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  • CHRONIQUES DE POURPRE 673 : KR'TNT ! 673 : MARC ZERMATI / STEVE WYNN / BOB STANLEY / SANDY SALISBURY / MAN MAN / NEUROTIC OUTSIDERS / DANIEL DELISSE / RITUEL

    KR’TNT !

    KEEP ROCKIN’ TIL NEXT TIME

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    LIVRAISON 673

    A ROCKLIT PRODUCTION

    FB : KR’TNT KR’TNT

    16 / 01 / 2025

     

    MARC ZERMATI / STEVE WYNN

    BOB STANLEY / SANDY SALISBURY

    MAN MAN / NEUROTICS OUTSIDERS

    DANIEL DELISSE / RITUEL

     

     

    Sur ce site : livraisons 318 – 673

    Livraisons 01 – 317 avec images + 318 – 539 sans images sur :

    http://krtnt.hautetfort.com/

     

    *

    Un cavalier, qui surgit hors de la nuit
    Court vers l'aventure au galop
    Son nom, il le signe à la pointe de l'épée
    D'un Z qui veut dire

    ZERMATI !

    ZERMATI ! ZERMATI ! ZERMATI !

    Z ! 

     

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    WANNA BE YOUR SKYDOG

    Les Diggers et Tony Marlow rendent hommage à Skydog

    Suivi de Rhetoric K. O. – Interview fleuve de Marc Z

    Menée par Patrick Bainée et Patrick Cazengler

    (Camion Blanc / Décembre 2024)

     

    AUTO PORTRAIT

    Je n’ai été qu’une fois au contact de Marc Zermati. L’était dans le public qui assistait au live (local Harley Davidson, Paris) de Tony Marlow et d’Alicia F ! Pour le décrire, facile, il suffit de se rapporter au portrait, celui de face à l’écharpe rouge, d’Aristide Bruant peint par Toulouse-Lautrec. La même carrure, la même pose, le même chapeau noir. L’écharpe rouge vous fait penser à celle de Mitterrand, mais là  rien à voir, comparé à cet inconnu Mitterrand ressemblait à un gosse souffreteux enrubanné dans un gros cache-nez, à peine sorti d’une vilaine coqueluche. Le gars ne regardait pas, impassible il posait son regard sur le monde, rien ne lui échappait, la sagesse de celui qui sait et qui n’a besoin de rien d’autre, un empereur romain sur son trône, un dominateur, sûr de lui, de sa puissance, sa vaste houppelande noire arborait l’aspect d’une toge, une couronne de laurier remplaçait le chapeau et son écharpe rouge vous prenait des allures de laticlave pourpre.

    Une présence. Je me demandais qui c’était. J’aurais bien aimé aborder cet individu en auto-suffisance, il imposait, je n’ai pas osé, fais gaffe Damie, me disais-je, avec ta carte de visite de krockniqueur  tu vas passer pour un pied nickelé, l’a sans doute d’autres centres intérêts. Comme quoi le fameux flair du rockeur, ça ne marche pas à tous les coups.

    UNE AUTRE HISTOIRE

             Elle débute à la page 57. Hissez le grand cacatois, c’est une histoire de pirates. Oui je sais, aujourd’hui la marine à voile à voiles n’existe plus. Mais dans l’imagination d’un gosse elle n’a jamais disparu. Du moins ce qu’il en reste. Un conte de gamin ! N’oubliez pas que la différence entre un conte de gamin et un conte d’Edgar Poe n’est pas énorme. Bref notre héros doit être en sixième. Son imagination turbine à plein, par contre la réflexion n’est pas encore tout à fait au point. Croit dur comme du fer que la grande malle reléguée depuis des lustres au grenier contient un trésor. Il monte souvent la regarder. Il n’ose pas l’ouvrir. Il a dû lire L’Île au trésor de Stevenson, le coffre est certainement rempli de lingots, de bijoux, de pièces d’or, pourquoi pas une carte secrète… Un jour la tentation est trop forte, il soulève avec précaution le lourd couvercle, effarante déception, ce n’est pas le trésor des pirates qui s’offre à lui, mais les pirates eux-mêmes qui débarquent dans le grenier, sont tous-là, Barbe-Noire, Barbe-Rouge, Morgan, Jean Lafitte, les borgnes qui clignent de l’œil, les jambes de bois aux crocs-en-jambe redoutables, un ramassis hétéroclite de boucaniers, de corsaires, de nègres marron, même trois ou quatre pendus avec encore leur corde autour du cou. Quel ramdam ! Ça crie, ça hurle, ça s’interpelle, ça chante, ça rote, ça pète, ça glapit, ça trinque, ça fume des pipes en terre, ça crache, ça urine, ça chie et ça dégobille sur le plancher… l’est manifeste qu’ils ne savent pas se tenir. N’est pas nunuche le gaminos, le paternel pourrait se radiner, alors il  remballe le tout dans le caisson, il n’en a gardé que trois, qui portent une étrange marque noire tatouée sur le visage, et hop il se faufile dans sa chambre, sauvé, il peut maintenant s’intéresser à ses invités. L’est heureux, il en reconnaît un, c’est Chien Noir, celui qui se périt piétiné par un cheval dans le roman de Stevenson, il ne peut pas se tromper, son nom est écrit sur son tatouage, Skydog, Dog en anglais c’est le chien et Sky ne peut que vouloir dire black… il n’est pas toujours attentif à l’école…

             Cette histoire n’est pas signée, elle porte un titre : Vox : Sweet Punk Memories, elle se veut anonyme, les lecteurs de Kr’tnt ! la reconnaîtront facilement, elle plane comme les voix qui résonnent entre le vide et l’absolu dans les Solitudines Coeli de Victor Hugo. Elle conte l’origine des choses. Bien sûr elle ne part du commencement, se contente de dévider la soie foutraque d’un seul cocon du nid de vipères d’où ont surgi les différentes générations des amateurs de rock… Je me permets d’aborder ma petite contribution personnelle, c’est en 1967, sur Radio Monte-Carlo, pas vraiment une radio rock, que pour la première fois j’ai entendu parler des Doors, comme tout le monde je connaissais les Yardbirds, les Stones, les Who, et toute la suite, mais dès Break On Through j’ai compris que cette fois c’était différent, un truc en plus, une dimension que les précédents n’avaient pas, même Hendrix qui depuis deux ans poussait le bouchon un peu plus loin que toute la smala, les Doors véhiculaient une autre dimension, je l’ai vite reconnue : la poésie. Mon cas n’est pas unique. Nous étions quelques milliers à vivre cette initiation décisive, c’est ce que raconte cette histoire. Ne vous étonnez pas si ce texte évoque quelques écrivains romantiques et symbolistes. Le rock est un traumatisme existentiel.  Une fois que vous avez été foudroyé par les traits de feu de Kim Fowley, des Stooges, du MC 5, des New York Dolls, vous n’êtes plus pareil, baigné dans la fosse par le sang du taureau de Mitra, vous ressentez l’invincibilité du Sol Invictus, désormais vous serez un activiste rock.

             Pauvre France ! tout cela venait d’Angleterre et surtout d’Amérique. Pourtant une des batailles décisives se déroula en France, Marc Zermati en fut le principal général.

             Son histoire nous est racontée par Dinah Douïeb dans les cinquante premières pages. A l’origine de Marc Zermati il y eu sans doute un arrachement. Une faille. Sa famille quitte l’Algérie en 1961, le monde s’écroule-t-il pour lui, peut-être mais il a cette force de se reconstruire, tout seul à partir de rien. Dans quelle direction ? J’imagine qu’il a écouté  le suprême commandement de Baudelaire :

    Nous voulons, tant ce feu nous brûle le cerveau,
    Plonger au fond du gouffre, Enfer ou Ciel, qu'importe ?
    Au fond de l'Inconnu pour trouver du nouveau !

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    Ce sera donc le nouveau. Chance extraordinaire en cette époque lointaine le nouveau est facilement identifiable : c’est le rock ‘n’ roll. L’aurait pu devenir disquaire. L’a préféré ouvrir en 1972 l’Open Market, une boutique de disques, un repaire de dingues, qui n’est pas tenue par un boutiquier, il vend les disques et des fanzines que l’on ne trouve pas ailleurs. Arrivent des amateurs, de France et d’Angleterre, l’on y trouve même des vinyles des Pays-Bas et de la grande Amérique que les anglais trouvaient pas chez eux…  le lieu se transforme en bouillon de culture, en brouillon de rupture… un point d’ancrage et de largage, à New York, à Londres, l’époque est en ébullition, le mouvement punk se cristallisera dans les arènes du Festival de Mont-de-Marsan, improcksible n’est pas français… Les esprits chagrins parleront de circonstances, de coup de chance, de bluff, de hasard, Zermati l’agitateur-rock patenté ne serait-il pas simplement un agité… Un festival même devenu légendaire ce n’est pas mal, mais Zermati a un autre fer au feu : Skydog, un label rock !

             Nous y reviendrons. Nous sommes là au tout début de la vie aventureuse de Marc Zermati, elle a connu des hauts et des bas. Mais l’Homme est devenu une légende vivante. D’abord il a survécu. Jusqu’à sa mort en 2020. Un fort caractère. N’en a toujours fait qu’à sa tête. S’est fait des ennemis. L’a continué sa route. Dinah Daïeb vous livre de nombreux détails, même si à la fin elle parle surtout d’elle, ce n’est pas qu’elle tire la couverture à elle, je comprends que Zermati s’est un peu retiré en lui-même, comme le vieux sur sa montage, apaisé puisqu’il sait que ses disques-assassins continuent leur course autour du monde, et que son trône indétrônable est planté dans l’œil du cyclone…

             Jacques Ball, Patrick Bainée, Patrick Fouilhoux, Laurent Bigot, Alain Feydri, Tony Marlow, Cazengler le loser, s’y sont mis à six pour explorer en cent cinquante pages, le catalogue du label Skydog. Résultat, une histoire parallèle, presque secrète, underground, souterraine, voire mystique, tout au moins mythique du rock’n’roll, la veine maudite, le filon interdit, la mine de l’allemand perdue retrouvée, je vous laisse découvrir, c’est aussi un portrait de Zermati, l’homme en ses œuvres, chaque disque est un combat, une préférence, une intuition, Zermati récupère des bandes perdues introuvables et improbables, l’a le flair du rocker, ne se trompe pas, il devine non pas ce qui va marcher mais ce qui est bon. Que ce soit un groupe inconnu ou déjà légendaire, il s’active, il s’occupe de tout, de l’enregistrement, du mixage, de l’ordre des morceaux, organise les tournées…

    LES ENTRETIENS

             Nouveau gros morceau, trois longs enregistrements de Marc Zermati mené par Patrick Bainée et Patrick Cazengler, minutieusement  retranscrits par nos deux diggers, rédacteurs du fanzine  garage Dig It.

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             Zermati se livre. Plutôt : Zermati ce livre. Se feuillette  lui-même,  il parle comme un gars qui se met à table, mais qui ne vous livre que ce qu’il veut, que ce qu’il est. Juge son monde d’après ce qu’il est. Un pied-noir. Issu d’une famille aisée. Il n’aime pas de Gaulle, il n’aime pas les français, un réac viscéral. Obligé d’être toujours en action pour ne pas être prisonnier de lui-même, de ne pas se retrouver seul, confit (et déconfit) en lui-même. Contradictoirement il développe une vision classiste du rock’n’roll, si tu n’es pas né en banlieue, si tu n’es pas bouffé de la vache enragée,  si tu naquis avec une cuillerée d’argent dans la bouche, le rock’n’roll n’est pas pour toi. C’est un peu un mec qui se cherche un pays d’adoption, pour lui ce sera le Japon, l’a compris que depuis la perte de l’Algérie, sa patrie c’est lui-même. Parle du rock’n’roll. Depuis l’intérieur. Bien sûr c’est sa version à lui. Cela n’aurait aucun intérêt de se livrer à une contre-enquête, nous sommes tous pareils dès que nous commençons le récit de notre vie, pensez-vous que Proust (celui habillé en Marcel) raconte la ‘’ vérité’’, tout récit est une mise en littérature. De soi-même et des autres. Nous tissons notre toile, comme l’araignée, pour l’habiter et y phagocyter les autres à l’intérieur. De tout ce qu’il dit dans ce premier entretien du mois de janvier 2017 je ne garde que sa relation avec les Flamin’ Groovies. Les descend en flammes pour finir par reconnaître sa fascination, les vols du cygne mallarméen qui n’ont pas eu lieu. Qui n’ont pas eu dieu. La nostalgie obsédante de quelque chose qui n’a pas pu être.

             Le deuxième entretien débute par une diatribe politique anti-française, ne dit pas que des conneries, notamment sa chasse à courre sur l’obscurantisme intellectuel, créatif et religieux qui monte, se trompe tout de même un peu de cible en dénonçant le socialisme-coco, sans mettre en cause l’idéologie libérale… En quelque sorte ce deuxième wagon est plus trash que le premier mais je préfère. Si j’étais psychiatre je dénoncerai son petit côté parano, mais je ne suis même pas fou, peut-être parce qu’il parle des ses échecs, enfin des bourricots, il ne dit pas des cons, des groupes à qui il a proposé des plans, pas sur la lune, mais jouables qu’ils ont refusés… revient sur Johnny Thunders dont il loue les qualités humaines, il termine sur une dénonciation des dernières évolutions d’Iggy, avant de se lancer dans une longue analyse apologétique de sa propre nature caméléonesque qui lui permet de  rentrer facilement en contact avec toutes sortes de milieux, d’avoir ainsi une certaine emprise sur le monde.

             Troisième et dernier entretien. Il devait être suivi d’un autre mais la vie ou la mort en ont décidé autrement. Le plus virulent des trois. La jeunesse et les filles en prennent pour leurs grades. Pour les jeunes ce n’est pas tout à fait de leur faute, les media et le showbiz ne leur déroulent que des artistes de vingt-cinquième zone. La France n’a jamais été un pays rock’n’roll. S’il y a eu une révolution au siècle précédent c’est le rock’n’roll, le pays a refusé de monter dans le train du plus grand mouvement artistique… Un véritable effondrement spirituel. Qui n’est pas près d’être surmonté. Fustige et stigmatise les nouvelles relations sexuelles suscitées par les comportements féminins actuels. Régression sexuelle et déni de la liberté de pensée et d’être sont les deux mamelles plates du totalitarisme acculturel et pro-religieux qui s’impose sans même de soubresauts de protestations. Parle aussi beaucoup de rock’n’roll. Donne son avis péremptoire et souvent sans appel sur nombre de nos idoles. Un régal. Certes il n’engage que lui, mais il connaît le dessous des cartes. Si l’on était France-Dimanche en gros titre l’on écrirait : Révélations fracassantes ! Nous en subodorions plusieurs, ce qui ne nous empêche pas de penser que nous aussi nous sommes pleins de jugements, de condamnations, de déclarations d’amour qui nous engagent davantage qu’ils ne dépeignent les personnes que nous évoquons.

             De ces trois entretiens, nous retirons les enseignements suivants, qu’il est nécessaire de les lire, qu’ils sont indispensables pour une appréciation de notre musique, mais que de fait Mar Zermati grand manitou rock devant l’éternel, n’aime pas spécialement le rock’n’roll, qu’il aime avant tout la bonne musique et surtout ce qui lui plaît à lui. S’il a été capable d’influencer le devenir du rock  en une de ses époques charnières, c’est justement parce qu’il n’a jamais été un fan transi. Ce sont ces propres mots. Qui trop étreint risque de perdre sa force de frappe. Justement il frappe fort. Un marteau nietzschéen qu’il abat sur les idoles simili-toc, simili-rock !

             Tope fort. Dope fort. Rock fort. OK pour le K.O.

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    LE SERPENT SE MORT LA QUEUE

             Français encore un effort ! Trois textes en annexe :

             Pour la lettre Z du Petit Abécédaire de la Crampologie, paru en 2016 au Camion Blanc,  Bainée et Cazengler ne s’étaient pas rompus les méninges pour choisir l’impétrant :  Zermati Marc s’imposait. Il répond au Quiz-test proposé par les deux compères. Vous pouvez vérifier : les réponses corroborent les intempestives déclarations des trois entretiens.

             Un texte que nos lecteurs se doivent d’avoir en mémoire : puisqu’il est paru dans nos Chroniques de Pourpre (livraison 300 du 27 / 10 / 2O16) signé du Cat Zegnler en hommage à Yves Punk Adrien, dont les mémorables feuillets Je Chante le Rock Electrique parus dans R&F en 1973-74, dessinent un itinéraire parallèle à celui au chemin emprunté par Zermati en ses années de renaissance éllectrique… Hommage à un écrivain contemporain essentiel.

             Le livre est terminé. Non la voix revient, elle reprend son histoire exactement à l’endroit où elle l’avait commencée, une Vox vampirique qui conte, sur trente pages, la vie de Kim Fowley, Kim l’extravagance rock, toujours hors des sentiers battus, toujours en avance, il est le mime de ce qui va survenir, selon son œuvre le rock est en sempiternelle recomposition, en perpétuel renouvellement, un magicien fardé de noir, de blanc, de rouge, en route alchimique vers le soleil de la mort, sexe, folie, prescience, outrage, dévergondage musical exalté, un artiste prémonitoire trop grand pour son époque, si étranger à ces temps enfuis et révolus qu’elle a fini par lui ressembler, qu’il faut maintenant la regarder au travers de son œuvre et de sa vie pour la voir. La partie contient le tout. Le rock’n’roll détient le monde en ses affres.

             Marc Zermati fut un des passeurs essentiels de la folie du rock’n’roll.

             Il ne nous étonne pas que Tony Marlow, un de nos rockers essentiels, qui participa à l’aventure de Skydog, se soit chargé d’ouvrir ce livre, non pas seulement hommagial, car en son essence strictement rock’n’roll !

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    Damie Chad.

            

     

    Wizards & True Stars

    - Syndicate d’initiatives

    (Part Seven)

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             On l’attendait au coin du bois, cette autobio. On suit Steve Wynn à la trace depuis la nuit des temps, alors les lumières d’une autobio sont attendues comme le messie, mais si. Quand bien même on en arriverait au Part Seven, il n’est pas inutile de rappeler que Steve Wynn est un Wynner et qu’il a jadis marqué les esprits au fer rouge avec le premier album de son Dream Syndicate, The Days Of Wine & Roses. On l’hisse encore aujourd’hui sur l’étagère du haut avec les grands albums de l’indie-rock américain, ceux de Bob Mould et de son Dü, des Pixies, du Brian Jonestown Massacre, de Dinosaur Jr et des Screaming Trees. Oui, le Wynner fait partie de cette brochette d’effarants surdoués. Mais bizarrement, il est resté un peu underground, tiens un peu comme les frères McDonald et leur Croix Rouge. Leur destin, c’est de rester indy, alors c’est très bien comme ça. Ils ne sont pas obligés d’aller vendre leur cul comme l’ont fait les Dandy Warhols, U2 et REM. C’est toujours bien de rappeler que l’underground est une vertu et que de passer dans le mainstream est souvent l’occasion de basculer dans la putasserie. Le seul qui ait réussi à échapper à cet horrible destin, c’est peut-être Frank Black, il ne tient tête à la putasserie que par la seule force de son talent. Comme l’a fait Dylan toute sa vie, mais Dylan, c’est à une autre échelle. On a tendance à l’oublier aujourd’hui, mais à une époque, il montait tout seul sur scène avec sa gratte et créait un monde nouveau. Un monde qui n’a rien perdu de son éclat. À sa façon, le Wynner alimente lui aussi depuis quarante ans le grand mythe de l’American rock, avec une ribambelle d’albums tous plus intéressants les uns que les autres, sauf peut-être Medecine Show, le deuxième album du Syndicate, flingué par Sandy Pearlman. Le Wynner revient longuement sur l’épisode de cet enregistrement dans cette autobio affreusement mal titrée, I Wouldn’t Say It If It Wasn’t True. L’épisode Medecine Show est le cœur battant du book, le pauvre Wynner rappelle à quel point cet enregistrement fut pénible et douloureux. Le Syndicate a 18 mois d’existence et Kendra Smith qui ne supporte pas bien les tournées à travers les USA quitte le groupe, remplacée par Mark Walton.

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             Cette coquine de lâcheuse flirte avec David Roback, futur Mazzy Star. Elle monte Opal avec lui et sera vite remplacée par Hope Sandoval. Le Wynner dit qu’il n’a pas insisté pour retenir Kendra quand elle a annoncé qu’elle quittait le Syndicate - You’re quitting. Okay, we’ll get someone else - Sous-entendu : someone else better. Le Syndicate vient de signer avec A&M qui leur file un budget de 150 000 $, 50 fois le budget du premier album et en plus, A&M leur paye du matos neuf, une Strato et un Mesa Boogie pour le Wynner, et un Marshall stack et une Les Paul pour Karl Precoda. Lors du dernier concert, juste avant d’entrer en studio, Karl a fracassé sa vieille Silvertone sur scène, scellant ainsi le destin des 18 premiers mois du Syndicate. Le Wynner y voit un signe funeste. Il ne se trompe pas. Les voilà en studio à San Francisco, pour une durée indéterminée, avec Sandy Pearlman, le producteur à la mode. Pearlman leur demande de jouer. Over and over and over. Combien de fois ? demande le Wynner. Again and again and again. Ah bon. Alors again and again and again. Again ? Again and again and again. Pearlman leur dit de jouer jusqu’à ce qu’il dise stop. Il ne dit jamais stop. En fait, le Wynner s’aperçoit que Pearlman joue la montre pour faire rentrer du blé. Il facture son temps à A&M. Les semaines et les mois. Il a carte blanche. Alors again and again and again. Plus il passe de temps en studio, plus il facture et plus il s’enrichit. Le Wynner parle de «legendary long recording sessions.» Le seul cut de Medecine Show qui ne sera pas overdubbé à gogo est le fameux «John Coltrane Stereo Blues», «the only track we played together.» Pearlman transforme le son du Syndicate, il vire le «feedback-laden, assaultive noise-fest» du premier album pour aller plus sur son fucking classic rock, celui d’UFO et de Blue Öyster Cult. Comme Karl adore UFO, il s’entend comme cul et chemise avec Pearlman et du coup le Wynner se retrouve marginalisé. Il voit bien que l’album est mal barré. C’est pas leur son. Et son amitié avec Karl en prend au passage un sacré coup dans l’aile. Le Wynner nous décrit ce cauchemar dans le détail, on s’y croirait. Il raconte comment un fucking producteur transforme le son d’un groupe et le détruit. À chaque fois, c’est la même histoire qui se répète. Le mec fait autorité parce qu’il est dans la cabine, mais il ne comprend RIEN à ce que fait le groupe. Il impose un son et voilà, t’es baisé. Car c’est pas ton son. Le Wynner dit que le cauchemar dure six semaines ! Karl ré-engistre ses guitares et bourre l’album d’overdubs, il rejoue tous ses solos, again and again and again - Six weeks. Seven days a week. Twelve hours a day. That’s a lot of time for lead guitar overdubs - Le Wynner dit que ça le rend fou. Et plus il montre que ça le rend fou, plus Pearlman et Karl lui font comprendre qu’il n’est pas le bienvenu dans le studio. Quand le Wynner arrive, un silence de mort l’accueille, «like a scene out of a western, when the bad guy walks into the bar.» Karl profite de l’indécision chronique de Pearlman pour essayer des tas de variantes. Lui, il est content. Il ne s’en lasse pas. Le Wynner se plaint auprès de son manager, mais il ne sait pas que quatre mois de studio sont encore prévus. À la fin, Pearlman convoque le Wynner pour enregistrer les vocaux. Alors il chante, mais c’est jamais assez bien. Pearlman lui dit de recommencer : «I don’t think we’ve have it yet. Go out and sing some more.» Allez hop, dix takes ! Allez hop, encore dix takes. Over and over. Pearlman prend des bouts. Il en faut encore. Jour après jour. Sept jours sur sept. Douze heures par jour. Un jour, Pearlman veut qu’il croone, alors le Wynner croone. Le lendemain, il lui demande d’haranguer comme le prophète sur la montagne. Alors le Wynner harangue. Puis Pearlman lui demande de faire Jim Morrison ou alors Gene Scott. Le Wynner finit par craquer et balance un bouteille vide dans la gueule de Pearlman, et tu sais ce que Pearlman lui sort ? «Mick Jones never once threw a bottle at me.» Il se pourrait bien que Pearlman soit l’un des fléaux du XXe siècle, avec le rock FM et Frampton. Bien sûr, Pearlman explose le budget de 150 000 $ , il va presque réussir à le doubler, nous dit le Wynner écœuré - We’d spent $250,000 over five months making the record - un record qui sera boudé par la critique américaine - What happened to the Dream Syndicate?

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             Medecine Show souffre en effet d’un mal bien connu : une production ca-tas-tro-phique. Visiblement, Pearlman ne sait pas ce qu’est un Syndicate. Il a formaté le son du groupe sur la grosse powerhouse américaine, c’est une grave erreur, car le Syndicate est un groupe essentiellement psychédélique, doué d’un sens aigu de la Mad Psychedelia. Le son de l’album manque totalement de caractère et ce volontarisme qui sortait si bien The Days Of Wine And Roses de l’ordinaire brille par son absence. Dommage, car certains cuts comme «Armed With An Empty Gun» et «Bullet With My Name On It» auraient pu exploser. Mais le son est désespérément raplapla. Un légionnaire dirait du son qu’il n’a rien dans la culotte. Quand on compare avec le son des Screaming Trees, c’est d’une sécheresse atroce. Pearlman a limé les dents du Syndicate et le Wynner sonne comme un fucking miauleur d’indie pop. Pearlman n’a RIEN compris au Syndicate. Absence totale de culture politique. Le morceau titre qui ouvre le bal de la B des cochons retombe comme une bite molle. Il est monté sur un riff de basse tellement enregistré qu’il en devient grotesque. Alors que ça ne demande qu’à exploser. On ne parle même pas du «John Coltrane Stereo Blues» qui est une insulte à la mémoire de Coltrane, et ce n’est pas de la faute du Wynner. On est loin du compte et même loin de tout. Le pauvre Precoda essaye de percer des murailles mais dans cette absence de démesure, ça ne sert à rien. En plus, c’est monté sur le plus plan-plan des plans de basse. Quelle catastrophe productiviste ! Il y a sur cet album au moins quatre titres qui auraient dû éclater au Sénégal. Mais le plus grave dans cette histoire est que le Syndicate va jeter l’éponge à cause de cet album. Steve Wynn : «It was a real ugly time. Karl and I fought a lot. Eventually we weren’t talking. The band broke up making that record.» Merci Pearlman.

             Pendant le tragique épisode de cet enregistrement, le Wynner flashe sur la secrétaire du boss d’A&M, Johnette Napolitano. Ils vont rester trois ans ensemble. On la retrouvera un plus tard dans Concrete Blonde, avec le légendaire Jim Mankey, l’ex-Halfnesson, c’est-à-dire les early Sparks.

             Medecine Show va donc détruire le lien qui unissait le Wynner et Karl Precoda. Lever était déjà dans le fruit : le Wynner ne supportait plus de voir Precoda frimer torse nu sur scène et faire de l’arena-rock posturing, «foot on monitors, cliched and unimaginative posing that bugged me no end. The more he posed, the more I sabotaged.» Au retour d’une tournée au Japon, le Wynner annonce aux autres qu’il arrête le groupe. Puis il va bien sûr le remonter sans Precoda, avec Paul Cutler, un bon guitariste qui n’est pas «afraid to go off the rails with noise and disonance.» New sound and new collaborator, rien de tel pour redémarrer ! La pauvre Precoda a dû en baver quand il a vu le Dream Syndicate à l’affiche. Sur ce coup-là, le Wynner n’a pas les mains propres. C’est même un peu dégueulasse de reformer un groupe en douce. Ils enregistrent Out Of The Grey que n’aime pas trop le Wynner - my least favourite of the albums I have made in my life - Son pourri des années 80, le fameux cutting-edge sound «of your time.»

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             Côté tournées, le Wynner ne fait pas forcément les bons choix. Il se vante d’une première tournée américaine en première partie d’U2, puis d’une autre en première partie d’REM. D’ailleurs, il va devenir tellement pote avec Peter Buck qu’ils vont monter ensemble le Baseball Project. Il dit aussi quelque part s’intéresser de près à John Couguar Mellencamp et Tom Petty. Ah ces Américains ! Il aime bien aussi citer les noms d’Abba, des Talking Heads et de Phil Collins. Parfois, ça craint un peu. 

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             Et puis, dans l’autobio, t’as tout l’amont de Medecine Show, la rencontre avec Kendra Smith, le recrutement de Donald Duck, le roi du beurre, et bien sûr l’embauche de Karl Precoda. Il arrive d’abord en tant que bassman, «impossibly skinny», avec un «real rock haircut, equal parts 60s mod and 70s Stones.» C’est vrai que Precoda avait beaucoup d’allure sur les photos. À la même époque, le Wynner devient vendeur chez Rhino Records qui vient d’ouvrir sur Westwood Boulevard. Puis comme ça marche bien avec wild Precoda, il demande à Kendra de venir jouer de la basse. En 1981, le groupe est au complet : Precoda, Kendra, Donald Duck et le Wynner commencent à écumer les clubs californiens. Le Wynner fricote aussi avec Sid Griffin, lequel Sid Griffin lui propose de se joindre à son groupe qui va devenir bien sûr The Long Ryders, mais le Wynner préfère rester un Syndicaliste. D’ailleurs, il reste à se mettre d’accord sur le nom du Syndicate. Le Wynner propose d’abord Big Black Car en hommage à Big Star, mais les autres n’en veulent pas de son Big Black Car. Pffffffffff. C’est Donald Duck qui propose The Dream Syndicate, tiré d’Outside The Dream Syndicate de Tony Conrad. Mais nous dit le Wynner, personne ne sait à l’époque que The Dream Syndicate était le nom du groupe que Tony Conrad et John Cale avaient formé juste avant le Velvet. Et pouf, la première démo. Budget ridicule : 200 $. Tout en une seule prise - I’m pretty sure we recorded every song in one take - Tout en live. Le Wynner chante dans la cuisine pour isoler sa voix. Il sait qu’il ne veut ni devenir professionnel, ni devenir célèbre. «That was likely one of our strongest avantages.» Sur scène, les Syndicalistes font des ravages avec du «ear-shrieking feedback coaxed from Karl’s Silvertone guitar through my Champ amplifier.» Fan de Creedence, de Dylan et de Neil Young, Mikal Gilmore adore le son des Syndicalistes. Leur premier EP sort en 1982, en plein boom du Paisley Underground. The Salvation Army et les Bangs, futures Bangles, jouent avec le Syndicate. C’est à cette époque que le Wynner se lie d’amitié avec Dan Stuart, de Green On Red. Bizarrement, il parle beaucoup de Stuart, jamais de Chuck Prophet. Il va d’ailleurs monter un duo avec Stuart, Danny & Dusty.

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             Leur premier album s’appelle The Lost Weekend. On y trouve un joli bouquet d’influences, de la Stonesy avec ce «Baby We All Gotta Go Down» qui semble sortir tout droit d’Exile. Dan Stuart s’en donne à cœur joie. Ils tapent aussi dans Linky Link avec «The King Of The Losers» qui est monté sur un thème bien connu : «The Rumble». Du coup, tu te croirais chez les Cramps. Puis ils vont droit sur le Dylanex avec une magnifique cover de «Knocking On Heaven’s Door». T’as Donald Duck qui bat le beurre, alors tout tient bien la route. Dan Stuart et le Wynner duettent comme des cracks sur «Miracle Mile». Le Wynner en profite pour renouer avec le Syndicalisme et lâche une fantastique envolée de poux multicolores. L’autre duo d’enfer est le «Send Me A Postcard» en B. Stuart te le chante à l’accent fêlé. Ah comme ils duettent merveilleusement sur cette pièce de country pantelante !

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             Danny & Dusty enregistrent un deuxième album, Cast Iron Soul, et là, c’est une autre paire de manches. Autrement dit un very-big album. Tu dois attendre «Raise The Roof» pour retrouver les rondeurs de l’énormité. Le Wynner attaque au heavy rentre-dedans. Autant tu sens qu’ils s’amusent sur la première partie de l’album, autant tu te régales de la deuxième partie, les six derniers cuts, car c’est un sans faute. «Thanksgiving Day» sonne comme de la pop wynnique - Thank you for everything we ever had - et ça bascule dans le Dylanex urbain de haut rang avec «New York City Lullaby». On se croirait sur un album du Syndicate, car t’as encore à la suite l’incroyable proximité d’«It’s My Nature», on croit entendre chanter John Lennon, puis le Wynner te gratte «Hold Your Mud» vite fait, Dan et lui duettent comme des bêtes de fournaise et ça se barre dans l’enfer Syndicaliste, le Wynner drive le cut droit dans la gueule de Moloch, ça vire au fast hot hell gratté serré, avec des éclairs de lumière, alors te voilà avec un nouveau coup de génie sur les bras, t’en demandais pas tant, et ça brasse large, dans la fournaise du Mud, ça re-connecte avec «Sister Ray». Ils amènent «Let’s Hide Away» au oouuh ouuh baby, ça sonne comme un heavy hit lourd et lent, c’est immédiat, ouuuh ouuuh baby, tu sens la patte du crack. Et ça continue avec «ID’s Blues», amené au heavy stomp. Wow, l’incroyable violence de l’attaque ! C’est plombé du bulbique et le Wynner injecte sa dose de kill kill kill.

             Dans son book, le Wynner s’attarde un peu mais par trop sur le Paisley Underground, rappelant que Salvation Army et les Bangs jouaient en première partie du Syndicate. Il trouve aussi que Hüsker Dü sonnait comme Salvation Army. Et les Bangs étaient à ses yeux wilder, more intense que les hit-making Bangles - Et leur choix de covers impeccable : Love’s «7 And 7 is», The Changing Time’s «How Is The Air Up There» and The Seeds’ «Pushing Too Hard» - Il dit aussi qu’elles «rocked with the cockiness and swagger of the best Nuggets bands.»

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             Le Wynner trouve quatre qualités à son Syndicate : sexy, funny, scary et le fameux can fall apart at any moment. Et il trouve que tous les groupes qu’ils aime ont ces quatre qualités, particulièrement les Stones avec Exile On Main Street, puis Raw Power et London Calling, puis Fire Of Love du Gun Club. Pareil pour Blonde On Blonde, les deux New York Dolls et le White Light White Heat du Velvet. Il a raison de se ranger dans la même catégorie. C’est de bonne guerre, Wynner. Avec la progression fulgurante du Syndicate, il voit sa vie changer. Il se retrouve lead singer in an increasingly popular band. Alors ils vont further and further - If there was feedback, make it louder and more painful - Les voilà sur Ruby, le label du Gun Club, un sous-label de Slash qui a X, les Blasters et les Germs. Le boss n’est autre que le fameux Chuck D, le mec des Flesh Eaters. Chuck D a aussi produit les Misfits et Lydia Lunch, alors pardonnez du peu. C’est avec lui que les Syndicalistes enregistrent le fameux Days Of Wine & Roses. Pas de contrat ni d’avocats ni de budget. Chuck D : «We can make a record and have it out in the fall.» L’antithèse de Medecine Show. Dans son book, le Wynner commente tous les cuts de Days Of Wine & Roses, et fait pleuvoir les références, ça va de The Fall à Raw Power en passant par Black Flag et les Soft Boys. Pour lui, le morceau titre, c’est «Tombstone Blues». Il parle d’un pompage involontaire - But I’m sure Dylan stole that song as well - he’s the most fleet-fingered musical thief out there - Le Wynner a toujours une manière étrange de se justifier. En studio, avec Chuck D, il y a Pat Burnette, le fils de Johnny. Encore une fois, le Wynner dit que tout s’est fait in a single take. Il qualifie le son du Syndicate de «big, anamorphous mess» avec des «shards of noise and chaos that sat within the overall sound.» C’est admirablement bien décrit. Ils sont tellement contents de leur album que le Wynner s’écrie, en haut d’une page : «The only other time I had that hundred percent feeling of satisfation would come twenty years later, when I made Here Comes The Miracles.» Et il ajoute ça, qui éclaire bien le phénomène Syndicaliste : «Le Dream Syndicate a toujours été, at heart, a jam band and a groove band, un groupe qui teste ses limites, qui n’a pas peur de se jeter dans les ténèbres et qui s’en sort toujours de justesse et qui recommence à la première occasion. C’est ce que nous savons faire de mieux et c’est la raison pour laquelle les gens nous suivent.»

             Le Wynner avoue aussi un goût prononcé pour le speed, mais il nous fait rigoler avec ses cuites, car il en rajoute un peu des caisses. Il est des pages où on se croirait dans les mémoires de Nikki Sixx - Speed was great. It was exciting. It helped me get things done - Il se sentait «ready for anything», eh oui, c’est exactement ce qui passe. Keep the party going. Experiencing a little more of eveything. Il en parle bien. Ce n’est pas une apologie. C’est la vie d’un Syndicaliste.

             À Boston, il flashe sur la chanteuse des Dangerous Birds, Thalia Zedek, qui deviendra une bandmate dix ans plus tard. Car la vie du Wynner, c’est aussi une vie de collaborations.   

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             Côté roots, le Wynner n’est pas en reste, comme on s’en doute. Il a 9 ans quand l’un de ses futurs beaux-pères lui montre la pochette de Sgt Pepper’s Lonely Hearts Club Band, qui vient tout juste de paraître - He instantly won me over - Ça se passe en 1969. En 1964, il fait comme les frères McDo, il découvre les Beatles. Précoce, mais bon, les Californiens sont comme ça, ils ont besoin d’en rajouter une caisse. Il se dit plus fasciné par «Tomorrow Never Knows» que par les tables de multiplication. Son père bossait sur Hawthorne Boulevard, et ses amis Phast Phreddie Patterson et les frères McDo, justement, se souviennent très bien du Wynn Brothers Auto Part de son père. Il a 9 ans quand sa mère lui offre sa première guitare, alors il prend sa première leçon, écrit sa première chanson, démarre son premier groupe et joue son premier concert. Il n’a pas l’air de plaisanter. Puis il flashe sur le Magic Bus des Who, comme par hasard et il achète son premier album, Willy & The Poor Boys de Creedence, comme Kim Salmon qui lui aussi démarre dans la vie avec un Creedence. Il aime bien les Beatles, mais il pense que les Beatles sont le groupe de tout le monde, alors que Creedence est son groupe à lui, «my secret passion». Quand paraît le suivant, Cosmo’s Factory, le Wynner en apprend toutes les paroles et toutes les notes. Le premier groupe qu’il voit sur scène, c’est Delaney & Bonnie & Friends. Il flashe ensuite sur Traffic et Canned Heat. Il économise pour se payer Lola Vs Powerman And The Moneygoround, puis il trouve un five-dollar bill sur le trottoir et court s’acheter Every Picture Tells A Story. Comme Creedence et les Beatles se sont séparés, il se met à chouchouter les Stones et les Who, particulièrement Sticky Fingers et Who’s Next. Toute une époque ! Et pendant ce temps il écrit des chansons. Il avoue même être choqué que les autres gens n’écrivent pas de chansons, surtout les musiciens. Il dit en avoir écrit un millier. Pour lui c’est pas compliqué, une petite mélodie, une truc dans le coin de la tête, quelques mots, et voilà, comme il l’écrit, you have a song. Parmi les albums qui l’ont le plus affecté, il cite encore Quadrophenia et Tonight’s The Night. Comment ne pas être fan des Who et de Neil Young ?

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             Puis il flashe sur Country Life qui, bizarrement, est loin, et même très loin d’être le meilleur Roxy. Il va d’ailleurs devenir pote avec Sal Maida - my good friend and neighbor these days in Jackson Heights and bandmate in, yes, a Roxy Music tribute band - Et puis voilà le punk.

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             Le Wynner voit les Pistols au Winterland de San Francisco, en janvier 1978. Mais il frôle l’anathème en disant préférer les opening acts, The Avengers et les Nuns, dont fait partie Alejandro Escovedo qui, comme Thalia Zedek, les frères McDonald et Sal Maida, va devenir un pote du Wynner. En fait, le Wynner les connaît tous. Il indique aussi que les frères Robinson ont décidé de monter leur groupe, c’est-à-dire The Black Crowes, en voyant le Syndicate sur scène à Atlanta en 1984.

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             Et comme tout le monde, le Wynner flashe sur Nuggets. Impossible de faire autrement - It changed my life, my songwriting, my musical taste, everything - Pour lui c’est la compile parfaite - It was fun, it was wild, it was disposable, it was essential - Quand il bosse chez Rhino, l’un de ses clients n’est autre que Sal Valentino des Beau Brummels. C’est l’avantage de vivre en Californie : on y croise de genre de personnage légendaire. T’auras pas ça dans ton bled pourri.

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             Puis il va flasher sur les groupes du New Jersey, les dB’s et les Feelies. Puis sur les groupes Postcard, Orange Juice et Aztec Camera, mais son groupe préféré à l’époque reste The Fall - Their music was so ramshackle and broken, so amateurish - Il trouve que tous ces groupes doivent tout au Velvet. Lui aussi doit tout au Velvet - The moment I heard «Sunday Morning», my life was changed - Il ne tarit plus d’éloges sur le premier Velvet, «that album’s seemingly simple formula of mixing classic, hooky songwriting, intelligent lyrics and a fearlessness to sabotage both of those elements with noise and dissonance made sense.» Et il ajoute ceci qui sonne comme une parole d’évangile : «En 1981, les Velvet étaient à la fois dans le radar du mainstream et de l’underground, comme Big Star, les Stooges, les Modern Lovers, et des groupes plus récents comme les Only Ones, les Soft Boys et le Gun Club, tous ces groupes que j’adorais et qui m’ont influencé.» Parmi les groupes californiens influencés par le Velvet et Nuggets, il cite The Last et surtout The Unclaimed qui pour lui sonnent comme Music Machine et les Byrds, «in both look and sound».

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             Sa plus grosse influence est peut-être Big Star. Plus que Badfinger et les Raspberries, qu’il trouve bons, mais pas life-changing. Ce qu’il aime, le Wynner, c’est le life-changing. Alors il tombe sur Third et il est life-changed. Il est tellement fasciné par Alex Chilton qu’il décide d’aller le rencontrer à Memphis. Il voyage en bus et nous raconte son périple, pendant l’été 1981. Avec l’évocation des sessions d’enregistrement de Medecine Show, ce voyage en bus et sa rencontre avec Alex Chilton sont le cœur battant de cette autobio - I needed to meet this guy - Tout ce qu’il a comme info pour le trouver, c’est une adresse sur une pochette de disque. Il vient de se payer un 10’’ d’un groupe nommé Panther Burns. Le critique dit que c’est le nouveau groupe d’Alex. L’adresse se trouve au dos de la pochette - That was all I needed. I bought the summer-long bus ticket, and this rock’n’roll gumshoe was on his way - Il arrive au 706 Cox Street et frappe à la porte. C’est le «pompadoured and mustachied dandy» Tav Falco qui lui ouvre la porte. Le Wynner se présente et dit qu’il vient de L.os Angeles en bus pour rencontrer Alex, et le soir-même, Tav l’emmène dans la bar où traîne Alex, un Alex qui n’est pas très médusé de voir débarquer ce blanc-bec. Le Wynner n’est pas bien riche, mais il paye les bières et les clopes. Alex et lui papotent pendant des heures. Alex est un fan de philo, «Wilhelm Reich in particular.» Bien sûr, il n’est pas question de parler de Big Star - Box Tops & Big Star were topics non grata - Puis le Wynner assiste à un concert des Panther Burns dans un bar devant 5 personnes. Alex bat le beurre - It was a mess, a beautiful mess, but a mess nonetheless - Le Wynner rencontre aussi ce soir-là Ross Johnson.

             Deux ans plus tard, le Wynner est en tournée avec le Syndicate, peu après la parution de Days Of Wine & Roses. Ils arrivent à la Nouvelle Orleans pour jouer au Tupelo’s. Ils s’installent sur scène pour le sound-check et le tour manger vient chuchoter à l’oreille du Wynner : «Suis pas très sûr, mais le mec qui balaye là-bas pourrait bien être Alex Chilton.» - Sure enough, it was Alex - Le Wynner va le trouver, lui dit qu’ils se sont rencontrés deux ans auparavant à Memphis, mais Alex ne se souvient pas. Il ne montre pas non plus une envie folle de poursuivre la conversation.

             Dans les années à venir, le Wynner indique qu’il va prendre soin d’éviter Alex - I learned to avoid meeting any heroes - Il ne reverra Alex qu’en 2007, en Norvège, dans un festival nommé Down On The Farm. Alex a fait la paix avec son passé et a reformé Big Star avec Jody Stephens et les deux mecs des Posies, Jon Auer et Ken Stringfellow, et le Wynner est là avec Danny & Dusty. 

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             Bon le dernier album du Wynner n’est pas ce qu’on espérait. Make It Right retombe un peu comme un soufflé. Il est pourtant tout de suite dessus avec «Santa Monica», comme peut l’être Lou Reed sur ses propres cuts. Ils savent tous les deux claquer un songwriting, mais ce ne sont pas des hits automatiques. Le Wynner démarre son morceau titre en mode «Pale Blue Eyes» et ça fait illusion. Ça devient même vite tétanique. Il est vraiment sur les accords de «Pale Blue Eyes». Son I/ I/ Can’t make it right est du pur Linger on/ Your pale blue eyes. L’autre merveille de l’album s’appelle «Madly». Le Wynner y gratte de belles espagnolades. Mais on perd le Syndicate. Les espagnolades scintillent cependant au soleil, alors ça nous console. Il joue avec des machines («What Were You Expecting», bonne question) et avec le post-punk («Making Good On My Promises»). Mais on passe à travers tout le reste. Pas mal de cuts pépères naviguent en pères peinards sur la grand-mare de cet album. Le Wynner s’embourgeoiserait-il ? Il renoue un peu avec la niaque du Syndicate dans «Roosevelt Avenue». C’est tellement exacerbé qu’il frise un peu le Velvet, mais pas trop. Ça reste un peu glabre. Bien boutonné.

    Signé : Cazengler, Steve Ouin (ouin)

    Steve Wynn. Make It Right. Fire 2024 

    Danny & Dusty. The Lost Weekend. A&M Records 1985

    Danny & Dusty.  Cast Iron Soul. Blue Rose Records 2007

    Steve Wynn. I Wouldn’t Say It If It Wasn’t True. Jawbone 2024

     

    L’avenir du rock

     - Stanley your burden down

     (Part One)

             Quand on erre, on erre. Errer n’est pas une chose qu’on fait à moitié. L’avenir du rock en connaît un rayon. Le désert, le sable, les dunes, le soleil, les étoiles, les caillasses, tout cela n’a plus aucun secret pour lui. Il pourrait en parler pendant des jours et des nuits. Il a même fini par se dire que s’il erre depuis tant d’années, c’est uniquement pour pouvoir en parler un jour. Sinon, à quoi servirait d’errer ? Qui pourrait parler d’errance ? Certainement pas Lawrence d’Arabie, trop occupé à s’admirer dans le miroir.

             Une silhouette apparaît au loin et arrache l’avenir du rock à ses cogitations. Un barbu coiffé d’un casque colonial descend la dune en traînant la savate et approche lentement. Il a l’air complètement paumé, comme tous ceux qu’on croise dans le désert.

             — Je m’appelle Livingstone ! Stanley qui est dûment mandaté par Leopold II, roi des Belges, me cherche. Vous n’êtes pas Stanley, I presume...

             — Non mais franchement, est-ce que j’ai une tête à m’appeler Stanley ? Vous m’avez bien regardé ?

             — Oh mais ne le prenez pas mal, je suis juste un peu désorienté. Je cherche aussi un fleuve, le fleuve Congo, vous ne l’auriez pas vu ?

             — J’ai déjà croisé un con qui cherchait le même fleuve. Ça doit être le fleuve des cons. Décidément, vous avez tous décidé de me gâcher le plaisir d’errer. Alors, je vais vous dire : je commence à en avoir marre des gens comme vous qui se permettent d’errer dans mon désert et de me poser des questions à la con. Vraiment marre de vos jérémiades et de votre incapacité à infléchir les courbes de la croissance, marre de vos manquements à l’orthodoxie, marre de vous voir tripoter la mécanique quantique, marre de vous voir mélanger les torchons et les serviettes. Demandez-moi plutôt si je connais Bob Stanley, sombre crétin !  

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             Et si l’avenir appartenait aux compilateurs ? C’est l’un des paris que lancent les gens d’Ace, notamment avec Bob Stanley, le mec de Saint Etienne. Pas la ville, bien sûr, le trio Sarah Cracknell/Bob Stanley/Pete Wiggs. Bob Stanley - qui n’a rien à voir avec Livingstone - est aussi écrivain, ce dont on va causer dans le Part Two. Ça fait beaucoup de choses. Dans les circuits professionnels, Bob Stanley est ce qu’on appelle un polyvalent. Il polyvaille que vaille, il polyvalentement mais sûrement, il polybien son chinois et polypose les bases d’un bel empire. On peut donc suivre PolyBob les yeux fermés.

             PolyBob dispose d’une cervelle élastique. Sa culture pop s’étend  à l’infini. Il polybrasse large, il se polymoque des distances et des mesures. À son corps défendant, il devient une espèce de polyphénomène, et les ceusses qui rapatrient ses compiles avouent franchement leur fascination. «PolyBob ? Quel polystirène !», font les gens lorsqu’on leur tend un micro.

             On recense une quinzaine de polycompiles. Ace n’y va pas de main morte. Pour ne pas abuser de la patience du lecteur, on va se contenter d’en explorer cinq pour cette fois, dont deux bien pratiques, car à éviter soigneusement : Paris In The Spring et Fell From The Sun (Downtempo And After Hours 1990-91). Pourquoi ?

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             Parce que. Parce que quoi ? Parce qu’avec Fell From The Sun, PolyBob plonge dans la scène maudite de l’house music, et bien évidemment, il attaque avec l’«Higher Than The Sun» de Primal Scream. Non, non et non, ça ne marche pas ! Puis vont se succéder une ribambelle de petits grooves inconséquents qui prennent littéralement les gens pour des cons. C’est l’house dans toutes son inepte inutilité. On patauge dans l’exercice de style à la mormoille la plus puante. PolyBob se tape une petite crise d’autosatisfaction avec le «Speedwell» de Saint Etienne. À sa place, on aurait évité de la ramener. Tout ce son ne peut pas accrocher. C’est trop à la mode, trop superficiel. Tu attends des compiles qu’elles t’amènent au seuil des mondes inconnus, et celle là t’amène à rien. 

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             Paris In The Spring, c’est un autre cas de figure. PolyBob tape dans l’underground français de 68 et va chercher des trucs de Mireille Darc et de Bernard Lavilliers, qui, dans «Les Aventures Extraordinaires d’Un Billet De Banque», emprunte le riff de basse de Melody Nelson. PolyBob propose d’explorer un continent, il privilégie les cuts inconnus, mais ses choix ne sont pas bons. Ilous & Decuyper font du Crosby Stills & Nash franchouillard à coups d’ooh-ohnow now. PolyBob choisit «La Métaphore» de Dutronc qui n’est pas le meilleur Dutronc, et le «Dommage Que Tu Sois Mort» de Brigitte Fontaine qui ne vaut pas l’excellent «c’est bon d’être con». Pareil pour Nino Ferrer, «Looking For You» n’est pas le meilleur Nino. On plonge en pleine misère de la variette avec William Sheller, et on retrouve Triangle avec un «Litanies» qu’on fuyait à l’époque. Le «Viens» de Françoise Hardy n’est pas bon et l’«Encore Lui» de Jane Birkin est insupportable. Le seul coup de magie est le «Bal Des Laze» de Polna. Prod parfaite. Mélodie parfaite. Ça se termine avec «La Chanson D’Hélène» de Romy Schneider et Michel Piccoli. Ah le cinéma ! 

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             Le seuil des mondes nouveaux, parlons-en ! C’est exactement ce que propose PolyBob avec ses compiles, lorsqu’elles sont bonnes. Et puis il intrigue un peu avec ses pochettes, il opte souvent pour des images de bâtiments, notamment English Weather sous un ciel gris, ou State Of The Union sous un ciel bleu. Dans ses liners d’English Weather, l’écrivain PolyBob explique que la ville de Londres a changé «dramatically» depuis Get Carter et les années 70, mais pas le weather. Il raconte comment il s’est retrouvé coincé par la pluie chez un disquaire de Newcastle, à écouter des groupes des années 70, d’où l’idée de cette compile. PolyBob passe en revue des choses qu’on n’écoute pas souvent, mais qu’on est content d’entendre, comme Matching Mole («O Caroline» compo de David Sinclair avec la magie vocale de Robert Wyatt), Daevid Allen («Wise Man In Your Heart», typical Camembert, gros groove de flying teapot, une autre époque), Caravan, bien sûr, avec «Love Song With Flute» et tu repars à Canterbury, merci PolyBob pour ce voyage dans le passé, les Caravan sont très Soft Machine, très surdoués et t’as le grand solo de flûte. Camel aussi avec «Never Let Go», proggy en diable. The Parlour Band avec «Early Morning Eyes», assez chaleureux, très CS&N dans l’esprit. Chaque cut a son histoire, PolyBob les raconte une par une, c’est un spécialiste. Il ne vit que pour ça, les disks et l’histoire des disks. Il est des nôtres. Ses textes constituent une somme. Il aime beaucoup les groupes anglais qui sonnent comme des Californiens. On l’a vu avec The Parlour Band et ça se confirme avec The Orange Bicycle. Et on se demande bien pourquoi un groupe comme T2 est devenu culte, car leur «JLT» n’est pas jojo. Par contre, Bill Fay a une vraie dégaine avec son «‘Til The Christ Come Back». PolyBob en fait un mythe. Pas de voix mais un mood. Van Der Graaf Generator, c’est tout de suite autre chose. Avec «Refugee», Peter Hammill sort du lot. On se régale encore de «Very Nice Of You To Call» d’Aardvark, une Coventry pop assez envahissante et du piano all over the solo. PolyBob tire le Big White Clud» de Vintage Violence pour saluer John Cale. On sent le big time dès l’intro. Il traîne en chemin de la mélodie. C’est très Paris 1919. Tu sors cette compile pas vraiment émoustillé, mais ravi.

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             Et t’enquilles aussi sec State Of The Union (The American Dream In Crisis 1967-1973). Dans son intro, PolyBob revient longuement sur les désastres environnementaux et la guerre du Vietnam qui ont brisé les reins de l’Amérique, entre 1967 et 1973. Et pour lancer sa petite machine à remonter le temps, il attaque avec l’heavy Elvis de «Clean Up Your Own Back Yard». Ça monte vite en température avec Della Reese et «Brand New Day». Cette fantastique Soul Sister et très directive. Elle te dégage le passage vite fait. Dion fait ensuite son pleurnichard avec «Abraham Martin & John», ce qui n’est pas sa meilleure période. Sinatra fait de la pop d’avant la pop : «The Train» est coloré et tragique à la fois. PolyBob ramène aussi les 4 Seasons («Saturday’s Father») et les Beach Boys (4th Of July»). Pas les meilleurs choix. Dommage, PolyBob, se fourre parfois le doigt dans l’œil. Pour le redécollage, il faut attendre les Four Preps d’Ed Cobb et «Hitchhiker», une belle pop harmonique. Ils sont les rois des chœurs psychédéliques. Encore une voix extraordinaire, celle de Lou Christie. Il tape son «Paint America Love» dans un délire orchestral et une overdose d’harmonies vocales. Ça valse dans les étoiles. Cette pop orchestrale constitue un sommet du genre. On passe sur Eartha Kitt (trop affectée) et Roy Orbison («Southbound Jericho Parkway», mini-opéra à la mormoille). On passe aussi sur Bobby Darin et sa pop d’entre deux mers («Questions») et sur Paul Anka et son sucre d’orgue qui colle trop au papier («This Crazy World»), et on revient enfin aux choses sérieuses avec Eugene McDaniels et «Cherrystones». Il groove pour de vrai avec un killer juste derrière lui. Retour aussi au grand art américain avec les Tokens et «Some People Sleep», tiré du «great lost album» Intercourse : grosses harmonies vocales à la Brian Wilson. Ça se termine avec une cover du «Revolution» des Beatles par the folk harmony quartet The Brother Four. Et là tu dis oui, car c’est bien foutu. Et tu peux aller moissonner les grands albums des Tokens, de Lou Christie et d’Eugene McDaniels.

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             Pas de maison sur la pochette de Three Day Week (When The Lights Went Out 1972-1975). PolyBob opte pour un couple en pleine séance de préliminaires. Il opte aussi pour la misère anglaise de 1973 - What had gone wrong? And what did pop music had to say about it? - Bonne question, PolyBob. Il explose le «British malaise», avec une pop qui cherche sa voie, alors certains vont vers le space age et le modernism, «a world of electric boots and mohair suits.» D’autres reviennent aux fifties, Wizzard, Showaddywaddy, Shakin’ Stevens et les Rubettes, nous dit PolyBob. Il analyse bien son British malaise et conclut son intro ainsi : «Think of ‘Three Day Week’ as an extended musical Play For Today.» C’est quoi cette semaine de trois jours ? Une revendication des mineurs. L’Angleterre s’enfonce alors dans les grèves, avec des coupures de courant et donc un pic notable de natalité. Mais les Tory tombent à cause des grèves et voilà qu’arrive au pouvoir la Thatcher. Alors PolyBob n’a choisi que des singles de cette période de vaches maigres, des singles destinés à l’oubli. L’écrivain PolyBob restitue admirablement l’état d’esprit de cette époque : «Encore un verre ? Qu’avons-nous à perdre ? Le gouvernement est sur les genoux et on n’aura plus de boulot la semaine prochaine. Vite, quelqu’un au piano avant la prochaine coupure de courant !». Seul un écrivain peut rétablir le climat propice. Pour illustrer le thème des disques «que personne n’écoutera», voilà Small Wonder avec «Ordinary Boy». Ce simili glam d’urban teen angst aurait pu devenir un hit. Autant le dire tout de suite, le coup de génie de la comp n’est autre que l’«Urban Guerilla» d’Hawkwind. Là, PolyBob tape dans la couronne royale du rock anglais. Pur Brock genius, avec un bassmatic qui rôde dans le son. Tiens, voilà Ricky Wilde, le fils de Marty, avec «The Hertfordshire Rock». Incroyablement juvénile ! Cut épais et fascinant, vraiment lourd de sens. Et puis des évidences comme les Kinks («When Work Is Over»), Adam Faith («In Your Life»), les Troggs (I’m On Fire», ça marche à tous les coups). Paul Cordell c’est autre chose. Seul le diable sait d’où sort son «Londonderry». Confus mais bien intentionné. Du glam encore avec Stud Leather et «Cut Loose» (et son final en sax free) et Bombadil avec «Breathless». Infernal ! D’où ça sort ? Merveilleux instro. Premier choc pétrolier avec le proto-punk de Lieutenant Pigeon et «And The Fun Goes On» : bad fuzz avec une flûte de Pan. PolyBob nous explique qu’il s’agit en fait de Stavely Makepeace, un duo composé de Rob Woodward et Nigel Fletcher. PolyBob les qualifie de «Coventry’s own Moondog and Wild Man Fisher.» D’ailleurs, il nous colle un Stavely Makepeace un peu plus loin : «Don’t Ride A Paula Pillion», un cut kitsch de mauvais goût, ça sort tout droit de la poubelle de la pop anglaise. Tu croises aussi Mungo Jerry («Open Up», rois du boogie) et Matchbox («Rod», trop produit et trop rock’n’roll). La petite pop sans conséquence ce Robin Goodfellow n’a qu’un seul mérite, celui d’exister, et on constate une fois de plus à quel point l’approche de Cockey Rebel est difficile («What Ruffy Said»). Plus loin tu tombes sur Pheon Bear et «War Against War»,  amené au heavy stomp de street proto. Impressionnant ! Ça sent bon le working class stomp des terraces.

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             Jon Mojo Mills accorde huit pages à PolyBob dans Shindig!, ce qui vaut pour privilège. Cette interview au long cours jette une sacrée lumière sur le personnage et son parcours de kid anglais fasciné très tôt par le rock. Autant dire qu’on se régale. Ses premiers souvenirs remontent à Slade, «the first group where I can remember being excited to hear whatever their next single was». Il cite aussi le «Rock On» de David Essex et le «Walking In The Rain» de Love Unlimited. PolyBob a déjà le bec fin. Dès qu’il a un peu de sous avec son Saturday job, il fait quelques emplettes, par exemple John Barry’s Persuaders theme. À 11 ou 12 ans, il flashe sur l’Unicorn de Tyrannosaurus Rex. Puis arrive l’épisode disquaires et PolyBob cite le sien : Beano’s Records à Croydon. Et comme on le fit tous à l’époque, on se fiait aux chroniques pour acheter les albums qu’on ne pouvait pas écouter. Alors PolyBob lit une kro de Forever Changes dans Record Collector et va l’acheter. C’est aussi simple que ça - and obviously I didn’t regret it -  Quand il entend le «Tell It Like It Is» d’Aaron Neville à la radio, pouf, il court l’acheter chez Beano - Usually, they’d have a copy of wathever it was I asked for. It was an incredible shop - Puis il dit sa passion pour le British psych, via Phil Smee’s first Rubble albums. Et il passe naturellement à l’étape suivante : le fanzine. Il lance Caff en 1986 avec son pote Pete Wiggs, et y chante les louanges des Pastels et de John Barry, un Barry dont personne ne parlait à l’époque. Quelle sera la prochaine étape ? Le groupe ! Et pouf, il monte Saint Etienne en 1991 avec le pote Pete et la belle Sarah Cracknell. Mojo Mills y va de bon cœur : «Saint Etienne’s 1991 debut Fox Base Alpha was one of the most perfect records to sit at the crossroads of the collision between dance culture, pop and what was classed as ‘indie’.» Oui PolyBob est fier de son mix d’influences, King Tubby, Big Boy Pete and Fingers Inc. Et Mojo Mills en arrive aux fameuses compiles Ace. PolyBob dit qu’il propose chaque fois «the cover artwork and the fonts» pour bien fixer le mood. Il dit avoir appris l’esthétique des compiles avec Edsel et Bam Caruso «which had quite dense, detailed sleeve notes.» Merci PolyBob !  

    Signé : Cazengler, Stan laid

    Bob Stanley/Pete Wiggs. English Weather. Ace Records 2017 

    Bob Stanley/Pete Wiggs. Paris In The Spring. Ace Records 2018

    Bob Stanley/Pete Wiggs. Fell From The Sun (Downtempo And After Hours 1990-91). Ace Records 2022

    Bob Stanley/Pete Wiggs. State Of The Union (The American Dream In Crisis 1967-1973). Ace Records 2018

    Bob Stanley/Pete Wiggs. Three Day Week (When The Lights Went Out 1972-1975). Ace Records 2019 

    Jon Mojo Mills : Lunch Hour Pops. Shindig! # 145 - November 2023

     

    Wizards & True Stars

     - Sandy show

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             Sandy Salisbury et Curt Boettcher ? Leur rencontre est un vrai conte de fées. C’est en tous les cas ce que nous raconte l’impeccable Zoe Willard dans les liners de Try For The Sun. Sandy vient d’enregistrer un album avec son groupe, The Chances, au Nouveau Mexique, mais l’album ne sort pas. Shelved, comme on dit. La guigne empire encore lorsqu’il reçoit une convocation pour le draft, c’est-à-dire l’incorporation. On est en 1966, et ça pue le Vietnam. Il se rend donc à Los Angeles où se trouve le centre de recrutement, et dans la bagnole, il entend «Along Comes Mary» de The Association. Il est soufflé ! Le producteur du hit n’est autre que Curt Boettcher, un jeune producteur en vogue. Sandy poireaute à Los Angeles, et un jour sa mère le contacte pour lui dire qu’il est exempté d’armée - as a sole survivor - Alors Sandy exulte, il parle même de «crazy-good luck». Inespéré ! Il a pris un appart pas loin de Sunset Strip et comme il a tapé dans l’œil de sa voisine, celle-ci l’invite à une party. Elle a dit-elle un copain dans le music biz qu’elle aimerait bien lui présenter. Devine qui c’est ? Oui, bravo, c’est Curt ! Fin de la guigne pour Sandy. C’est un joli conte de fées, pas vrai ? Et leur musique s’en ressent. Alors Sandy va jouer ses compos à Curt. Comme Curt vient de monter un  label, Our Productions, il propose à Sandy d’enregistrer. Curt lui propose aussi de compléter the Ballroom, un groupe qu’il vient de monter avec Jim Bell et Michelle O’Malley. Mais le label coule à pic et The Ballroom avec. Glou-glou. Chacun part de son côté. Les enregistrements ne feront surface qu’en 2001, sur une compile Sundazed intitulée à juste titre Magic Time. Mais Curt n’en reste pas là : il remonte The Millenium. Pour vivre, Sandy sculpte des fleurs dans des planches de bois. Curt vient le trouver pour lui proposer de rejoindre The Millenium. Heck yeah !  Mais le nouveau projet va vite capoter. Curt est le prince de la poisse.

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             Alors, puisque Sandy et Curt ont sauvé leurs home and studio demos, Zoe Willard a trouvé judicieux d’en faire une petite compile pour les admirateurs du duo mythique. Enjoy the ride, lance Zoe en guise de chute. La compile Sundazed s’appelle Try For The Sun. Tu fonds dessus comme l’aigle sur la belette. Et t’es bien récompensé avec «The Sun Is Shining Now», une Sunshine Pop à toute épreuve, invincible, pressurisée de chant poignant, gorgée de shine/ Shine/ Shine now. Ils dégoulinent de lumière. Sandy et Curt sont des artistes luminescents. Puis il tapent «Love Is Good» au kazoo, c’est très On The Beach. Tout est très bronzé, très dents blanches, très joyeux chez ces deux mecs-là. Sandy gratte ses gros coups d’acou magiques sur «Soft Words» et on reste dans l’enchantement pour «Our Minds Keep Moving On». Ils rivalisent d’ardeur sunshiny avec Brian Wilson dans «Try For The Sun». Ils font une petit cover californienne du «Baby Please Don’t Go» des Them. Très weirdy, très iconoclaste. Retour au full blown de pur genius avec «Spell On Me», quasi california-gaga, et ils rejoignent les sommets de l’Ararat californien avec «Really & Truly», brillant mix de sucre et de coups d’acou, belle pop inflammatoire, ils allument ça aux harmonies vocales, ah il faut les voir à l’œuvre, c’est franchement digne des grandes heures de Brian Wilson ! Encore une échappée belle avec «She Brought Love To My Life», un shoot de très belle pop évolutive et fraîche comme un gardon de Big Sur.

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             Sundazed le bien nommé ressort cette année une nouvelle rasade de Sandy songs, Mellow As Sunshine. Dans ses liners, Zoe Willard précise que Sandy fait tout sur ces cuts, instrus, vocaux et harmonies. Ces 20 cuts ne sont jamais sortis. Il y avait nous dit Zoe de quoi faire un album. Dans la deuxième partie des Liners, Sandy redit son admiration pour Frankie Valli & The Four Seasons, et pour le Kingston Trio, très populaire à l’époque de ses débuts. Pour l’amateur de Beautiful Songs et de chœurs d’artichauts, cet album est un must impératif. Comment résister à la beauté de «Tomorrow» ? Il dit qu’il ne peut attendre le tomorrow morning sun. Sandy est un ange, puisqu’il chante comme un ange. Il amène son «Tomorrow» aux arpèges de lumière - I love this song but I wish could’ve better recording equipment - Il dit l’avoir enregistré sur son sound-on-sound recorder. Autre Beautiful Song : «Daddy Loves You». Fabuleuse osmose avec le cosmos de la Beatlemania. Même chose avec «The Sun Always Shines On Suzanna» - My favorite song in this collection, written in honor of the magnificent work of Frankie Valli - Il tape ce shoot de romantisme californien à la fraîche, bien décontracté du gland. Fantastique allure ! Il t’intoxique encore avec les harmonies vocales de «Justine», et il se paye une fantastique coulée de voix dans «Silent Lonely Night». Il chante à la voix lactée. Ça coule de source. Il gratte aussi des accords de jazz dans «Six O Clock». Et puis voilà encore un modèle parfait de belle pop californienne : «Better Move Over (With Cinnamon)».

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             C’est bien sûr Zoe Willard qui signe cet article de 8 pages dans l’Ugly Things de l’été dernier. Zoe dit sa fierté d’avoir rencontré son héros Sandy - There are my pal Sandy’s sunny ‘60s escapades. Enjoy! - Alors on enjoye.

             Au commencement de Sandy était non pas le verbe, mais «The Fleetwoods, The Everly Brothers, Gale Garnett and the King himself.» Il grattait son ukelele along with Elvis songs. Sandy a grandi à Hawaï, puis il a débarqué à New York et flashé sur le Freewheeling Bob Dylan - I loved that cover, still do - Puis il va finir ses études à Santa Barbara, en Californie, et là, il flashe sur les Beach Boys et Gary Usher. Il rejoint The Chances, «a teenage Beatles-esque rock group» et joue de la basse. Lors d’un trip au Nouveau Mexique, ils enregistrent un album chez Norman Petty.

             Tiens, on va en profiter pour l’écouter !

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             L’album des Chances s’appelle Baby Listen To Me. Une bombe ! Des Californiens dans les pattes de Norman Petty, ça ne peut donner qu’une bombe. Ça commence à danser dans l’ascenseur avec «Get Out Of My Mind». Fantastique attaque ! C’est encore pire que chez Joe Meek ! Dynamite & power ! Sandy et ses trois copains sont hallucinants de virtuosité. Plus loin, tu tombes sur une triplette de Belleville : «It’s Only Time», suivi de deux moutures de «Goldfinger». Ils attaquent l’Only Time au weird Byrdsien, avec des arpèges alambiqués. Quelle extraordinaire assise, ça vaut tout Revolver et tous les Byrds sur Columbia. Ils tapent ensuite leur Golfdinger au fast Petty sound, et la deuxième version est plus fast, quasi punk, drivée avec sauvagerie. Le batteur Gary Lee Swafford vole le show ! Retour aux affaires avec «Looking For Love», cut de fast pop plutôt extraordinaire. C’est tout de même dingue que ces mecs soient passés à l’as ! Son, compo, voix, tout y est. Pas de chance pour les Chances. Ils restent dans la fast pop avec «That Girl (Isn’t Coming Today)». Ils montrent une fulgurante capacité à cavaler à travers la plaine. Ils sont assez complets, très influencés par les early Beatles. Nouveau coup de génie avec «Your Kind Of Love». Rien ne peut leur résister. C’est la pop sixties au max du mix. Et puis t’as cette Beautiful Song, «Girl As Perfect As You», une merveille mélodique d’une extrême pureté. Et ça se termine en mode fast pop, autant dire en apothéose, avec «Made For You» d’Act III/Travel Agency, le groupe formé par Steve Hael après le split des Chances.

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             C’est le draft qui va tuer les chances des Chances dans l’œuf. Sandy échappe de peu au Vietnam en tant que «sole survivor» : son père et son beau-père sont morts au combat contre les Japs. Ouf ! Il pense qu’il aurait été soit tué, soit transformé, s’il avait été envoyé là-bas. En plus, comme il est petit, on l’aurait dit-il envoyé dans les tunnels. Puis il rencontre Curt Boettcher. Flash ! Curt est alors en pleine ascension, il produit The Association, sur Valiant Records. Sandy est fasciné par les harmonies vocales - It totally blew my mind. The harmonies! The arrangement! - Puis Curt demande à Sandy d’intégrer The Ballroom, avec Michelle O’Malley et Jim Bell. Un seul single en 1967 - «Spinning Spinning Spinning» showcased Curt & Co’s fabulous ability to produce out-of-this world harmonies, melodies and orchestration - On a déjà épluché tout ça dans un hommage à Curt Boettcher. Gary Usher pense exactement la même chose que Sandy. Usher et Curt vont ensuite monter Sagittarius et enregistrer le mirifique Present Tense. Usher dit que Curt a influencé Brian Wilson à l’époque de Pet Sounds. Brian faisait encore de la Surf Music, quand Curt enregistrait l’album de Lee Mallory, That’s The Way It’s Gonna Be - That record stunned Brian - Et Usher ajoute : «Here comes this kid who is lights years ahead of him. I had never seen Brian turn white.» Oui, Curt Boettcher précurseur de Brian Wilson, c’est crédible.

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             S’ensuit le holy grail of sunshine pop : The Millenium. Sandy rappelle que Curt répétait et montait les cuts en studio - He’s do everything in the studio - Begin sort en 1968 et bizarrement ne se vend pas - It’s said that Begin was most expansive project at that point - Pas grave, Curt passe au projet suivant, Sagittarius, avec Gary Usher. Puis Sandy évoque le dark side de Curt : il compose mais Curt planque ses compos. Il les met de côté pour The Millenium, pensant que ça servira de réserve, sauf que The Millenium disparaît, et Sandy est bloqué par le contrat Four Star Music qu’il a signé avec Curt, mais il n’en veut pas à Curt, oh la la, pas du tout. Sandy va ensuite quitter le music biz et la Californie pour s’installer en Oregon, démarrer une famille et une carrière d’écrivain.  

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             On peut conclure avec une autre compile improbable, Everything For You Vol. 1, parue en 2004. Une collection de hits poppy et bienvenus, fabuleusement orchestrés. Sandy n’en finit plus de viser la pop parfaite avec des hits comme «Here Comes That Feeling» et surtout ce «Content Am I» joué en biseau. Il a des chœurs de lumière dans «Bring Me On Back Home Again» et il va chercher la pointe harmonique avec «I’ll Do The Crying» - I’ll do the crying/ If you do the trying - C’est donnant donnant avec Sandy. Il devient quasi-anglais avec «Pretty As A Picture», pour un peu il sonnerait presque comme les Who. Toutes ses pop-songs sont solides et bien intentionnées. Sandy crée son monde en permanence. Il passe en mode fast pop avec «Together In The End» - We could be together / In the end - Elle a the answer. Et puis t’as cette merveille inexorable, «Some Other Place», grattée à gros coups d’acou, avec une trompette in tow. C’est tellement bien produit que ça sent bon le Boettcher.   

    Signé : Cazengler, Salisbureau de tabac

    Sandy Salisbury & Curt Boettcher. Try For The Sun. Sundazed Music 2003

    Sandy Salisbury. Mellow As Sunshine. Sundazed Music 2024

    The Chances. Baby Listen To Me. Nor-Va-Jack Music 2019 

    Sandy Salisbury. Everything For You Vol. 1. Sonic Past Music 2004

    Zoe Willard : Puka’ana O Ka La. Sandy Salisbury sunny sixties escapades. Ugly Things # 62 - Summer 2023

     

     

    It’s a Man Man’s world

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             Curieuse installation : le petit orgue cabossé face à la batterie, le tout en bord de scène. Et pour ajouter le doute à la confusion, partout pendouillent des mains coupées dont on se demandent si elles sont vraies ou fausses. Derrière tout ça trônent un petit ampli et une gratte électrique qui nous relient à la réalité du rock.

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    Les voilà qui arrivent vêtus d’habits de lumière, des espèces des grandes tuniques à paillettes avec des lampions intégrés. Le petit gros qui s’assoit au clavier ressemble comme deux gouttes d’eau à Graham Bond et ce n’est pas un hasard, mon petit Balthazar, s’il dégage exactement la même énergie que le vieux Graham Bond qui t’en souvient-il fut le premier punk de London town. Et tu vois le trio partir en maraude. Et quelle maraude ! Une maraude cannibale ! Ils ne proposent pas un set de rock classique, oh la la pas du tout, ils tapent dans un genre beaucoup plus évolué, aux frontières de l’espace, avec une volonté affichée de beat new-yorkais. Ce sont des tape-dur, mais avec un sens aigu et même suraigu de la sophistication, au point qu’il nous arrive de perdre le fil.

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    On aimerait justement que ce soit plus Graham Bond, mais ils vont ailleurs, nettement ailleurs. Il y a du cabaret, du burlesque dans leur set, tout un pan d’Americana moderne et captivante, des choses qui t’enchantent comme cette histoire de toast et de ghost, et choses qui t’explosent la cervelle, comme le cut final qu’on retrouve sur leur dernier album, l’imparable «Odissey». Après enquête, tu vas découvrir que le Graham Bond américain s’appelle Honus Honus. Et c’est une superstar, il faut le voir fracasser son clavier et jaillir depuis son tabouret, en position assise, à environ un mètre de hauteur. Et toujours, ces montées violentes en température, tu le vois se jeter littéralement sur son clavier et à trois, ils déclenchent l’enfer sur la terre. Te voilà fasciné, mon gars, t’as sous les yeux la réincarnation de Graham Bond, mais à l’américaine.

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             Le hasard qui fait souvent bien les choses nous a permis de croiser Honus Honus et ses deux collègues à l’extérieur après le concert, et quand on lui a demandé s’il était la réincarnation de Graham Bond, il ne savait qui était Graham Bond, mais ça l’a tout de même interloqué. Surtout quand on lui a expliqué que Graham Bond s’est jeté sous une rame de métro à Finsbury Park.

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             Son dernier album s’appelle Carrots On Strings. Il est sur Sub Pop et ce n’est pas un hasard. Tu y retrouves «Odissey», le cut explosif avec lequel il clôt son set. Ça sent bon la fumée. Il tord bien son Odissey au chant et ça se barre vite fait en voyage, big time de Man Man, et tout à coup ça frise l’Hawkwind tellement ça vibre de power spatial, et tu retrouves aussi le gratté de poux interlope qui précède l’apocalypse, ah comme c’est bien amené ! Ça gratte sec et ça explose dans l’œuf du serpent de Man Man au big power drum bass et bam ! US power all over the Man Man’s World, là oui, tu prends ta carte au parti, il y a tous les démons de la terre, là-dedans. C’est du Sister Ray à la puissance 1000. Tu retrouves aussi l’«Iguana» entendu sur scène, amené au thème d’orgue hypno, avec un bassmatic à la Jah Wobble. Pouvoir absolu ! Take me home ! Honus Honus propose un son très sculptural de big time, doublé d’une grosse présence. Il y va l’Honus Honus, c’est un sacré coco. Il a une vraie énergie, c’est un tape-dur. Au chant, il est pourri de feeling. Très bel artiste. Force de la nature. Ça ressort bien en studio. C’est aussi un grand consommateur de mélodies vocales, comme le montre «Mongolian Spot». Retour au rentre-dedans avec «Bloodungeon». Hard beat ! Il assoit bien son énergie, kiss me now/ On the lips, il sait foncer à travers la plaine. Il fait du David Lynch avec «Mulholland Drive». Il est capable de merveilles intangibles. Tu te passionnes pour cet artiste intense et sincère. Il amène «Pack Your Bags» comme un hit glam new-yorkais. Jamais vu ça ! Quelle présence, oh boy ! Il t’explose encore la pop d’«Alibi» et s’en va calmer le jeu juste sous l’horizon avec «Cherry Cowboy».

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             Alors tu prends ton bâton de pèlerin et tu t’en vas sur le chemin. Première étape : Rabbit Habits, paru en 2008. Pochette très dessinée, à la Perec, on voit l’intérieur de trois immeubles répartis sur les volets du digi. Weird scenes inside the buildings, t’as même des scènes de cul. Tu retrouves le son pète-sec de l’Honus dès «Mister Jung Stuffed». C’est son truc, le pète-sec, il fait son Dr John on speed, même il s’évertue à rester inclassable, limite incongru. Mais puissant. Il n’en finit plus de tarabiscoter. Il bascule trop dans le comedy act («The Ballad Of Butter Beans»). On croit parfois entendre la BO d’un Kaurismäki movie. Il renoue avec le big shuffle dans «Easy Eats Or Dirty Doctor Galapagos». Il part à l’aventure, mais pour des prunes. Ses explosions n’intéressent personne. Il fait du rock littéraire avec un «Harpoon Fever (Queequeg Playhouse)» monté sur du surf et bien wild as fuck, c’est inclassable, sauvage et sans commune mesure, comme Moby Dick. Il enchaîne avec le fast as rabbit fuck «FL Aztec». Inclassable ! Wild Dada ! L’Honus cherche sa voie, comme le montre encore «Top Drawer», il passe par le tape-dur, il en plie son clavier, c’est un fou qui se perd dans l’entre-deux mondes. Il se barre ailleurs en permanence, comme le montre encore la valse à trois temps de «Poor Jackie». Il boucle avec «Whale Bones» qu’il chante au rauque à la Moby Dick. 

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             Trois ans plus tard, il pond Life Fantastic. Cot cot ! Ça reste du pète-sec de tape-dur. C’est sa marque. Mais pas d’hit à l’horizon. Au fond, il s’en fout un peu des zhits. Il réfère tarabiscoter. Il s’en sort de justesse avec «Steak Knives» car c’est assez mélodique. Mais la plupart de ses gros tape-dur ne mènent nulle part. Avec «Haute tropique» (sic), il se prend pour Tom Waits. Sans doute est-ce là le cut le plus offensif de l’album. Mais le reste est globalement assez ingrat. À force d’incongruité, il flingue ses cuts un par un. La plupart ne passent pas la rampe. Il tape son morceau titre au last fandango, mais il n’est pas Gary Brooker. Il se prend pour le roi du swing avec «Oh La Brea». Il a raison. Il dispose de cette belle énergie qui ne mène nulle part, sauf aux yeux des gens qui l’ont vu sur scène. Il reste aux confins du cabaret. Son truc, c’est le foutraque. Il est libre.

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             C’est sur Dream Hunting In The Valley Of The In-Between qu’on trouve le vrai grand hit de Man Man, «Sheela» qu’on avait compris de traviole lors du set. Honus ne chantait pas «shivers  after dark», mais «Sheela after dark». Quelle belle offensive ! - Won’t you be my Sheela after dark - Il amène ça avec de sérieuses dynamiques et il rafle la mise avec ce refrain qui décolle comme celui du «Motorway To Roswell» des Pixies. C’est le même power mélodique. Sinon, il continue de faire son père tape-dur («Cloud Nein»). D’habitude, c’est la mère tape-dur, mais cette fois c’est le père. Comme le montre «Lovely Beuys», il adore les vieux artistes conceptuels. Il durcit le beat pour «Future Peg». T’es sur Sub Pop, Honus, alors tu vas durcir le beat ! Il revient encore à la vraie chanson avec «The Prettiest Song In The World». Ça frise l’enchantement. Il l’emmène pour Cythère au but I got so distracted/ So I did it. Puis il groove «Animal Attraction» dans la longueur de la langueur, c’est très beau et plutôt contagieux. Il fait une dernière tentative de hit sensible avec le proustien «Sawn» et marche in the blood of the dying swan. Tout un programme.

    Signé : Cazengler, Mean Mean

    Man Man. Le 106. Rouen (76). 1er novembre 2024

    Man Man. Rabbit Habits. Anti- 2008    

    Man Man. Life Fantastic. Anti- 2011    

    Man Man. Dream Hunting In The Valley Of The In-Between. Sub Pop 2020

    Man Man. Carrots On Strings. Sub Pop 2024

     

     

    Inside the goldmine

     - La fête à Neu-Neurotic

             Si Neuneu n’avait pas existé, il aurait fallu l’inventer. Il fait partie de ces êtres dont on ne supporte pas la présence et dont on ne peut pourtant pas se passer. Difficile à expliquer. Ce mélange d’attirance et de répulsion est assez commun dans le cadre des relations sentimentales, il l’est moins dans le cadre des relations dites classiques. On commence par savourer sa présence, Neuneu sait faire preuve de clairvoyance et formuler des avis pertinents. Cet ancien libraire est un puits de science, et avec l’âge, son érudition semble proliférer. Il n’est pas comme ces septuagénaires trahis en permanence par leur mémoire, la sienne fonctionne encore comme une horloge, il cite à tours de bras, il jongle avec les noms d’auteurs, d’éditeurs, de marchands parisiens, il sort des prix et des dates, il cite des dédicataires d’envois, il in-foliote et il in-quartote, et puis soudain, sans raison apparente, sa bouche se tord, et derrière ses lunettes, ses petits yeux brillent d’un éclat horriblement malsain, puis il commence à insulter tous les gens dont les noms lui viennent à l’esprit, par exemple des membres de sa famille depuis longtemps disparus, puis des gens qu’il ne connaît pas mais dont on vient de lui parler, puis il s’en prend à la société en général, aux bourgeois et aux paysans, et tu sais qu’à un moment ou à un autre, tu vas passer la casserole, sans l’avoir le moins du monde provoqué. Il accompagne ses invectives de grands coups du plat de la main sur la table qui saute sous les coups. Si pour te défendre, tu engages le combat verbal, alors une légère écume apparaît au coin de sa bouche tordue et soudain, schloooufffff, il déroule un tentacul long d’au moins deux mètres, un horrible tentacule noir et humide ! Alien ! Alors c’est la panique ! Le tentacule balaye la table et envoie les assiettes et les bouteilles valdinguer à travers la pièce, schplifff, schplafff, et il continue à débiter son chapelet d’injures d’une voix d’outre-tombe, il anéantit, il écrase, il abomine, il blasphème, alors tu dois prendre la fuite, car ta vie ne tient plus qu’à un fil.

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             Même si les Neurotic Outsiders n’ont pas bonne réputation, on se sent mieux avec eux qu’avec ce triste sire de Neuneu. À part Vive Le Rock et ceux qui ont chopé l’album à sa parution, qui se souvient des Neurotic Outsiders, ce super-groupe monté par Steve Jones, Duff McKagan et John Taylor de Duran Duran ? Pas grand monde. Voilà donc l’occasion rêvée d’aller faire un tour inside the goldmine.

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             Guy Shankland leur consacre tout de même 6 pages, c’est pas rien. Il chapôte en parlant d’un groupe qui burned hard and bright. Shankland commence par raconter qu’en 1996, il a écouté sa «last ever cassette tape» sur sa «crappy car stereo» : la K7 des Neurotic. Elle orne d’ailleurs la première page de l’article. Comme beaucoup de gens, Shankland n’est pas très friand des super-groupes, mais cette cassette dépasse toutes ses attentes : «loud, melodic, rude, catchy, heartfelt, juvenile, reflective and in places un-fucking-touchable.» Ces mecs commencent par jouer un «charity fundraiser» au Viper Room sous le nom de Neurotic Boys Outsiders, avec un tas de covers, «New Rose», «Raw Power», «Pretty Vacant», «Wanna Be Your Dog», «Something Else», et comme ça plait beaucoup aux gens d’Hollywood, ils deviennent les Neurotic Outsiders. Ils signent aussitôt sur Maverick Records et empochent une avance d’un million de dollars. Le groupe va durer 18 mois. Comme son pancréas vient d’exploser, McKagan est devenu sobre. Zéro dope, zéro drink. Il fait maintenant du mountain bike avec Steve Jones dans les collines d’Hollywood. Steve Jones compose quasiment tous les cuts de leur album, et il partage le chant avec McKagan. Dans l’interview, Steve Jones avoue qu’à la grande époque, il écoutait Boston et Journey sur son walkman et il n’osait pas le dire. Il dit continuer à écouter cette daube, mais aussi «a lot of Tamla Motown and early ‘60/’70s reggae and classic rock. The least thing I listen now is punk.» Les Neurotic ont disparu à cause de la reformation de Pistols, puis des Guns ‘N’ Roses, puis de Velvet Revolver. Dans la dernière page de l’article, Shankland interviewe Matt Sorum, le batteur des Guns, et là tout s’écroule.

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             L’album sans titre des Neurotic Outsiders date de 1996. À l’époque on se disait bif baf bof, à quoi bon un nouveau Steve Jones show ? Mais la curiosité a pris le dessus sur le bif baf bof, et si la curiosité avait une main au bout d’un bras, on aimerait bien la serrer pour dire merci. Car quel album ! Sans la curiosité, on serait passé à côté, et ce serait une grave erreur de plus.

             Ça part en trombe de nasty ho dès «Nasty Ho». Deux accords, c’est immédiat. Awite now ! Jonesy se pointe vite fait et ressort sa cocote d’heavy Pistolero. Ça prend vite des allures d’heavy feel so good. C’est bardé de son, mais à un point que tu n’imagines pas. Ces mecs-là ne connaissent qu’une religion : le power chord. Alors ils y vont au ah ah sock it to me one time et en plus tu as une fin demented. Et ça continue avec un coup de génie nommé «Always Wrong». Jonesy va au-delà de toutes les cocotes, il pulse de l’hyper-génie sonique à l’oh-oh-oh, c’est tellement bardé de son qu’on ne sait plus quoi raconter. Ils plombent le rock à coups de marteau de Thor et Jonesy envoie un solo vipérin atroce, un vrai viol de la conscience. Après un petit passage à vide, les Neurotic reviennent aux affaires avec «Feelings Are Good». Ces mecs sont des diables, ils prennent feu dans les brasiers, tout s’écroule, c’est fabuleux et terrifiant à la fois. Comme d’habitude, Jonesy perce le blindage des coffres. «Jerk» sonne comme un heavy rock infecté. Jonesy se déguise en Max la Menace. Il noie le jerk au meilleur son de l’univers. Ils tapent plus loin le «Janie Jones» des early Clash et cette belle aventure se termine avec «Six Feet Under», le six pieds sous terre qui nous pend tous au nez, sauf les ceusses qui optent pour le four crématoire. Les Neurotic sont très énervés avec cet heavy sludge. Ils sont encore pires que les Stooges. Ils reviennent à l’origine des temps, c’est-à-dire les Stooges : bam-bam sur deux accords. Ils touchent au cœur de la vérité universelle.

    Signé : Cazengler, pathétic outsider

    Neurotic Outsiders. Neurotic Outsiders. WEA 1996

    Guy Shankland : Guns ‘n’ Pistols. Vive le Rock # 93 – 2022

     

     

    *

            Un grand merci à Rockabilly Generation News, dont le numéro paru fin décembre m’a permis de réaliser que j’avais stupidement fait l’impasse sur le livre de Daniel Dellisse.  Rockers, voici un complément indispensable à L’Âge d’Or du Rock’n’roll de Barsamian et Jouffa paru en 1980. Il nous aura juste fallu attendre près d’un demi-siècle pour trouver une telle merveille écrite en français !

    HISTOIRE(S) DU ROCK’N’ROLL

    LA REVOLUTION MUSICALE DES ANNEES 1950

    DANIEL DELISSE

    (Editions du Félin / Septembre 2024)

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             Avis aux lecteurs, ce n’est pas une Histoire des Pionniers du Rock, relisez le sous-titre : La révolution musicale des années cinquante. Oui je sais, sans les pionniers le rock’n’roll gna-gna-gna… mais l’histoire des pionniers c’est un regard, une vue de l’esprit, typiquement française d’ailleurs, une mythification, une extrapolation d’un phénomène social américain. Une réécriture.

             Point de prévention, laissons-nous guider par Daniel Dellisse. Il raconte bien. Vous mène un peu par le bout du nez. S’amuse même. Les fans du King glaneront bien de temps en temps le nom du Pelvis, mais leur faudra attendre la page 132 (sur 200) pour que l’on s’intéresse vraiment à son matricule, ce dernier mot tombe à pic puisqu’il est déjà à l’armée en Allemagne. Oui c’est la fin, nous sommes en juin 1958 et en février1959, ce sera terminé (pas tout-à-fait), l’histoire est finie : tout le monde Holly.

             Petit aparté : lorsque Jerry Lou a passé le clavier à gauche, certains se sont dépêchés de faire remarquer qu’il nous restait encore un pionnier Charlie Gracie, oui mais une quarantaine de jours plus tard Charlie s’est dépêché de rejoindre Jerry… Daniel Dellisse cite souvent les mémoires de Gracie, un peu pour remettre les pendules à l’heure, Charlie n’a pas été dupe de la fabuleuse aventure du rock’n’roll. Ni de ses grandeurs, ni de ses servitudes.

             Certes nous commençons à Memphis, Sam Phillips recherche un local… de Sam nous passons à Dewey (Phillips, aucun lien de parenté), sont faits pour s’entendre, l’un veut enregistrer des disques et l’autre des galettes du  Roi dans son émission sur la radio locale. Comme toujours les choses sont plus complexes. Sont comme nous tous, se promènent avec leurs petites idées derrière la tête et leurs grands désirs devant. Vous connaissez leurs motivations. N’y en aurait-il pas d’autres, invisibles mais très efficientes, qui les pousseraient dans le dos. En ont-ils totalement conscience. L’establishment socio-culturel subit de profondes secousses culturelles, de plus en plus d’adolescents sont friands de musique noire. Oui, mais écouter de la musique de nègres c’est mal vu… L’attrait de l’interdit, ne serait-ce que moral, ne ferait-il pas bouger des montagnes… Dewey le blanc n’est pas seul dans son cas, sont plusieurs disc-jockeys au travers de l’Amérique, comme lui, qui s’obstinent à passer des disques de nègres dans son émission, une intolérable compromission, la destruction de l’human belt, cette ceinture de sécurité (et aussi de chasteté) de séparation des ‘’races’’. Comme  Sam enregistre des noirs, l’on se dit que l’allumette n’est plus vraiment loin de la mèche. Les choses n’arrivent jamais exactement comme elles devraient. Elles empruntent des voies détournées voire tortueuses… Ce n’est pas parce qu’un artiste noir aurait un succès fou auprès du public blanc que le problème serait réglé. Cela serait au mieux de la cohabitation, voire de l’apartheid.  Non, ce qu’il faut, c’est une espèce de pollution intérieure, un virus pathogène. Un cheval de Troie. Ce moment où l’on ne sait plus si le monde est noir ou blanc. Ce sera Elvis, un petit blanc qui chante comme un noir doué. Une fois que le pied s’est glissé dans l’entrebâillement de la porte il est facile de forcer le passage.

             Y a plein de petits Elvis qui aimeraient s’engouffrer dans l’ouverture. Ne sont pas seuls. Vous avez toujours des resquilleurs. Qui profitent de l’occasion. Oui mais ceux-là ils ont de l’argent, ce sont les mêmes qui jusques alors cloisonnaient le système, désormais ils détestent les chasses-gardées puisque l’on peut gagner davantage en classifiant les territoires des voisins en zones franches, sont pour la libre-entreprise, réflexe économique typiquement américain, pour eux l’argent n’a pas de couleur…

             Revenons en arrière. Avant le coq n’ait chanté trois fois pour saluer le lever du Sun. Faut bien qu’un artiste entre le premier sur scène. Daniel Dellisse choisit Bill Haley. Le premier rocker historique. Sympa le gros Bill. L’invente le rock’n’roll sans le savoir. De fait, il ne crée rien, lui et son orchestre de jump se contentent de reprendre les postures et l’impact frénétique du Rhythm and Blues des noirs. Une espèce de vol à l’étalage. Une tentation pas vraiment calculée. L’occasion qui fait le larron. Parfois l’on félicite les voleurs pour leur adresse. C’est ce que l’on appelle la valeur ajoutée. Proudhon avait raison : ce que je vole devient ma propriété.

             Attention c’est subtil. Vous ne savez jamais où vous mettez les pieds. Un véritable jeu de go. Le pion noir devient blanc et le  blanc tourne au noir. L’important est de comprendre qui retourne les pions. Les analyses de Délisse sont des délices. Il ne s’arrête jamais bien longtemps sur une pièce. Vous refile les informations nécessaires, ne s’attarde guère. Ouste, il passe à une autre ! Petit à petit vous identifiez les joueurs, d’abord les chanteurs, tout repose sur eux, de véritables têtes de bétail, bien sûr l’on prend garde de ne pas tuer les rares poules aux œufs d’or mais les cimetières sont pleins de gens irremplaçables. Pas de panique, ça se bouscule aux portillons. Z’ensuite les maisons de disques. Puis les radios. Puis la télévision. L’éclosion du rock’n’roll marche main dans la main avec les progrès de la technologie. Vous pouvez prendre le train en marche, mais ne restez pas le cul calé dans votre compartiment. Sachez trouver le bon studio, les meilleurs musicos, les instruments les plus performants, les ingénieurs du son particulièrement ingénieux. N’oubliez pas d’imiter ce que font les autres. Deux principes de base contradictoire : être seul et le premier. Plus vous êtes gros plus vous êtes puissants. Être propriétaire de sa petite télé locale c’est bien. En posséder quarante autres, vous refilez la même émission quarante fois.

             Au début, c’est la pagaille, à la fin c’est la payola. Chacun tient sa petite crèmerie, elle survit grâce à ses clients, et à ses fournisseurs qui bientôt deviennent gourmands. Echange de bons procédés, je te donne ceci si tu me donnes cela. A la bonne franquette. La ristourne qui vous tourne la tête. L’on s’arrange entre amis, l’on évite les embrouilles. Bien sûr il y a des coups fourrés et des assommoirs tordus, l’un dans l’autre l’on s’y retrouve. L’on est entre gens de bonne volonté… Tous comptes faits, petits profits et grosses arnaques, n’est-ce pas le rock’n’roll qui sort gagnant de ce joyeux et foutraque micmac ?

             N’y a pas que l’argent dans la vie. L’on ne saurait se satisfaire d’être ravalé au rang  subalterne d’un simple homo économicus, il existe une dimension supérieure, celle de la morale. Si vous entrevoyez mal à quoi correspond ce mot, je me permets de rajouter trois de ses synonymes : l’idéologie, la politique, le pouvoir.  Il ne faudrait pas que le rock’n’roll sape l’ordre social, que les blancs et les noirs pactisent un peu trop, tout système coercitif sépare pour mieux régner. Le rock’n’roll n’est pas né d’un coup de baguette magique, ne serait-il pas un rejet de la lutte contre la ségrégation, le surgeon maléfique des manifestations des Droits Civiques, peut-être même un piège diabolique pour corrompre les âmes pures dans les exutoires des rapports charnels, avant, après et pourquoi pas pendant, le mariage… encore un peu, bientôt nous verrons l’apparition des couples mixtes… De tous les fléaux qu’a inventés l’Homme, la Religion - elle ne relie pas les individus entre eux, elle les ligote – est le pire des anabolisants mentaux. Elle infuse les cerveaux. Lisez les paragraphes consacrés à Little Richard et à Jerry Lou. Dieu est pire que le diable, il corrompt tout autant les esprits.

             Bref à la fin du bouquin, vous comprenez pourquoi en 1959, aux States le rock’n’roll est remisé sur une voie de garage. J’ai tenté de mettre à plat le mécanisme que démonte le livre, n’ayez pas peur, Dellisse vous l’explique in situ, c’est un défilé incessant d’authentiques artistes, de faiseurs préfabriqués, de marionnettes et de marionnettistes. Ce n’est pas la grande escroquerie du rock’n’roll que vous conte notre auteur, c’est sa radicale aseptisation, sa parfaite trépanation, son affadissement, sa bâtardisation… N’empêche Nicolas que la bête n’est pas morte et qu’elle ne tardera pas à renaître…

             Ne pouvait pas parler de tout le monde, n’empêche que pour l’absence de Bo Diddley et de Vince Taylor, le peu de lignes dévolues à Eddie CochranDellisse mérite 12 783 fois la mort, non les gars 12784 ce serait un peu exagéré, z’oui mais je me répète ce n’est pas un book sur les pionniers mais sur la naissance du rock’n’roll… Sachez saisir la nuance. Quelques pages sont consacrées aux différents revivals, un peu rapides, pour les français juste Jesse Garon, d’ailleurs notre rock national c’est un peu le parent pauvre, cite Claude Moine, vous avez reconnu sous ce père défroqué, Eddy Mitchell, et les Spunyboys. C’est peu mais le mois dernier nous avons chronique par deux fois Schmoll et les Spuny.

             Je ne voudrais pas terminer sur cette fausse note, il y a un truc qui est très bien expliqué dans le book c’est la coupure épistémologique entre le rockabilly et le rock’n’roll, Daniel Dellisse se sert de l’enregistrement de Be Bop A Lula pour vous faire ressentir le big deal, vous connaissez mon indicible attirance pour Gene Vincent

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             Un dernier hommage, à Alan Freed, sans lui parlerait-on encore de rock’n’roll aujourd’hui, un activiste décisif, il a payé cher son initiative à la cause, mais le rock’n’roll est son triomphe.

    Damie Chad.

     

    *

             L’idée de rituel implique la notion d’acte recommencé, nous voici donc obligé de recommencer, ce qui tombe très bien puisque la semaine dernière nous n’avons parcouru qu’une maigre partie du sommaire de :

    RITUEL

    (Powered by Rock Hard)

             Est-ce un numéro spécial de Rock Hard, le trente et unième, ou le lancement d’un nouveau magazine ‘’dark side’’ consacré au ’’métal extrême’’, l’avenir en décidera, le nombre de lecteurs aussi… Continuons notre lecture :

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             Me retrouve en terre connue dès la première interview, à plusieurs reprises, attiré par la couverture, j’ai failli chroniquer le dernier album De Republica de Griffon, ce qui aurait créé un pendant intéressant avec The Republic de Thumos. Il fut un temps où l’on disait qu’en France on n’avait pas du pétrole mais qu’on avait des idées. Sont des français, ils ont des idées, ils parlent de politique et de religion. Nous saluons leur courage. Rituel a mis en grosses lettres une citation de Aharon (chanteur) : ‘’ pas de socialisme sans christianisme et inversement’’. La discussion est ouverte, lisez l’article avant de monter dans les tours.

    Suit l’interview d’Ulcerate, groupe néo-zélandais, encore une phrase du batteur Jamie Saint Merat en grosses lettres :   ‘’L’art peut et doit parler de valeurs supérieures’’, d’après moi il aurait mieux fait de remplacer l’expression valeurs supérieures par choses profondes, d’autant plus qu’il évoque davantage la descente terminale qu’une quelconque élévation  éthérée. Emmanuel Hennequin l’interviewer ne pose pas les questions bateaux, il participe activement au dialogue. Dommage qu’ils n’aient pas bénéficié de deux pages supplémentaires.

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    Attention, une revue se penche sur une autre qui va mourir. Pas n’importe laquelle, rien qu’à son nom vous pensez au premier livre de La Divine Comédie de Dante, L’Antre des Damnés, une revue de l’ombre, plus noire que le noir le plus absolu, si vous croyez que j’exagère, regardez les couvertures des trente-six Chapitres déjà parus, elles sont reproduites au gré (enfin au granite noir des pierres tombales) des douze pages qui donnent la parole à son créateur Malphas, que voulez-vous il existe des individus qui sont en phase avec le Mal, un solitaire qui raconte vingt ans de turpitudes éditrices, un travailleur de l’horrible, l’a commencé à partir de rien, juste l’innocente envie de lancer une revue underground, s’est battu avec les tentacules sans cesse renaissants de l’Hydre de Lerne, les logiciels, les interviews, le papier, les encrages, les imprimeurs, la poste, le courrier, les imprévus… une vie d’astreintes infinies, pour la musique qu’il aime, un héros, un malfaiteur, un maraudeur des terres cauchemardesques, essayez de faucher une pièce de dix euros dans la tire-lire de votre petite sœur, pour cette modique somme vous aurez droit au Chapitre 37, fissa, les cinq cents numéros sont en rupture de stock… Cette riche et passionnante chronique des jours noirs,  une véritable et longue confession à l’article de la mort peut être considéré comme l’épitaphe suprême gravée sur la porte refermée à jamais de L’Antre des Damnés. Resquiescat in tormentis !

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    Emmanuel Hennequin présente Hollow le premier opus de Hauntologist, groupe de métal polonais, sur la photo des deux protagonistes l’un ressemble à un prêtre défroqué qui a refusé d’ôter sa soutane et l’autre  paraît totalement perdu en notre monde, normal ce sont des explorateurs des contrées du rêve, à leur mine vous voyez qu’ils ont vu ce dont vous n’avez même pas idée, exemple si vous arpentez la mort, dans un sens vous remontez à son origine dans l’autre vous descendez  vers sa fin. Etrange labyrinthe dont on finit toujours par sortir. C’est vraisemblablement la seule explication à leurs regards hallucinés.

    Vous ne savez plus trop où vous en tes, chez Rituel ils sont gentils, ils vous ont aménagé une station, pas du tout christique, une gaudriole satanique, je vous laisse découvrir Moisson Livide, du local, son Emperi Gasconça fleure bon le sud-ouest, la vigne et le rugby, attention un fin marteau à la ceinture de Darkagnan !

    Taz Damnazoglou vous présente les cinq albums qui ont influencé sa carrière. / Sergio Lunatico de Cosmic Jaguar nous parle de la difficulté pour un groupe de metal de travailler en paix. Normal il est ukrainien... Parfois le monde vous agresse.

    Suit un genre d’articles ‘’spécial aficionados mordus de la moelle’’ ou réservés pour les ignorants méticuleux qui veulent tout savoir. Le principe est simple, vous prenez un genre, ici le Grindcore et vous épluchez une série de galettes qui ont marqué le style dans l’ordre chronologique de leur apparition. Le mieux est de le lire à haute voix avec deux ou trois copains et de passer votre temps à vous chamailler sur la justesse de la chro puis à essayer d’imposer votre avis de connaisseur  à vos amis vite transformés en ennemis irréductibles. Au jeu de la mauvaise foi et de vos partis-pris intimes je vous fais confiance. Oreilles sensibles et tympans fragiles abstenez-vous, le grind est une musique ultra-violente et ultra-rapide. La liste débute en 1988 avec From Enslavement to Obliteration de Napalm Death et se termine en 2021 avec Trip to the Void de Blockheads. Tout un programme.

    A suivre…

    Damie Chad.