec un banjo en fond de trame. «Little Black Clouds» avance en hochant la tête comme un dindon. On peut donc qualifier ça d’instro têtu monté sur un beat dindon. La viande satanique se trouve en B, à commencer par «Thank You God For Making Me An Angel». Ben Waller sait très bien claquer le beignet d’un cut de rock quand ça lui chante. Il prend un malin plaisir à sonner comme Mark E. Smith, sûr de lui, cassant, avec du son derrière, et pas n’importe quel son. «Cripples» se veut assez Dada dans l’esprit. Ça joue au beat dindon, une fois de plus et Ben Waller chante par dessus la jambe. Awite ! Il faut bien avouer qu’un cut comme «Some Hole» est assez âpre, pour ne pas dire rebutant. D’ailleurs, il ne fait rien pour créer de la sympathie. «Don’t Like People» dit bien tout ce qu’il faut savoir. Il chante son mépris des gens. Et puis voilà le morceau titre. C’est très insidieux, voire malsain. Il adore ça.

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    En 1999, les Teasers se retrouvent chez Fat Possum pour Destroy All Human Life. L’album est spectaculairement vide de viande. Ils atteignent les sommet du laid-back désespérant avec «David I Hope You Don’t Mind». Ben Waller chante aussi sont «Hairy Wine» à la petite ramasse sans donner beaucoup d’informations. On le voit même chanter faux en B sur «Go Away From My Window». Ils passent à la vieille bossa cabossée avec «Brown Jesus Etc» et cherchent la petite bête d’hypno avec «Women & Children First». On note la présence d’un petit tiguili de guitare en fond d’écran. Ils terminent cet album assez blank avec un «Song Of The White Feather Club Secretary» assez poweful. Ben Waller chante ça à l’insistance vinaigrée. Mais il ne fait aucun effort pour se rendre graphiquement enjoyable.

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    Larry Hardy, boss d’In The Red Recordings, adore les albums des Country Teasers, puisqu’il en inscrit quatre à son catalogue, à commencer par cette espèce de compile impavide vaillamment intitulée Science Hat Artistic Cube Moral Nosebleed Empire. Difficile à écouter, car il s’agit là d’un univers rabrouant et sans concession. Ce double album renvoie bien sûr au célèbre Trout Mask Replica, chef-d’œuvre de libre entreprise provocatrice. Ben Waller propose le même genre de déglingue post-moderniste. Il chante à la distance écossaise avec une morgue qui rappelle non seulement celle de Captain Beefheart, mais aussi celle de Mark E Smith. Tout est joué par dessus la jambe, à la bamboche maximale. Le son qu’il sort tient plus du vinaigre que du psyché bien propre sur lui. Ben Waller cultive aussi un goût prononcé pour l’insistance. Il faut attendre «Kill» en A pour retrouver les Teasers qu’on aime bien, ce punk de la désaille joué sans vergogne. Ils veillent à rester dans l’inconnu bien cru, dans l’incongru de la pire espèce. Ils savent créer des moods parfaitement insidieux. Avec «No Limits», ils semblent vouloir aller se percher au sommet de leur art, montés sur un beat têtu comme une mule. Très Fall dans l’esprit. Ils cultivent aussi le côté obsédant à la Beefheart. On les voit aller très vite en besogne avec «After One Thing» et embarquer «Can’t Sing» au riff arthritique. C’est le rockab des squelettes, can’t fucking sing ! Ils jivent «Some Hole» à l’ancienne, au beat un brin hypno. Bon, disons que Ben Waller est avec Mark E Smith le grand agitateur free d’occident, le digne héritier du Magic Band. «Good Pair Of Hands», «Retainer» et «Tough Luck On Jack» sont là pour le prouver - I’ve got a good pair of hands - Tout est très weird, très envoûté du bulbique. Il faut écouter cette compile avec précaution. Ils jouent «Retainer» au sax free de la médina, c’est du pur Magic-banditisme, un beat tribal aux portes du désert. Si on s’extasie devant «Tough Luck On Jack», c’est parce qu’ils manient extrêmement bien leur patrimoine. Ils nous refont le coup du guitar wreck à la sauce Magic Band. Quelle fabuleuse rengaine au long cours ! Ils jouent la carte de la déconstruction ambivalente, la pire de toutes. On note encore la présence d’un «Small Shark In Tiny Pool» assez insisté du beat et tangué du bassin, pas fait pour plaire au grand public ni aux rombières. Ben Waller nous en bouche un dernier coin avec «Secrets In Welsh» l’une de ces mélodies intrigantes dont il a le secret. Tout est tellement intense chez ce prodigieux binoclard underground que les bras nous en tombent.

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    Avec l’étrange Secret Weapon Revealed At Last Od Full Moon Empty Sportsbag paru en 2003, Ben Waller tire l’overdrive de son weird genius et ce dès «Success». Aucune chance d’en réchapper, le Success te saute à la gueule. Peu de groupes savent ainsi manier la démesure et ça dégueule de son. Avec «Boycot The Sudio», ils sonnent très Velvet, ils tapent ça au big heavy Teasers Sound, Ben Waller ne laisse rien transparaître, il s’enracine dans le glauque d’Ebimburgh, il chante du nez avec un son épais qui évoque une colique de fantassin. Il claque l’intro de «Todtill» à la merdre verte de Pere Ubu. Il n’existe rien de plus insalubre que cette soupe. Il fait monter une tension extraordinaire, même si les passages d’accords ne trompent pas : c’est du gros bouzin. «Sandy» sonne comme un nouveau coup de génie abracadabrant gratté à la sourdine métaphysique. C’est aussitôt larger than life, real big ! Tout le son du monde est au rendez-vous. Ben Waller libère ses eaux. Il encrasse son hot shit comme un maniaque. On pourrait presque parler de démarche intransigeante, tellement c’est raide. «Harry Wire 2» sonne très Ubu, avec son beat hors des considérations. Ces mecs là sont incapables de la moindre concession. Alors ça devient trop facile et ça tourne à la combine. À l’écoute de «Young Nuns Up For Sex», on comprend une chose : le spontanéisme, il faut que ça dégueule pour que ça marche. Ben Waller joue la carte de la fameuse dérive abdominale chère à Léo Ferré. Il faut lui laisser le temps de développer ses idées, car elles sont toujours intéressantes. Il chante son Young Nuns aux voix mélangées du Velvet. Mais ses tours ne marchent pas à tous les coups. «Man V Cock» vise la petite décadence, mais finit par insupporter. Ça se termine avec «KHWPSA», un vieux gaga digne d’In The Red. Ben Waller chante avec l’appétit d’un vieux crocodile et derrière lui ça gratte sévèrement.

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    On retrouve quelques vieilles connaissances sur le Live Album paru deux ans plus tard. Tiens comme par exemple «Boycott The Studio» bien tapé au cymbalum, et «Success» joué au heavy no way out. Ben Waller fait ce qu’il faut pour tout saborder. Tout semble très mal barré sur cet album. Quand on écoute «Black Change», on se demande vraiment comment à l’époque on a fait pour supporter ça. Tout est bâti sur la réputation de Ben Waller, un mec qui ne fait pas de cadeaux. Ils terminent leur valse idiote avec une belle apocalypse, et c’est bien là l’apanage des Country Teasers. Ils sont capables d’exploser un cut, ce que ne saura jamais faire le petit garage band du coin de la rue. Mais ça retombe assez vite dans la booze et il faut attendre «Brown Jews Etc» pour voir Ben Waller tirer son épingle du jeu. Il éclate ses heavy chords, il rallume le brasier de son punk-rock de no way out. Admirable ! Il enchaîne avec un «Nothing Was Delivered By Freight Train» de dernière extrémité. Derniers spasmes avec «Women & Children First» monté sur un beat hypno et un «Obey» pourri de son et malsain comme pas deux, mais attention, Ben Waller nous fait le coup de la guitar on fire, c’est-à-dire l’apocalypse selon Saint Ben.

    Signé : Cazengler, Country tisane

    Country Teasers. The Pastoral - Not Rustic - World Of Their Greatest Hits. Crypt Records 1995

    Country Teasers. Satan Is Real Again. Crypt Records 1996

    Country Teasers. Destroy All Human Life. Fat Possum Records 1999

    Country Teasers. Science Hat Artistic Cube Moral Nosebleed Empire. In The Red Recordings 2002

    Country Teasers. Secret Weapon Revealed At Last Od Full Moon Empty Sportsbag. In The Red Recordings 2003

    Country Teasers. Live Album. In The Red Recordings 2005

    Country Teasers. Toe Rag Sessions. Crypt Records 2019

    Gisella Albertini/Massimo Scocca/Nicolas Drolc. This Film Should Not Exist. Furax 2020

    *

    Je ne voudrais pas endosser le rôle de l'oiseau de mauvais augure, hélas, je ne croa pas me tromper dans mes sombres prophéties, pour les concerts c'est terminé jusqu'à la fin de l'année. Une seule solution pour ne pas sombrer dans la morosité ambiante, replonger dans le souvenir des soirées tumultueuses. Surgit aussitôt en ma mémoire le nom d'un groupe : Blondstone, auteur d'un set fracassant. C'était il y a longtemps au mois de novembre 2014, le 15 pour les esprits méticuleux, vous retrouverez la chronique dans la livraison 210 du 21 / 11 / 2014, au Bus Palladium in Paris, je m'étais promis de les revoir, mais ils étaient de Nancy, et n'ont pas souvent tourné à des distances raisonnables de mon domicile... vous connaissez le dicton, loin des oreilles, loin du cœur... bref à part de rares visites sur leur F. B.... mais en cette soirée de nostalgie, le désir irrépressible de les écouter est revenu me tarauder l'âme, tel le bec cruel du vautour déchirant le foie de Prométhée...

    Blondstone a commis quatre opus, des boules bruyantes destinées à lézarder les murailles branlantes de notre monde déjà prêt à s'écrouler.

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    Le logo, la griffe de Blondstone, a été créé par Franck Vannier Chalmel, l'a su se mettre en accord avec l'esthétisme du groupe d'une manière étonnante car d'après le peu de son œuvre accessible il paraît être avant tout un amateur du dessin crayonné classique.

     

    Alex Astier : chant, guitare / Pierre Barrier : batterie / Nicolas Boujot : basse /

    BLONDSTONE

    EP # 1 / Octobre 2012

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    Les trois premières pochettes ont été réalisées par Paul Banon, le lecteur ne perdra pas son temps à faire défiler les images stockées sur son tumblr, tapez Pol B Artworks, un ami proche du groupe qui est aussi un véritable artiste. Beaucoup de tattoos, nombreuses couves de groupes, il est indéniable qu'il possède une patte ( plutôt noire que blanche ) qui le distingue de la plupart.

    J'avoue que j'ai été surpris par la pochette des deux premiers EP, je ne m'attendais pas à une telle image en correspondance avec la musique de Blondstone. Cet homme enfermé, replié, recroquevillé en escargot sur lui-même me paraît bien énigmatique. La signification ne m'est pas évidente. De quelle sagesse trismégiste symbolisée par ces trois têtes de reptiles qui s'exhaussent vers lui est-il habité, et quel est ce cristal stellaire qu'il semble détenir en sa main ? Il convient sans aucun doute de le considérer comme un sceau, une morsure sigillique tamponnée pour insuffler davantage de force à l'impact sonore.

    L'on retrouve la même estampille sur la pochette du deuxième EP. Les contrastes de couleur se sont estompés comme si le tampon matriciel avait été utilisée trop souvent. A trop se contempler le nombril peut-être se perd-on en soi-même et s'éloigne-t-on de l'orbe du monde.

    Rare & strong : au début vous dites ce n'est ni rare ni fort, même que ça ne casse pas les manivelles, un peu trop pop, et une minute plus tard vous comprenez que vous n'avez entendu qu'un des plateaux de la balance et vous ne savez pas pourquoi mais vous êtes convaincu que ce satané morceau est méchamment bien équilibré, c'est qu'entre un mec debout sur le bord du trottoir et un autre qui se tient pieds joints au sommet de l'Everest, c'est exactement la même position, mais entre les deux il y a un abîme. Tout est en place depuis ces clochettes de biquettes qui gambadent dans les alpages en intro, la voix qui se pose là-dessus comme un serpent qui se love au soleil, et la machine qui tue se met en marche. Très anglais pour le son. Un morceau truffé d'épisodes. Comment à trois ont-ils pu déployer tant d'imagination ? Facile, ils ont compris comment ça fonctionne. Hard to remove : une intro qui tire-bouchonne, l'on pressent qu'ils vont pousser le bouchon assez loin, l'on ne s'est pas trompé, une batterie qui frappe dans le rythme tout en donnant l'impression d'être à côté, idem pour le chant qui vous parvient de loin avec cette désinvolture accablante de celui qui lit un texte les yeux fermés, par-dessous une basse qui ouvre une gueule de chat vicieux et la referme chaque fois qu'une souris passe, rajoutez une guitare qui vous vrille les oreilles et c'est parti pour le grand chambardement, vous êtes obligé d'emprunter le pont, soyez sûr qu'il va s'écrouler dans quelques instants, en fait c'est le même morceau que le précédent, donc moins rare, mais plus fort car il est totalement différent. Moins pop. Plus rock. La fin ressemble aux quarantièmes rugissants. Shoot shoot shoot : le convoi de marchandises s'ébranle doucement et prend bientôt sa vitesse de croisière, rails qui grincent et guitare grondante, le diable conduit le train, murmure à votre oreille, comme il est tentant, vous ne résisterez pas, rien de plus excitant qu'un blues rampant qui tient ses promesses, c'est votre cerveau qui explose, Blondstone vous en fait voir de toutes les couleurs. Feu d'artifice. Arrêt descente. Shoulder to cry on : quarante-cinq secondes de précipitation lente, des cris dans le lointain, et le bastringue commence, une nouvelle fois cette voix qui glace et qui fouette, et les instrus qui font le beau, des tigres qui sautent dans les cercles enflammés de la batterie, la basse qui enfonce les pieux du barnum à coups répétés et la guitare qui imite le barrissement des éléphants, un grand foutoir, mais tout est réglé au millimètre près. Sauf les acrobates qui s'écrasent sur le sol du haut des tremplins, leurs corps éclatent comme des outres remplies de sang. Monsieur Loyal dans le micro commente l'apothéose. Lazy : léthargie comateuse, l'intro se traîne, et la voix module et mollassonne, la batterie n'en peut plus, les guitares rampent, dur de vouloir vivre quand tout vous rappelle en vous-même, tout s'emmêle dans votre tête, que s'est-il produit pour que le blues comateux vire au cauchemar aux dents plus longues que la nuit...

    Un bel EP, Blondstone cherche et trouve ses marques. Ont-ils vraiment autant emprunté aux Queens Of The Stones Ages qu'on le prétend, si oui, ils ont surtout compris la règle numéo 1 : un morceau de rock'n'roll ne saurait être un long fleuve tranquille. Et la numéro 2, il est interdit de s'ennuyer.

    BLONDSTONE

    GOT THIS THING ON THE MOVE

    EP # 2 / Décembre 2012

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    Deuxième EP un peu spécial, une reprise d'un band inattendu, Grand Funk Railroad, un groupe de Détroit pas très aimé et pas très connu par chez nous. Une carrière un peu trop erratique pour agglomérer un noyau de fans assez large. Le projet de Grand Funk était assez simple en ses débuts, jouer plus fort que tous les autres. Personnellement j'aimais bien cette énorme masse sonore qui s'écroulait sur vous, l'impression qu'une dislocation de banquise géante sortait des haut-parleurs de votre gramophone préféré. A la réflexion ( qui n'engage que moi ) Grand Funk me paraît être l'ancêtre inconscient, inconnu et inattendu de la cold-wawe et de la noise-music. Il existe des généalogies secrètes, lors du concert de Blondstone à les voir sanglés dans leurs vareuses et à l'épaisseur du son qu'ils dégageaient, s'était imposé à mon esprit le rappel de ces premières vidéos des Animals de leurs passages sur la BBC. Or l'un des morceaux les plus réussis de Grand Funk fut leur reprise live d'Inside looking out des Animals.

    Got this thing on the move : est-ce important que l'élève dépasse le maître, ne serait-ce pas mieux qu'il sache s'en différencier. David s'attaque à Goliath parce qu'il possède une fronde, Blondstone ne détient pas cet outil magique, aussi adoptent-ils une tactique différente celle de rester groupés durant toutes les phases du combat. Les Grand Funk étaient assez sûrs d'eux-mêmes pour que dans les moments clefs, deux la mettent en sourdine pendant que le troisième s'adjugeait la devanture. Les Blondstone se serrent les uns contre les autres comme des sardines dans leur boîte, celui qui ferraille devant n'a rien à craindre ni sur sa droite ni sa gauche, l'a ses valets d'armes qui emberlificotent aussi l'ennemi. Donnent dans la surenchère instrumentale, du coup ils perdent la séminale présence des roots-rock, mais ils forgent un son plus moderne, si le premier EP sonnait très anglais, celui-ci louche beaucoup plus vers la grande Amérique, ils se dispersent un peu dans la clinquance sonophile, mais ils ont appris à voir leurs défauts auxquels ils porteront remède dans les mois qui suivent.

    BLONDSTONE

    MASS SOLACE

    Avril 2014

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    Vous risquez de mal interpréter la pochette, cet homme qui crie en essayant d'arracher ses liens n'est pas ficelé au poteau de torture. Ce qu'il empoigne à pleines poignées ce sont les liens d'égotisme de l'auto-ligotage. Image de délivrance. Blondstone a gagné en maturité. Remet ses propres pendules à l'heure. Ne soyez pas étonnés des titres qui étaient sur le premier EP, ce n'est pas du remplissage, de nouvelles versions

    Mass solace : que vous promettais-je ! L'on reconnaît Blondstone rien qu'à leur manière de composer leur intro, mais ce n'est plus la même chose, si vous savez goûter la différence entre un salmigondis de crevettes et la bisque de homard vous comprendrez, z'ont enjambé le saut qualitatif, engendré la coupure épistémologique, deux minutes d'instrumental symphonique, un rock qui part de tous les côtés tout en traçant une courbe dans l'espace d'une pureté parfaite, et quand Alex Astier lève la voix vous croiriez entendre le plein chant de la messe noire d'un monastère satanique qui résonne sous les ogives martelantes de Pierre Bonnier, alors le chantre se lance dans un prêche apocalyptique tandis que résonnent les soubassements cryptiques de la basse de Nicolas Boujot, et tout le bâtiment s'effondre dans le feu de l'enfer. Bursting shell : cavalcades de tambours, galopades de guitare, tamponnades de basse, pas de problème la voix s'attarde tandis que la musique gesticule dans tous les azimuts, un refrain sans frein, et chacun repart dans son délire, c'est à qui se fera remarquer, mais la charge ne s'arrête jamais, Blondstone vous en donne plus, et quand le rythme de la musique s'arrête c'est pour battre de l'aile au plus haut de l'azur et s'abattre plus bas que terre. Shoot shoot shoot : pas besoin de savoir faire la différence, elle s'impose. Une épaisseur, un velouté absent de la première mouture, la voix plus sûre, il semble qu'ils ont rallongé le manche de la guitare pour que les notes montent plus haut, vous n'avez pas marché sur la queue de votre chat c'est Alex qui miaule et rugit à la manière d'un tigre qui s'affale sur sa proie. La basse de Nicolas tournoie et les baguettes prévoyantes de Pierre creusent une fosse commune. Oulala : magnifical ! Vous avez une guitare qui sonne le glas, une basse qui crache ses poumons, une batterie qui catche, et un vocal qui s'enflamme comme une torche vivante. Le genre de truc auquel personne ne saurait résister. Pères et mères indignes, écartez vos enfants, le délirium tremens les guette. On your own : vont sûrement en profiter pour glisser un morceau plus faible que les autres au milieu de l'album, ben non, pas de tromperie sur la marchandise, que du bon et celui-ci particulièrement avec l'Astier qui crache son vocal et toute la fanfare qui suit derrière à fond les manettes, je vous laisse imaginer le capharnaüm, l'autre qui vous demande sans arrêt si tu n'as pas cymbale, alors que t'es en train de devenir cinglé. Rare & strong : moins rare puisque on l'a déjà entendu sur le first EP mais diantrement plus fort. Commencent par un bruit de casserole et continuent par un grondement de lessiveuse. Y vont plus décidés et davantage hargneux. Sont partis, z'ont mis du venin d'aspic au fond de la bouteille de grenadine. De quoi étancher la soif de vivre d'un troupeau de dromadaires perdus dans le désert. Que voulez-vous on est stoner ou on ne l'est pas. Lazy : l' a c'est plutôt stoned. Ont changé de dealer depuis la fois dernière, z'ont pris le leader qui leur a fourni de la bonne, vous le mettent plus profond et plus jouissif, n'ont jamais plané aussi haut. Sauront-ils redescendre. Faites leur confiance. All my flaws : une voix plus rauque et un morceau plus rock, ( est-ce possible ), rien à dire les fruits du péché sont les plus lourds et les plus goûteux, un petit côté première prise de Led Zeppe, tout au feeling et à l'énergie. C'est fou comme le mal est attirant. Daze me : mais pas confuse, encore ce truc qui n'appartient qu'à eux, la voix devant et en même temps en retrait prend sa revanche sur les refrains, une orchestration de cimetière, délire instrumental, la guitare frôle le free, la basse vient sonner les cloches pour l'empêcher de dérailler totalement, c'est beau comme du Malher, des crotales s'enfuient de votre valise dans le hall de l'hôtel, affolement général. Lunatic asylum sur toute la terre ! Les morceaux les plus longs sont les meilleurs. Shoulder to cry on : ont-ils vraiment enfermé Alex dans un cercueil pour enregistrer le vocal introductif, en tout cas la suite ressemble à une vidéo de L 17 tourné dans un abattoir. Un régal. Z'ont dynamité la compo, sa mère ne la reconnaîtra pas. L'est beaucoup plus belle et beaucoup plus puissante. Hard to remove : pour le dernier morceau, ils essaient de limiter les dégâts mais ils n'y réussissent pas, leur échappe, un étalon sauvage qui défonce son box parce qu'un troupeau de juments en chaleur passe devant l'écurie. Une furie, un carnage, tout ce que l'on aime dans le rock'n'roll.

    Le problème ce n'est pas que Blondstone ait commis un très très bon album, c'est qu'il doit y avoir un nombre pharamineux de groupes qui n'osent pas rêver d'en produire la moitié d'un du même niveau. L'est sûr qu'un tel disque a dû réconforter des masses d'amateurs dans l'hexagone.

    BLONDSTONE

    EP / Mai 2018

    Total changement de style pour la pochette réalisée par Sophie Fontaine, encore une fois la visite de son tumblr, So Wil(d) Artwork & photography se révèlera émotionnant. Un univers totalement différent de celui de Paul Banon que la couve de ce CD est loin de laisser deviner.

    Nous définirions sommairement le monde de Sophie Fontaine comme des aperçus d'un rêve incertain volés aux reflets anciens de miroirs enfouis dans la poussière des greniers, de lointaines jeunes femmes y ont laissé les traces de leur présence, leurs images pâlies y subsistent telles des vers talismaniques de vieux poèmes romantiques, elles s'immobilisent là, figées dans le néant de leur représentation, vous aimeriez les saisir, mais elles restent insensibles à l'appel de vos yeux, et une amère solitude envahit votre âme.

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    Pas de chance ce coup-ci, elle n'avait pas de sylphides graciles dans son objectif mais trois grands gars en chair et en os. Des rockers remuants. Alors elle les a éloignés dans le tremblé de ses argentiques, d'un coup d'obturateur magique elle les a transportés dans l'imaginaire américain des voyous classieux qui peuplent les films de gangsters des années quarante. J'ose imaginer qu'elle a tenté d'imager le titre oxymorique de l'EP, sombres certes mais si doux.

    Alex Astier : chant, guitare / Pierre Barrier : batterie / Adrien Kah : basse /

    My dark sweet friend : le temps a passé depuis l'enregistrement précédent, en quatre ans il en coule du liquide sous les ponts du rock'n'roll... à la basse Nicolas Boujot a été remplacé par Adrien Kah, le son n'est plus le même. L'impact de ce frère d'ombre qui n'est pas sans analogie avec la Nuit de Décembre d'Alfred de Musset est beaucoup plus ramassé, étrangement le groupe semble avoir renoué grâce à ses harmonies vocales avec les effluves britanniques de son premier EP, la batterie a gagné en concision, mais elle a perdu ce semblant de désordre a-méthodique que nous aimons. Liquid sound : les lyrics sont particulièrement soignés chez Blondstone, mais ce poème psyché tient de lui-même debout sans accompagnement musical. Cette particularité est assez rare et mérite d'être notée. Une intro spiralée comme le groupe les aime, s'agit de monter les blancs en neige noire, un vocal qui n'est pas sans évoquer la manière dont Bowie émettait chaque mot afin qu'il apparaisse non comme un simple vecteur de sens mais en tant que signal sonore nous avertissant qu'il y avait un autre mystère indicible à déchiffrer, un peu à la façon dont Swinburne disposait ses joailleries dans les colliers de ses vers. So british. No need to say it : une rythmique davantage carrée, trop honnête pour que l'on puisse y croire, l'est sûr que quand on veut cacher quelque chose le mieux est de le crier sur les toits – le coup de la lettre volée d'Edgar Poe – un groupe français qui en murmure davantage dans la langue de Shakespeare, vaudrait mieux dire de De Quincey, que bien de leurs collègues nationaux. C'est avec ce troisième morceau que l'on commence par comprendre le subtil travail d'orfèvre auquel se livre Blondstone dans cet Ep, faire en sorte que l'inclusion du chant dans la pâte instrumentale grumelée et en ébullition ne soit pas un pensum ou une dorure complémentaire mais la poignée de levain décisive. Hole in my skin : le vocal devant et le background qui pousse du museau pour s'adjuger la première place, consent à s'effacer pour le refrain mais insiste beaucoup dès qu'il s'achève, sur la fin le tressage devient plus complexe, parfois l'on a du mal à percevoir qui est qui, les guitares vous ont de ces retours de flammes qui finissent par emporter et carboniser le morceau. The guiding light : hurlements initiaux et la rythmique s'alourdit, le chant rampe, la lumière brûle dans le passé, déploiements lyriques, la fusée du présent décolle. Assez mystérieux, l'on cherche le sens caché de cet oriatoriock, la musique de Blondstone n'est pas du gros vin qui tâche, un élixir corruptif qu'il convient d'analyser pour en saisir toutes les fragrances. Parfois la puissance s'allie avec la beauté.

     

    Stoner, grunge, groove, psyché sont les adjectifs les plus employés pour définir Blondstone, aucun de ces termes n'est à proprement parler déplacé, mais insuffisant. J'évoquerais plutôt une expérimentation spectrale et historiale de l'after-heavy-hard, l'exploration consciente des possibilités du style, un peu comme s'ils voulaient garder la puissance des power-chords tout en leur greffant le maximum d'harmonie-mélodique. Tout cela mis en place et conditionné par le traitement de la voix qui prend le pas sur la tonitruance de l'orchestration. Un des groupes les plus importants de la scène actuelle.

    Damie Chad.

    ROCK 'N' ROLL STORIES

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    Au mois de septembre 2019, j'étais allé grappiller dans la série Rock'n'roll Stories mise en ligne par Franco et consacrée aux pionniers du rock. J'avais choisi mes chouchous Gene Vincent, Eddie Cochran, mais aussi Bill Haley et Buddy Holly. Je m'étais promis d'y revenir, mais la vie nous offre sans cesse de nouveaux chemins... Entre temps une nouvelle série de dix de nos idoles a été proposée, voici donc celle de Johnny Burnette. Pourquoi précisément Burnette. Il s'agit d'un rendez-vous d'amour raté. J'ai eu vent de l'existence de Burnette bien avant de l'avoir entendu. Une biographie dans la revue Shake, ce devait être en 1967... J'aurais bien voulu me procurer un de ses disques mais dans ma lointaine Ariège et le peu d'argent de poche à ma disposition, c'était-là une mission impossible... Dans les années qui suivirent j'ai dû être victime d'une conjuration interplanétaire, impossible d'entendre un de ses titres dans les émissions radiophoniques de rock spécialisées, et pire malgré des centaines de casiers ou de cartons systématiquement répertoriés chez les disquaires d'occasion, les brocantes, les vide-greniers etc.. jamais un microsillon... J'ai fini au tout début des années quatre-vingt par mettre la main sur une réédition CD du mythique Rock 'n' roll Trio en Espagne ! Entre temps, la fièvre de l'adolescence était passée, pas mal ai-je décrété, mais arrivé trop tard pour être admis dans mon panthéon tutélaire. C'est plus tard à Paris que je me suis aperçu de l'aura quasi-mystique dont était entouré ce 25 centimètres dans le milieu rockababilly.

    JOHNNY BURNETTE

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    Dès la fin du générique vous changez de couleur, vous devenez vert vitriolé chaque fois que Franco vous présente les premiers simples ( originaux, il va sans dire ) de Johnny. Evocation de l'enfance ( très ) pauvre de Johnny et de son frère Dorsey qui travaillèrent à la Crown Company avec un certain Elvis Presley. Les deux frères essaient de tirer la queue du diable par les deux bouts, sport et musique, boxe sur le ring et hillbilly dans les bars. Les horions détournent Johnny de l'horizon pugilistique, c'est pourtant dans ce milieu qu'ils ont rencontré Paul Burlison qui deviendra le guitariste des River Rangers qui prendront le nom de Rock 'n' roll Trio en 1952. Elvis entre chez Sun en 1954, le flair infaillible du rocker désertera Sam Phillips le jour où les frères Burnette frapperont à la porte du studio... Peut-être Sam a-t-il pensé qu'il n'y aurait pas assez de place pour deux nouvelles idoles... Un premier single pas décisif sur Von. C'est à New York en finale d'un radio-crochet qu'ils sont approchés par les maisons de disques, Burlinson préfèrerait Capitol mais les frères Burnette optent pour Coral et l'emportent à une voix près... l'on raconte que dépité Capitol se serait alors tourné vers Gene Vincent...

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    Deux séries de sessions vont se suivre, une à New York avec Paul Burlison à la guitare, et une autre où il est fait appel à des musiciens professionnels dont le guitariste Grady Martin qui revendiquera d'avoir tenu la guitare sur les titres du Rock'n'roll Trio. Certes l'on reconnaît à coups sûr le style de Grady sur certains titres, mais n'y avait-il pas deux guitares sur d'autres... La grosse machine promotionnelle est lancée, passages-télé dans les shows les plus cotés, tournée avec Carl Perkins et Gene Vincent, mais la mécanique s'enraye, les disques ne se vendent pas... plus grave la brouille survient entre les deux frères, Dorsey ne supporte pas l'appellation Johnny Burnette Trio, il quitte le groupe, quelques titres seront encore enregistrés avec Grady Martin mais début 1957 Coral ( qui drive aussi Buddy Holly ) ne renouvelle pas le contrat... le groupe se rabibochera, le succès ne sera pas au rendez-vous. Johnny se débrouille pour rencontrer Ricky Nelson qui tombe en admiration devant son talent de songwriter... Ricky et Roy Brown interprètent quelques titres qui trouveront leur public, les essais des Burnette, notamment chez Imperial, sont loin de faire le buzz... Johnny finit par atterrir chez Liberty ( dans les studios duquel Eddie Cochran... le monde du rock made in USA est relativement étroit... ), Dreamin' sera disque d'or, You're sixteen suivra le même chemin, mais Johnny a mis beaucoup d'eau dans son rock... les années 60 ne seront pas fastes, tournée en Australie; en Angleterre, quelques titres qui ne lui apportent pas la gloire... passe chez Chancellor, Reprise, puis chez Capitol, finit par fonder son label Sahara qui deviendra Magic Land... en août 64 le bateau de pêche sur lequel était Johnny est heurté par un hors-bord, sous la violence du choc, Johnny tombe à l'eau et se noie... Encore quelques disques de Johnny, et Franco n'élude pas la question qui fâche, le Burnette que nous aimons est celui du Rock 'n' roll Trio, qui était totalement passé à l'as de pique à l'époque... La suite reste de qualité mai, à part quelques pépites, Johnny met la pédale douce... il faut manger et payer ses factures...

    Une histoire assez triste quand on y songe, malgré l'aura légendaire qui l'entoure les débuts du rock'n'roll in the United States, ne furent pas une sinécure pour ses principaux héros...

    Cet épisode dure dix-huit minutes et quelques secondes, j'ai occulté nombre de détails, il est très bien raconté sobrement et intelligemment mis en images. Que voulez-vous les rockers ont leurs petits chaperons rock à eux.

    Damie Chad.

     

    VI

    ROCKAMBOLESQUES

    LES DOSSIERS SECRETS DU SSR

    ( Services secrets du rock 'n' rOll )

    L'AFFAIRE DU CORONADO-VIRUS

    Cette nouvelle est dédiée à Vince Rogers.

    Lecteurs, ne posez pas de questions,

    Voici quelques précisions

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    19

    Molossa et son protégé se glissèrent sans encombre entre les barreaux de la grille. Pour ma part je l'escaladai avec prestesse. Nous passâmes sans bruit derrière la villa. Un des contrevents présentait quelques faiblesses. Quelques instants plus tard nous étions à l'intérieur. Molossa ne manifestait aucune inquiétude. Molossito frétillait de la queue, cette escapade nocturne l'enchantait. De ma lampe torche j'éclairais le moindre recoin. Nous visitions le rez-de-chaussée que je n'avais fait qu'entrevoir lorsque Thérèse nous avait entraîné au sous-sol. Nous ne l'avons pas encore emménagé avait-telle dit et ne s'étaient offertes à ma vue que que deux pièces vides. Elles l'étaient encore. Elles sentaient le renfermé. Cette odeur ne m'avait pas frappé. Nous montâmes à l'étage. Totalement vide, une couche de poussière sur les planchers, tout individu qui l'aurait arpenté aurait laissé l'empreinte de ses pas. Nous descendîmes à la cave. Dépourvue de ses rayonnages elle paraissait immense. Les murs de pierre étaient noirs de crasse. On avait dû en des temps plus anciens y entreposer du charbon. Molossito courait partout, la truffe au ras du sol, il semblait s'amuser follement. Molossa s'était posée sur son séant au milieu de la pièce dans la pose du philosophe détaché des contingences bassement matérielles. L'endroit paraissait abandonné depuis si longtemps qu'une personne à qui l'on aurait raconté que quelques heures auparavant il présentait l'aspect cossu d'une bibliothèque ne l'aurait jamais cru. Je ne me suis pas avoué vaincu. J'ai examiné au moins vingt fois chaque mètre carré. J'ai même été visiter le grenier. Bas de charpente et désespérément vide. Les chiens m'attendaient sagement au bas des crampons, un véritable mur d'escalade, qui permettaient d'y accéder. Lorsque je donnais le signal du départ Molossito qui commençait à s'ennuyer se précipita dans les escaliers, il n'avait pas descendu la moitié des marches qu'il remonta. Il tenait dans sa bouche un morceau de papier blanc qu'il déposa à mes pieds. C'était un morceau de sucre.

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    Le Chef sifflotait gaiement, lorsque nous pénétrâmes dans le local. Il avait étalé sur son bureau tout un régiment de Coronados sur lesquels il braquait son regard. Il m'écouta distraitement lorsque je lui détaillais la visite de la villa. Il félicita vivement Molossito pour la découverte du sucre.

      • Ah, nous sommes sur la piste, cependant agent Chad vous me décevez, j'attendais une boîte à sucre, et vous me rapportez un misérable morceau de sucre ! Je pense qu'il était dans la boîte qui nous préoccupe. Si je comprends bien, d'ici la fin de l'année à ce train-là, vous aurez reconstitué le contenu de ladite boite, ce qui est très dommage, car ce qui m'intéresse, c'est la boite ! Je sens que cette affaire vous dépasse. Je m'en chargerai donc moi-même. Je serai absent durant trois jours, d'ici-là vous expédierez les affaires courantes.

    Le Chef continua durant une bonne heure à contempler ses Coronados, il se résolut enfin comme à regret, de les ranger avec d'infinies précautions dans une valise qu'il referma avec un soin extrême avant de la rouvrir précipitamment.

      • Agent Chad, avez-vous remarqué comment un GSH, Génie Supérieur de l'Humanité peut lui aussi avoir ses moments de distraction, j'allais partir sans prendre un Coronado pour descendre les escaliers, et un deuxième dans ma poche pour parer à tout événement, lesquels vais-je emporter, sa main hésita longtemps avant qu'il ne se saisît de deux spécimens, l'un qu'il porta à ses lèvres, et l'autre qu'il fourra négligemment dans une de ses poches. Parfait, prenez la valise, pas comme une brute, et conduisez-moi à la gare.

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    Le Chef refusa d'emprunter une voiture. Un peu de marche à pieds ne nous fera pas de mal, avait-il déclaré. Nous marchions sans nous presser. Les chiens batifolaient autour de nous. Molossa frotta son museau sur mon jarret. Nous étions suivis. Le Chef s'extasiait devant une vitrine au milieu de laquelle trônait un aquarium de poissons rouges. Agent Chad avez-vous remarqué comme l'eau de ces cypriens est glauque. Nous retournâmes tous deux d'un seul geste, et fîmes feu sur les trois hommes en noir de l'autre côté du trottoir. Nous ne leur avons pas laissé le temps de réagir. Une nappe de sang se déversait dans la rigole.

      • Des réplicants, Chef !

      • Pas du tout, agent Chad, des hommes de l'Elysée, je les connais, ces gens-là détestent le rock'n'roll !

      • Attention Chef, il en arrive trois autres !

      • Parfois je me dis que la vie devient monotone soupira le Chef ! Rangez votre arme, Agent Chad, je pressens qu'ils ont un message à nous transmettre !

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    C'était vrai, mais ce n'était pas très agréable, d'autant plus que leur mine décidée et les trois fusils mitrailleurs qu'ils braquaient sur nous n'incitaient pas à l'optimisme.

      • Désolés, mais en haut lieu, l'on a décidé de liquider le SSR dé-fi-ni-ti-ve-ment ! Ne vous inquiétez pas, ce sera vite fait, et nous ne toucherons pas aux chiens, nous ne sommes pas des voyous.

      • Je vous en remercie déclara le Chef, toutefois si votre magnanimité me permettait d'exécuter ma dernière volonté, trois fois rien, juste mourir après avoir exhalé une dernière bouffée de Coronado !

      • Une bouffée, mais pas une de plus, je me ferai un plaisir de craquer l'allumette de votre ultime Coronado !

    Les trois hommes se rapprochèrent, le Chef sortit son Coronado de sa poche, en face celui qui devait être le chef craqua une allumette, il n'était plus qu'à quelques centimètres, le bout du cigare s'embrasa, le Chef ferma les yeux et il tira sur son cigare, longuement, longuement, longuement...

      • Dépêche-toi maintenant, sinon je tire !

    Le Chef exhala un gros nuage de fumée en direction des trois hommes, vous pouvez tirer maintenant ordonna-t-il, mais ils ne l'écoutèrent pas, ils étaient déjà morts.

      • Agent Chad, j'ai mis des mois à mettre au point cette arme meurtrière, le Coronado au curare, el Cobracito, manipulation dangereuse, d'abord vous remplissez votre cavité buccale de poison en faisant bien attention que la fumée ne touche en nul endroit une quelconque parcelle de votre chair, il faut être un excellent fumeur pour cela, et ensuite vous le recrachez à la gueule de vos ennemis qui le respirent et incontinent expirent. Le pire c'est que tout à l'heure au service je n'arrivais pas à le reconnaître ! Bon, je file prendre mon train, retournez au local et soyez prudents, je vous le répète.

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    La porte du service s'est ouverte, Molossa et Molossito se précipitèrent, j'exhalais une bouffée de Coronado :

      • Agent Chef, j'espère que vous m'apportez cette sacrée boîte à sucre, trois jours que je vous attends !

      • Agent Chad, quittez immédiatement ce bureau, et cessez de puiser dans ma réserve à Coronado quand je ne suis pas là ! J'espère que vous n'avez pas perdu votre temps durant mon absence !

      • Pas du tout, Chef, j'ai pris une décision importante pour le devenir de l'humanité, j'ai changé le titre de mes mémoires, finies Les Mémoires d'un agent du SSR, désormais elles s'appellent : Mémoires d'un GSH !

      • Première fois de votre vie que vous prenez une décision intelligente, agent Chad ! Et à son ton je compris qu'il ne plaisantait pas.

    ( A suivre... )