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syl johnson

  • CHRONIQUES DE POURPRE 543 : KR'TNT : 543 :SYL JOHNSON / KIM SALMON / THE HAWKS / CIGARETTE ROLLING MACHINE / BLIND SUN / MATHIAS RICHARD / ROCKAMBOLESQUES

    KR'TNT !

    KEEP ROCKIN' TILL NEXT TIME

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    LIVRAISON 543

    A ROCKLIT PRODUCTION

    SINCE 2009

    FB : KR'TNT KR'TNT

    24 / 02 / 2022

     

    SYL JOHNSON / KIM SALMON / THE HAWKS

    CIGARETTE ROLLING MACHINE /BLIND SUN

      MATHIAS RICHARD / ROCKAMBOLESQUES

    ATTENTION !

    LIVRAISON 542 PARUE LE 15 / 02 / 2022

    LIVRAISON 543 PARAÎT CE 19 / 02 / 2022

    LIVRAISON 544 PARAÎTRA LE  05 / 03 / 2022 

    Syl n’en reste qu’un

     

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             Syl Johnson, l’un des géants de la scène de Chicago, vient de casser sa pipe en bois. Et comme tous les géants de la scène de Chicago, Syl Johnson vient du Mississippi, et plus précisément d’Holly Springs, d’où sont aussi originaires R.L. Burnside et Charlie Feathers. Syl a dix ans quand sa famille s’installe dans la capitale des abattoirs et de la pègre américaine. Il s’appelle encore Thompson et rencontre un certain Sam Maghett qui va devenir le fameux Magic Sam. Puis comme tous les géants de la scène de Chicago, il va faire ses débuts sur Federal, l’un des labels de Syd Nathan. C’est Syd qui dit à Syl : «Tu t’appelleras Johnson !». Il trouve que Johnson sonne mieux que Thompson.

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             Il enregistre son premier album en 1968 sur un petit label de Chicago, Twinight Records. Fantastique album de r’n’b que ce Dresses Too Short ! Syl danse dans la rue en costard vert. Ça jerke dans les brancards dès le morceau titre, un Too Short admirablement roulé dans une farine de bassmatic. On se croirait chez Stax ! Alors le petit peuple va pouvoir danser, avec le popotin de «Different Strokes» et sa fantastique tenue de la tenure, puis avec le dripping de «Soul Drippin’» suivi d’un explosif «Ode To Soul Man» digne de San & Dave. La B n’est pas en reste, oh no no no, car «I’ll Take Those Skinny Legs» rivalise d’énergie avec la Soul de James Brown, c’est une vraie shoote de hot Soul, hot as hell et cool as fuck, comme dirait le ghetto man des Batignolles. Le pire est à venir avec «Sorry Bout Dat», nouveau shoot de hot Soul à la James Brown. Syl Johnson sort ici un funk de Soul sacrément fin, doté d’un aérodynamisme qui te laisse comme deux ronds de flan.

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             Paru deux ans plus tard, Is It Because I’m Black est l’album politique de Syl Johnson. Dans le morceau titre, il se demande si c’est le dark brown of my skin qui pose un problème et il rappelle que Mama she works so hard to earn a penny. Et il lève le poing, comme John Carlos aux Jeux Olympiques pour clamer sa volonté d’exister - I wanna be somebody so bad - et il ajoute qu’il veut aussi un diamond ring as yours, une bague en diamant comme la tienne, et il exhorte le grand peuple noir à poursuivre la lutte - If we keep pushing on, we got to be a little further - il a raison, il faut continuer - We’re trying so hard/ To be somebody - Alors les Brothers et les Sisters se massent derrière Syl qui lance : «We can’t stop now/ We got to keep on/ Keep on !» Il revient à la politique en fin de B avec «I’m Talking Bout Freedom» et lance un appel à la liberté. Il boucle cet album superbe avec un «Right On» digne de James Brown - Ride on Sister ! - Nouvelle crise de colère avec «Concrete Reservation». Il y dénonce les ghettos - It’s just a bad situation - et les chœurs font : «In the ghetto !» Il enchaîne avec «Black Balloons», un solide balladif de très haut rang, il faut voir Syl swinguer ses balloons et ses afternoons. Par l’éclat de sa classe, il évoque d’autres géants de la Soul comme Spoon et Brook. On note aussi en A la présence d’une belle cover du «Come Together» des Beatles.

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             Avec Back For A Taste Of Your Love, Syl Johnson entame en 1973 sa période Hi Records sous la houlette de Willie Mitchell, à Memphis. Fais gaffe, cette série de quatre albums va semer le souk dans ta médina. Syl n’en reste qu’un ce sera celui-là, le Syl d’Hi. Rien qu’avec «Back For A Taste Of Your Love», Syl rafle la mise, car voilà un fabuleux shake d’Hi, du pur jus de Memphis Soul. Leroy, Teenie et Charles Hodges swinguent la meilleure Soul du temps d’avant et Syl chante au fruité de glotte, à l’accent perçant, mais c’est le smooth du groove qui lève des vagues sous l’épiderme. L’autre coup de génie de l’album ouvre le bal de la B et s’appelle «Feelin’ Frisky». Ce vieux coup de raw popotin rampe dans le jus de juke. Comme Al Green, Syl atteint là une sorte d’apothéose. La Soul conduit droit au plaisir des sens et étend son empire kurosawaïen. Encore un coup du sort avec un «I Hate I Walked Away», solidement beau - You got the right to be disgusting/ After what you trusted - Il sort aussi des fabuleux slowahs d’élongation bitumineuse du type «Wind Blow Her Back My Way» et «Anyway The Wind Blows». Pour conclure, on peut ajouter qu’avec «I’m Yours», Syl Johnson n’a rien à envier au gros popotin de Stax.    

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             Pour Diamond In The Rough paru l’année suivante, Syl Johnson s’offre une vraie pochette de Soul Brother, le poitrail à l’air, en plein dans le feu de l’action. Il a des allures de superstar. Quatre puissantes énormités y guettent l’imprudent voyageur, à commencer par «Let Yourself Go», où il t’invite à te laisser aller - Get on up ! - La deuxième arrive aussitôt après : «Don’t Do It». Imparable - Don’t do it/ Don’t break my heart - C’est le groove de Willie Mitchell et des frères Hodges, avec de fantastiques breaks descendants. Pur jus d’Hi. Il faut aller en B pour choper les deux autres, le morceau titre et «Music To My Ears». C’est de la raw Soul d’Hi, grattée au meilleur rave de studio, ce sont deux hits immémoriaux, high on time, sweet sweet music. Avec «Stuck In Chicago», ils vont chercher le boogie rock de Soul et Teenie Hodges gratouille dans l’ombre d’Hi, alors que les Memphis Horns nappent tout ceci de cuivre frais.     

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             On peut dire quasiment la même chose de Total Explosion paru en 1975 : c’est un pur album d’Hi Sound et ce dès «Only Have Love». Ils sont tous là, les frères Hodges, Willie Mitchell et les Memphis Horns. Fameux fumet. Production de rêve. On a là tout ce dont on peut raisonnablement rêver. La fête se poursuit avec «Bustin’ Up Or Bustin’ Out», chef-d’œuvre de groove popotin hodgé jusqu’à l’oss de l’ass. C’est le paradigme du groove d’apanage, l’épandage des vieux adages. Il n’existe rien d’aussi jerky sur cette planète que ce shooooot de grooooove, avec un Syl qui souffle ses coups d’harp. On le voit d’ailleurs souffler au dos de la pochette. C’est en B que se trouve son hit le plus connu, la cover du «Take Me To The River» d’Al Green - I don’t know why - Il laisse ses syllabes s’envoler comme des bouffées de chaleur - Get my feet on the ground/ I don’t know why/ She treats me so baaaaaaahd - Nouvelle énormité avec «Bout To Make Me Leave Home», du basic de base d’Hi, modèle absolu de Soul inspirée. Syl allume bien la terrine de la Soul avec sa voix, c’est l’un des plus beaux mariages de l’histoire des Amériques. Ça frise l’inespérabilité des choses. Pouvait-on concevoir pareil miracle ? Non.    

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             Fin d’Hi pour Syl en 1978 avec Uptown Shakedown. Malgré sa pochette fantastique, l’album est moins dense que les trois précédents, mais God, ça reste du big Syl. Il fait un peu de diskö-Soul avec «Mystery Lady» et revient au groove magique avec «Let’s Dance For Love». On ne peut parler ici que d’excellence. Il passe au sexe avec «You’re The Star Of The Show» - Sexy lady/ I like what you’re doin’ to me - et on tombe en B sur «Who’s Gonna Love You», un slow-groove joué à la trompette dans la nuit urbaine. Groove élégantissime. Il propose ensuite un «Otis Redding Medley», avec du Fa Fa Fa FA et du Respect. Il enfile les hits d’Otis comme des perles, mais tout n’est pas du même niveau. Il commet cependant l’erreur fatale : l’impasse sur «Try A Little Tenderness».

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             Puis on passe à autre chose. Syl va revenir au blues et errer d’un label à l’autre. Brings Out The Blues In Me paraît sur Shama Records en 1980, avec une belle pochette. Syl s’y dresse en Soul Brother, toujours le poitrail à l’air. Le morceau titre qui fait l’ouverture de balda surprend par ses qualités organiques. Ça grouille de vie, comme dans le swamp. C’est pourtant enregistré à Chicago. Le son palpite littéralement, Syl Johnson nous sort là l’un de ces grooves organiques dont il partage le secret avec Tony Joe White. Mais c’est un album de blues et la suite de l’A se perd un peu dans le classical Chicago blues, avec notamment un tribute à Magic Sam intitulé «Get My Eyes On You». On se réveille en B avec «Sock It To Me», fantastique shoot de funk, les guitares dégorgent comme des coquillages dans la bassline, Syl renoue avec sa légendaire fierté rectangulaire, il fait fi des lois et des règlements, sock it to me babe !   

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             Ms Fine Brown Frame paraît deux ans plus tard sur le bien nommé Erect Records. Pas de pochette plus putassière que celle-ci, avec sa louve black en monokini blanc, mais comme c’est Syl, on comprend. Syl aime les femmes, alors il paraît logique d’en voir une envahir la pochette. Mais l’album ne casse pas des briques. Il fait un peu de diskö, comme tout le monde à l’époque, mais il le fait avec une telle classe que son «Keep On Loving Me» passe comme une lettre à la poste. C’est un album classique de Soul/diskö-funk de blues comme il en paraissait des milliers dans les années quatre-vingt. On ne peut pas en dire plus que ce qu’on en dit.       

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             Par contre, Suicide Blues réserve quelques bonnes surprises, comme ce violent boogie intitulé «Before You Accuse Me». Son effarante présence évoque bien sûr celle de Lazy Lester. Il revient au vieux «Take Me To The River» d’Al Green en B. Oh the vox ! Quel fabuleux shooter de r’n’b. Il enchaîne avec un «The Blues In Me» qui sonne un peu comme «I Hear You Knocking». C’est un boogie fin et délicat qu’il monte au chat perché. Aw my Gawd, what a singer ! On ne se lasse pas d’écouter Syl chanter. Il tape dans James Brown pour «Sock It To Me» et revient au blues pour «Got To Make A Change». Il chante son blues avec une classe affolante. Il est l’un des plus far-out du genre. Il finit avec ce diable de heavy blues intitulé «Crazy Man». Sacrément emblématique ! Syl pue la classe à dix kilomètres à la ronde. N’oublions pas qu’il est avant tout guitariste et on le voit faire des siennes dans le morceau titre. Il dit qu’il veut se suicider, avec cette voix de vibrating tension.

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             Avec Back In The Game, Syl Johnson remet sa couronne de groover en jeu et descend retrouver la bande d’Hi à Memphis. On est saisi dès les premières mesures du morceau titre par l’énormité du son. C’est monté au beat insubmersible, groové dans le deepy deep d’Hi. Groove insubmersible. Tous les cuts de l’album sont énormes, à commencer par l’infectueux «I Can’t Stop» joué aux accords de r’n’b, puis le violent boogie de «Keep On Loving Me», silly thang, absolute vodka de force majeure, cathartic shook de shake, ils y vont doucement mais sûrement, et le solo vient télescoper de plein fouet une embrouille de funk. Ils reviennent forcément sur «Take Me To The River» - I don’t know why/ I love her like I do - Cette version excitera encore les gens dans trois mille ans - Won’t you tell me - Syl chante avec un timbre unique au monde - Take me to the river/ Wash me down - Sa fille Syleena Thompson vient prêter main forte à Syl sur «Dripped In The Water» et l’orgue nous noie tout ça dans un bain de jouvence. Back to the heavy blues avec «Driving Wheel» et puis Syl renaît de ses cendres avec «Clean Up Man», un hit de funk extraordinaire, avant de replonger dans l’enfer vert du groove avec «I Will Rise Again». Wow quelle partie de groove ! - You got me feeling.

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             Tiens encore un album fantastique avec Bridge To Legacy paru sur le label d’Austin Antone’s Records en 1998. Sur la pochette, Syl joue de la guitare assis sur une vieille chaise. Ça fonctionne comme sur l’album précédent : on sent la violence du groove dès l’intro de «Who’s Still In Love». Syl soigne sa pêche, son boogie sent le fil blanc, mais il le joue avec le petit quelque chose en plus qui fait toute la différence, comme Lazy Lester. On retrouve sa fille Syleena sur «Half A Love». Encore un hit ! Syleena s’y fait reine du groove sexy. Elle chante d’une voix tremblante de désir. Syl revient dessus et ça donne un duo magique et compressé à la fois. On s’effare aussi de «Midnight Woman», aussi heavy que translucide. Syl est un démon du groove, il joue la carte du boogie blues à l’écrasée. Son groove de blues reste complètement à part. Il y a quelque chose de très fascinant dans le style de cet homme. Il rejoue la carte du groove transversal avec «I Don’t Know Why». C’est noyé de violons et de guitares électriques, et même foudroyant d’électricité. Ce mec a un son véritablement moderne. Il sort un groove subtil et beau comme une tempête magnétique. On se régalera aussi des chœurs qu’on entend dans «Let’s Get It On Again», nouveau slab de heavy blues spectaculaire, oh yeah, ses balladifs accrochent au meilleur niveau d’interférence itérative. C’est bardé de chœurs de rêve et ça se vautre dans une perfection parfaitement indécente. Quelle ambiance ! On voit rarement passer des disques aussi indispensables. Syl reste dans l’excellence du balladif avec «They Can’t See Your Good Side», c’est traité à l’écho fatal, les filles sont toujours là, sur le good ride. Effarant ! Syl crée son monde. Il est l’absolute foreigner. Il termine avec un nouveau coup de génie intitulé «Sexy Wayz», encore un hit de juke, furieux et solide. Syl chante son sexy wayz avec une hargne à peine croyable - I can’t sleep baby/ When I see you dance/ You move so sexy - Syl devient dingue. Quelle pogne ! 

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             Au risque de radoter, voilà encore un album énorme : Hands Of Time. Syl Johnson finira par nous rendre tous gagas. Avec «Tell Me In The Morning», il joue la carte du mec qui trépigne dès le matin. Syl se comporte comme un dieu du stade - Tell me tomorrow - Il joue un double jeu, à la fois groover du delta et Mister Dynamite limoneux. Il bat tous les records de classe rampante. Syl est le maître incontestable des grooves interlopes. Il se montre en permanence effarant de classe, mais pas n’importe classe, on parle ici de classe totémique. Oh il faut aussi écouter ce «Superwoman» amené au funk de Mister Dynamite, avec une vraie attaque en règle. En plus de tout le reste, Syl est un sale casseur de baraque. Il nous fait même le coup du solo ravagé. Encore plus énorme : «You’re Number One». Syl l’explose en plein vol. Voilà encore un hit de juke, du pur jus de pétaudière, une énormité embarquée au groove de reins de je vais et je viens et pour calmer le jeu, il nous fait le coup du froti-frota de luxe avec «Listen To Me Closely». Il allume son slowah à la pure sauvagerie primitive - I really miss you - Ah on le croit sur parole ! N’allez surtout vous amuser à prendre Syl à la légère, ce serait une grave erreur. Puisqu’on est dans les énormités, on peut aussi évoquer «Touch Of Your Love», joué au meilleur funk de basse de l’univers. Syl s’y vautre. On frise encore le stroke en découvrant «Funky Situation». Syl gère ça comme il peut, il s’aperçoit que sa poule est partie, there was no one inside, sur fond de groove funk mécanique.  

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             Tiens le voilà sur Delmark pour Talkin’ Bout Chicago, un album paru en 1999. Et quel album ! On croit que c’est du Chicago blues, mais non, Syl vient du Sud, il amène son vibré de glotte et un style de guitare qui lui est propre. Il s’embarque avec «Cheryl» dans un fantastique slow-boogie blues, une vraie merveille, jouée à la marge, avec des tiguiliguilis de guitare d’une rare subtilité. Il chante toujours avec autant de feeling. La fantastique Theresa Davis vient duetter avec lui sur «Sweet Dynamite». Comme il a toujours su le faire, Syl crée les conditions du hit. Quand il fait du boogie blues de Chicago, comme c’est le cas avec le morceau titre, ça devient absolument extraordinaire. «Different Strokes» sonne comme un coup de génie. Syl démonte la gueule du groove. Il le plie à sa volonté. Il dispose de cette classe qu’ont perdu les bluesmen de Chicago. «I’m Back Into You» reste du groove de très haut niveau. L’autre coup de génie de cet album s’appelle «Trade Secret», un coup de slow boogie blues. Il le prend avec un brio inégalable. C’est un véritable chef d’œuvre de chant lent. Syl a du génie à revendre - I’m gonna pick another fight - C’est le chanteur idéal - Hush Hush Honey I can - et il enfonce son clou - Need a trade secret - Ça sonne comme un vieux hit de juke inconnu. Il sort encore de l’ordinaire avec «All Night Long», un vieux coup de heavy blues. Syl est un diable, un authentique géant de la Soul - Help me/ Squeeze me tight ! - Fabuleux Syl Johnson ! On le voit tout au long de cet album infernal, Syl ne lâche jamais sa vieille rampe. Il est captivant de bout en bout. Dans «Get Free Call Me», les filles font des ravages. Elles gueulent leurs chœurs de get free par-dessus les toits et elles explosent la notion même de bonheur conjugal. Sur cet album, tout est sur-saturé de feeling et d’inspiration. Ça peut donner la nausée.

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             Paru sur Shama Records, We Do It Together est une compile qui vaut le détour. Oui, car c’est du double concentré de Syl Johnson. «Kiss By Kiss» sonne comme le meilleur funk de Soul qu’on ait entendu ici-bas, avec cette admirable dégringolade de basse dans le dos de Syl. Il tape dans le «Get Ready» des Tempts et enchaîne avec un autre hit Tempty, «The Way You Do The Things You Do», fantastique shoot de raw popotin. Syl le swingue dans le gras du bide et ça tourne au raw définitif. Il passe en B à la Soul de dance avec «Annie Got Hot Pants Power», hallucinante giclée de sexy Soul avec des femmes qui jouissent derrière des micros. Retour au sexe plus loin avec «Hot Pants Lady», fantastique partie d’orgasmes féminins sur fond de funky strut - Hey babe I like your teeth ! - et il nous fait le coup du lapin avec «Your Lovin’ Is Good For Me», shoot de Soul de descente extraordinaire - It keeps going strong/ It’s good for me - Oui, il la remercie pour son amour - You pick me up when I’m down !

             Le festin discographique de Syl Johnson ne s’arrête pas là, on y reviendra probablement.

    Singé : Cazengler, cire Johnson

    Syl Johnson. Disparu le 6 février 2022

    Syl Johnson. Dresses Too Short. Twinight Records 1968

    Syl Johnson. Is It Because I’m Black. Twinight Records 1970  

    Syl Johnson. Back For A Taste Of Your Love. Hi Records 1973        

    Syl Johnson. Diamond In The Rough. Hi Records 1974      

    Syl Johnson. Total Explosion. Hi Records 1975             

    Syl Johnson. Uptown Shakedown. Hi Records 1978

    Syl Johnson. Brings Out The Blues In Me. Shama Records 1980

    Syl Johnson. Ms Fine Brown Frame. Erect Records 1982    

    Syl Johnson. Suicide Blues. Isabel Records 1983

    Syl Johnson. Back In The Game. Delmark Records 1994

    Syl Johnson. Bridge To Legacy. Antone’s Records 1998  

    Syl Johnson. Hands Of Time. Hep Me Records 1999 

    Syl Johnson. Talkin’ Bout Chicago. Delmark Records 1999 

    Syl Johnson. We Do It Together. Shama Records 2017

     

     

     L’avenir du rock

    - Kim est Salmon bon (Part Four)

     

    Finalement, l’avenir du rock est ravi d’assister à ce séminaire des avenirs. Il n’était pas très chaud au début, puis il s’est ravisé, supputant que la compagnie de ses collègues lui serait agréable. Oh ils sont tous là, l’avenir de l’humanité (toujours aussi con), l’avenir de l’art (ce gros veinard), l’avenir de l’homme (toujours aussi séduisante) et des avenirs plus techniques avec lesquels l’avenir du rock ne se sent guère d’affinités : l’avenir de l’Euro, l’avenir de la gauche, l’avenir du numérique, l’avenir de l’industrie agro-alimentaire, et tout un tas d’autres futurologues invités à prendre la parole à la tribune. Tiens d’ailleurs, voilà que l’avenir de la pensée libre monte à la tribune et déclare :

             — J’ai l’av’nir qui s’dilate et la foi qu’est pas droite !

             Et la foule reprend en chœur :

             — Ah, bon Dieu qu’c’est embêtant/ D’êt’ toujours patraque ! Ah, bon Dieu qu’c’est embêtant/ D’êt’ toujours patraque !

             Ravis, les convives applaudissent chaleureusement. La règle au séminaire des avenirs est de dire tout ce qu’on a sur la patate. Puis c’est au tour de l’avenir des petites sœurs des pauvres de prendre la parole :

             — J’ai l’av’nir bien trop mou et l’futur qu’est trop dur !

             — Ah, bon Dieu qu’c’est embêtant/ D’êt’ toujours patraque !

             Le public lui fait une ovation et lui jette des pièces de monnaie qu’il ramasse dans un seau prévu à cet effet. Les manifestations sauvages de générosité sont fréquentes dans ce type d’événement.

             Arrive le tour de l’avenir des rillettes du Mans de s’exprimer devant le parterre collégial :

             — J’ai l’av’nir qui s’démanche et mes pots bien trop gros !

             — Ah, bon Dieu qu’c’est embêtant/ D’être toujours patraque ! Bravo ! Bravo !, font les avenirs qui exultent.

             Aussitôt après, l’avenir des échelles de Richter arrive d’un pas athlétique à la tribune et déclare avec un grand sourire :

             — J’ai l’av’nir qui pylore et l’futur qui s’endort !

             — Ah, bon Dieu qu’c’est embêtant/ D’être toujours patraque !

             Une salve d’applaudissements salue l’allocution. Une petite assistante binoclarde s’approche de l’avenir du rock et lui chuchote à l’oreille :

             — C’est votre tour, avenir du rock. Veuillez vous rendre à la tribune.

             L’avenir du rock s’exécute et s’installe derrière le pupitre. Il se verse un verre d’eau minérale et lève les deux bras au ciel :

             — J’ai l’av’nir qui Salmonne et l’futur qu’est tout comme !

     

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             Il a raison d’exulter l’avenir du rock. Kim Salmon n’a jamais autant salmonné. Surtout depuis qu’il a réactivé les Scientists. Tony Thewlis, Boris Sujdovic, Leanne Cowie, ils sont tous là, tu ouvres le gatefold et tu les retrouves grandeur nature, avec un Kim Salmon au premier plan, terrifiant de véracité, l’œil quasi-mauvais sous la broussaille de sa tignasse. Ah quelle allure ils ont tous les quatre ! Voilà ce qu’on appelle un vrai groupe de rock. Le temps n’a aucune prise sur eux et l’album sort sur In The Red, alors elle est pas belle la vie ? On pourrait se contenter de ça, mais il se trouve qu’en plus l’album est bon, et même plus que bon. Ce sera la seule bonne nouvelle de la journée.

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             Avec ces groupes qui ont un passé chargé, c’est toujours un peu la même histoire. On pense que la messe est dite et qu’ils n’ont plus grand chose de neuf à nous apprendre. Mais ce serait faire insulte à l’intelligence de Kim Salmon. C’est justement parce que c’est difficile de redémarrer en côte qu’il relève le défi avec un nouvel album, et c’est là où il fait la différence : il en profite pour se réinventer. «Outsider» ouvre le balda et tout est là : la voix, la fuzz et cette épouvantable niaque, cette façon de nous servir le meilleur pâté de foi. Here it comes ! The Scientistic beat ! Quasiment groové sous le boisseau de la fuzz et Tony Thewlise savamment. Il y a autant de modernité chez ces mecs-là que chez Iggy. La fête se poursuit avec un autre coup de génie : «Make It Go Away», encore plus rampant, ça devient stoogy mais au scientistic way, ça rampe de manière totalement indécente avec du piano dans le bourbier du lard bourbeux. Le troisième coup de génie ouvre le bal de la B : «The Science Of Suave». Tony T l’embarque au riff rageur, puis il joue sa dentelle d’acid freak-out au long cours et quand Kim fait Yeah !, c’est de façon bien racée, bien wild, bien dans l’air du temps qu’on aime. Les autres cuts valent bien sûr le détour. Avec «Naysayer», le cat Kim décide de rôtir en enfer, il semble donner de la profondeur aux flammes, les Scientists font du tribal psycho psyché dans l’eau noire d’excelsior, puis ils passent au funk des catacombes avec «Safe», une façon comme une autre d’empiéter sur les plate-bandes du JSBX. C’mon ! Ils restent dans les catacombes pour «Magic Pants», du gaga qui a le goût d’une purée noire empoisonnée. Avec cet album, le cat Kim n’en finit plus d’échapper aux règles et aux attentes. Il fait du lard moderne, c’est important de le savoir et encore plus important de s’en montrer digne. Encore un chef-d’œuvre de rock moderne avec «I Wasn’t Good At Picking Friends». Tony T y coule un bronze fabuleusement liquide que ponctuent des chœurs épanouis. Ses solos sont des merveilles intentionnelles. Nos vaillants Scientists frisent ensuite le Velvet avec le pesant «Moth Eaten Velvet». Kim Salmon le chante avec des accents de Kevin Ayers. En fait, cet album n’est qu’une série d’idées de cuts qui se mettent à fonctionner. Cette facilité à œuvrer ne court pas les rues. Leanne Cowie bat le jive de jazz de «Dissonance» - Meet my approval - et Kim Salmon le finit à l’oh yeah baby baby Oooh !

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             Dans un article frétillant, Gerry Ranson annonce la parution du brand new album from Aussie post-punk contortionnists The Scientists. Bon, l’article est mal barré, parce que les Scientists n’ont jamais fait de post-punk. Ranson voulait sans doute dire que le groupe est arrivé aussitôt après le punk, mais il faut faire gaffe quand on utilise ce genre d’étiquette, surtout celle-ci, qui comme l’étiquette new wave fait un peu office de repoussoir. Gildas qui ne supportait pas ce son l’appelait ‘la poste’. Dans son élan, Ranson rappelle l’histoire du groupe Aussie originaire de Perth et qui débarque à Londres en 1984, avec dans ses bagages les Stooges, le Gun Club, les Cramps et Captain Beefheart. Après le split en 87, nous dit Ranson, Salmon monte les Surrealists et joue avec Beasts Of Bourbon. Ça s’appelle un parcours sans faute.

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             Comme Kim avait annoncé qu’il n’y aurait plus d’albums des Scientists dans le futur, Negativy arrive comme une bonne surprise. Au moment de la reformation, ils enregistraient des singles, alors Salmon a fini par décider de faire un album, tant qu’à faire - Hence us going back on our word and recording that dreaded latter-day album - Eh oui, ce n’est pas évident de faire du latter-day. Kim Salmon avoue qu’il espère pouvoir continuer à tourner avec le groupe. En attendant la fin de Pandemic, il fait du solo stuff down under. Il évoque comme tout le monde les confinements et avoue faire a lot of paintings. Il fait même des successful exhibitions. Il avoue aussi avoir investi les subventions pandémicales du Government dans un album d’experimental improvisation qui s’appelle OK Commissioner. En fait il a des tas de projets liés à l’isolement, comme ce show multimédia crypté qui s’appelle Haunted Grooves, dédié à tous les gens avec lesquels il a bossé et qui ont cassé leur pipe en bois - Of which there have been way too many - Il voit ce show comme une thérapie et il s’empresse d’ajouter : «Mais c’est bien plus léger que ne pourraient l’imaginer les gens ! J’ai beaucoup d’histoires marrantes à propos de ces gens qui devraient faire beaucoup rire.» Oui car Kim sera dada jusqu’au bout des ongles ou ne sera pas, comme dirait Malraux.

    Signé : Cazengler, Kim Savon

    Scientists. Negativity. In The Red Recordings 2021

    Gerry Ranson : Profiled - The Scientists. Vive Le Rock # 83 - 2021

     

    Inside the goldmine - Hawks see more

     

             La première fois qu’il rencontra Nox, ce fut dans la salle d’accueil d’un centre de formation. Comme Nox, il était arrivé en avance, ce que font tous les banlieusards qui anticipent les imprévus. Nox n’avait pas l’air de rouler sur l’or. Sous son parka, il portait un survêtement, comme s’il sortait d’une cité. Il ne leva pas le nez du livre qu’il lisait. Sans doute était-il lui aussi un peu tendu. Candidats à la reconversion professionnelle, Nox, lui et douze autres personnes allaient passer un an en stage de formation longue durée. Objectif : obtenir une qualification permettant de décrocher un job de webmaster dans une grosse boîte, un marché alors en plein boum. Nox et lui créchaient en banlieue Ouest, il leur arrivait donc de prendre le même RER. Ils finirent par devenir potes. Comme Nox connaissait pas mal de petites gonzesses délurées, ils passèrent ensemble de charmantes soirées. Nox revenait de loin, car il venait de passer quelques années au RMI, d’où le survêtement : pas de blé, pas d’habits. L’année de formation s’acheva avec un examen. Ceux qui sont passés par là savent qu’ensuite commence le plus difficile : la prospection. C’est quitte ou double. Double, on décroche un job. Quitte, retour au chômdu avec un éventail de possibilités qui se réduit de manière drastique. Il n’eut plus de nouvelles de Nox pendant un an ou deux. Chacun vivait sa vie. En région parisienne on perd facilement les gens de vue. Il existe une chance sur un million de croiser une connaissance dans la rue, et curieusement c’est ce qui se produisit, rue Saint-Dominique. Il faillit ne pas reconnaître Nox qui déboulait sapé comme un ministre.

             — C’est quoi ce costard de frimeur ?

             — Ha ha ha, c’est ma tenue de travail. Je bosse dans les ministères, je supervise des tas de trucs ! On m’appelle CyberNox. Tiens regarde...

             Il sortit de la poche intérieure de son veston une sorte de petite télécommande. Il cliqua. Sa tête se mit à vibrer et à changer de couleur, il émit une sorte de sifflement et ses yeux se transformèrent en deux petits écrans dans lesquels défilaient des symboles cryptés, comme on en voit sur les machines à sous. D’une voix métallique, il onomatopait du code : Nox Nox Nox, tilililili, Nox Nox tilili !

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             Pendant que Nox fait sa démo de CyberNox, les Hawks font un bel oxymore : on trouve dans le même groupe un Kuss fraîchement émoulu de TV Eye et un Stephen Duffy fraîchement émoulu de l’early Duran Duran. Formé en 1979, le groupe va durer deux ans avant d’imploser. Mais l’album récemment exhumé a un cachet particulier - Unforgettable guitar playing, inventive rhythm section, Duffy’s enigmatic words and a killer chorus - Mark Chadderton définit bien le style des Hawks. Et Duffy ajoute : «To me, that was the whole thing, the music, the look.» Oui, car les Five Believers ont du look à revendre. Au début, ils s’appellent Obviously Five Believers, mais on leur dit que le nom est trop long. Puis ils veulent s’appeler The Subterraneans, mais Nick Kent leur barbote le nom. Comme ils ont une chanson qui s’appelle «Hawks Don’t Share», ils décident de s’appeler Hawks Don’t Share et ça devient the Subterranean Hawks Obviously Don’t Share Believers. On connaît le résultat final. Duffy dit que The Hawks était le pire nom de groupe - Unless you’re backing Dylan in 1966 ! - Ils enregistrent des cuts qui ne sortent pas. Jusqu’à la fin de sa vie, Kuss va insister pour que ça sorte.

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             Il a eu raison d’insister. L’album paraît enfin sous le nom d’Obviously 5 Believers. On sent dans l’«All The Sad Young Men» d’ouverture de balda une volonté de bien sonner et un petit blondinet du nom de Simon Colley signe le bassmatic. C’est d’ailleurs lui qui va voler le show sur l’ensemble de l’album. Il est assis au fond à gauche de l’illusse. Quant à Stephen Duffy, au premier plan à gauche, il chante à l’empruntée de Birmingham et Kuss passe dans «Aztec Moon» l’un de ces solos aériens dont il va se faire une spécialité. Kuss est assis au premier plan, à droite. Tous les cuts sont intéressants, comme encore ce «Big Store», un up-tempo bien tempéré par le bassmatic de Simon Colley. Kuss y joue au long cours, il remplit the biggest store in town d’éclats psychédéliques, Kuss et Coll font tout le boulot. Quelle densité ! Ce démon de Coll est partout dans le son. Son bassmatic monte au devant du mix dans «What Can I Give», et Kuss reste bien sûr en embuscade. On entend encore Coll tourbillonner dans «A Sense Of Ending», il est de tous les instants, sur tous les coups, il pétarade dans son coin et Kuss fidèle à lui-même claque encore l’un de ces chorus dont il a le secret. Le coup de génie de l’album se trouve en B : «Something Soon», un clin d’œil à Dylan, comme l’indique d’ailleurs le titre de l’album. On a même les coups d’harmo. Cette équipe de surdoués embarque ce fantastique up-tempo au firmament de la pop dylanesque. C’est le batteur David Twist qui souffle dans l’harp. On a encore de la belle pop anglaise avec «Bullfighter» et en fond de toile, Coll multiplie à l’infini les triplettes de Belleville, il attise le brasier pop. On écoute cet album pour Kuss, bien sûr, mais c’est Coll la star. Il nous fait le coup du walking bass dans «Jazz Club». S’ensuit un «Serenade» plus classique, claqué au riff de Kuss, mais avec un Coll qui gronde comme le dragon de Merlin sous la surface du son. Quelle équipe ! Il faut avoir vu ça si on ne veut pas mourir idiot : Kuss gratte son funk pendant que Coll fait son Bootsy à contre-courant. Ces mecs sont beaucoup trop doués.

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             Dans Record Collector, Patrick Wray interviewe Stephen Duffy qui est une petite superstar underground, comme l’était aussi Kuss. Il raconte son enfance, le White Album qu’on écoute en famille, le père qui apprend la guitare à l’aîné Nick qui ensuite l’apprend à Stephen et puis voilà qu’arrive le punk et Stephen joue tout de suite dans des groupes - That was when I switched to bass and played in punk bands - Il arrive au Art College et rencontre John Taylor. Ils forment Duran Duran. Au bout de six mois, Stephen quitte les Duran pour aller bricoler avec les mecs de TV Eye qui comme leur nom l’indique étaient des fans des Stooges. Il emmène ses chansons («Aztec Moon» et «Big Store») et Simon Colley avec lui pour aller former les Hawks avec Kuss et David Twist - David Twist was the ambitious one - Puis il évoque Kuss et son alcoolisme qui commençait déjà à faire pas mal de ravages dans le groupe. Quand en 2019, Kuss retrouve Stephen dans un club de Birmingham, il fout la pression pour que l’album des Hawks sorte enfin : «When are you going to put the Hawks tapes out?», puisque c’est Stephen qui les possède. Il le prend au mot, mais Kuss casse sa pipe en bois en plein fucking Pandemic. Il ne pourra donc pas écouter cet album qu’il appelait de ses vœux. Stephen précise que Kuss n’est pas mort à cause de fucking Pandemic - But it was because of the isolation that he just kind of dropped off - Si le groupe a disparu c’est nous dit Stephen parce qu’ils n’avaient ni contrat ni manager. Ils en étaient exactement au même point qu’Echo & The Bunnymen et les Teardrop Explodes qui eux ont eu plus de chance. Quand il monte The Lilac Time, Stephen décroche tout de suite un contrat chez WEA. 

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             Au même moment, Mark Chadderton raconte sensiblement la même histoire dans Vive Le Rock, mais il apporte ici et là des petites précisions qui valent leur pesant d’or du Rhin. Exemple : personne ne se demande ce qu’est devenu David Twist. On le croyait à Saint-Tropez, pas du tout : il joue dans les excellents Black Bombers, nous dit Chadderton. Twist explique qu’il connaissait John Taylor depuis l’âge de 11 ans, qu’ils étaient ensemble à l’Art college, qu’ils admiraient les TV Eye guys et qu’ils montèrent ensemble un groupe nommé DADA. Twist jouait aussi de la batterie pour les Prefects. Quand le chanteur de TV Eye s’est barré, c’est Twist qui demanda à Stephen Duffy de le remplacer. Voilà pourquoi on l’accuse d’avoir brisé l’early Duran Duran.

    Signé : Cazengler, la lowk

    The Hawks. Obviously 5 Believers. Seventeen Records 2021

    Mark Chadderton : Brum’s Babylon revisited. Vive Le Rock # 86 - 2021

    Patrick Wray : Let us pray. Record Collector # 523 - October 2021

    *

    En ce mois des fièvres Cigarette Rolling Machine vient de sortir un disque. Groupe inconnu au bataillon, me suis-je dis. Une machine qui doit rockin’ and rollin’ à mort ai-je supposé. Marx a décrété que si l’on veut savoir le goût de la pomme il suffit de la goûter. J’avoue que les deux premières minutes de l’album Hysteria sont un peu déstabilisantes, ces espèces de craquements inaudibles ne m’ont guère convaincu, j’allais abandonner lorsque mon œil a été attiré par la pochette du premier opus du groupe. Une version psychédélique du célèbre tableau La mort de Marat de David. Tiens un truc marrant, avec ses cheveux violets l’a un aspect glam des mieux réussis. J’ai regardé le titre de l’opus,

    SOBRE A MUERTE

    CIGARETTE ROLLING MACHINE

    ( Juin 2020 )

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    Ces gars-là ont de la suite dans les idées, avant la folie, la mort, s’intéressent à des problématiques un peu extrêmes. Une notule de quatre lignes m’apprend que les morceaux sont à écouter comme un commentaire au livre Au sujet de la mort : Réflexions et conclusions sur les dernières choses de Schopenhauer. Donc après Platon, Schopenhauer, serions-nous en train d’entamer une série rock philosophique. Certes Schopenhauer est moins connu que son illustre devancier. A la fin du dix-neuvième siècle son aura fut immense, son pessimisme radical influença des générations entières. Aujourd’hui on ne le lit guère. Il reste tout de même le philosophe préféré de Molossito et Molossa, n’a-t-il pas écrit ‘’S’il n’y avait pas de chiens, je n’aimerais pas vivre’’. Nietzsche lui doit beaucoup. Ce second couteau de Freud aussi. Une myriade de romanciers et de poëtes se sont intéressés à lui, nous ne citerons par chez nous que Maupassant, et Jules Laforgue. Mon maître Pham Cong Thien professait une grande admiration pour Schopenhauer qui à l’âge de vingt-quatre ans possédait et maîtrisait déjà son propre système. N’a fait que le dérouler méthodiquement par la suite. 

    Le groupe n’est pas disert quant à sa composition, nous en reparlons dans notre analyse du deuxième morceau.

    Preambulo : notes de piano et clapotement régulier de moteur diesel, le piano (ou synthé), s’arrête mais le diésel continue de fonctionner tout seul encore quelques secondes, le morceau ne dépasse guère une minute. Faut-il interpréter la partie pianotée comme l’expression des émotions (enthousiasmes, passions, ennuis, souffrances, désarrois…) que l’individu ressent tout au long de son existence. Lorsque nous disparaissons le diésel qui continue à fonctionner sans nous serait alors la manifestation du vouloir-vivre qui selon Schopenhauer est le moteur imperturbable du déploiement de ce que l’on pourrait appeler la présence du monde. Lequel ne se soucie pas de nous.

    Peace karma : une ligne de texte nous apprend que pour ce morceau Cigarette Rollin Machine s’est inspiré d’Anjo Gabriel : O Culto Secreto do Anjo Gabriel, je suis dans l’expectative, je l’avoue humblement l’Ange Gabriel ne s’est jamais soucié de moi – il aurait dû – je ne possède pas son numéro de portable, une seule solution, le net, je tape l’intitulé et terrible surprise, je m’attendais à de longues heures de recherches fastidieuses sur la toile, la première indication que me fournit internet, est son lieu de résidence. En plus je connais, j’y vais souvent, sur Bandcamp, clic je tombe sur un groupe nommé Anjo Gabriel, avec photo, leurs identités, et leur logement terrestre : Recifé, au Brésil. Quant à l’inspiration elle est évidente, z’ont un morceau intitulé Peace Karma, basé sur le même riff que celui que nous nous préparons à écouter, pour la petite histoire je préfère l’interprétation de la Machine qui roule les cigarettes. Sont-ce les mêmes, certains membres participent-ils aux deux groupes, le mystère reste entier.

    Reste à voir ce que cette notion de karma vient faire chez notre philosophe allemand admirateur de Kant et qui fut en relation avec Goethe.   La liaison est plus facile à faire que l’on ne s’y attendrait, il existe des relations évidentes entre la pensée de notre philosophe et les textes sacrés et premiers de l’Inde : les Upanishdads, ainsi il n’hésite point à emprunter le terme Maya ( = illusion ) pour qualifier notre croyance en notre rationalité, nous pensons pouvoir expliquer notre propre implantation dans le monde par nos analyses rationnelles, foutaises, tout cela n’est qu’illusion, la seule vérité c’est la force incoercible du vouloir être qui nous traverse et nous force à être et dont la plupart d’entre nous n’ont aucune conscience. Platon affirmait que la seule réalité était les Idées, pour Schopenhauer s’il existe une réalité supérieure c’est le vouloir-vivre. Schopenhauer s’est toujours senti proche de Platon et d’Aristote. Pour lui le moteur immobile qui met en branle l’univers porte le nom de vouloir-vivre.

    Le karma est souvent employé par chez nous avec le sens de destin. Il est cela en le sens où l’ensemble de nos actes, passés, présents, futurs représente notre destin, mais nous pouvons dans les instants- mêmes où nous les accomplissons influer sur eux de telle manière que lorsque après notre mort nous reviendrons dans le monde des vivants, nous pourrons accéder à une conscience de notre présence au monde qui nous permettra de nous élever jusqu’à atteindre au cours de nos retour le point de détachement et d’annulation de toute illusion. Reprenez souffle, écoutez le Nevermind de Nirvana.

    Comment comprendre le titre Peace Karma, puisque le thème de Sobre a morte est la mort, la paix karmique est-il le moment (Instant Karma, disait Lennon) où l’esprit parvient au bout de la chaîne de toutes ses incorporations pour connaître l’instant nirvanique ou simplement une réflexion sur le fait de mourir au bout d’une existence humaine. Il est sûr que lorsque nous mourons nous nous détachons de nous-mêmes et sommes en quelque sorte en paix avec nous-mêmes.

    Quelques notes élastiques sur une rythmique un peu jazz, assez joyeuse, comme si la musique faisait de la gymnastique, celle des gymnosophistes, et là-dessus vient se superposer un fuzz de guitare à faire péter les fuzzibles de la joie. Pas serein, enjoué. A l’entendre l’on se dit que mourir est un truc agréable, l’on a presque envie de se passer l’arme à gauche illico presto et de se laisser emporter par cette farandole pas du tout macabre, la batterie ralentit, le synthé sautille moins légèrement, se dirige-t-on vers une désagréable agonie, pas du tout l’ensemble reste allègre.

    Joint of life : les vieux rockers, les jeunes aussi, ne pourront s’empêcher de penser à  Rock the joint de Bill Haley d’autant plus que le morceau est accompagné d’une étrange confidence : ‘’ Un jour moi et mes amis avons créé un bec géant et l’avons appelé bec de la vie. C’est tout. ’’ Genre, ne cherchez pas plus loin. Ce qui ne nous empêche pas de nous remémorer la corne d’abondance que Zeus a arrachée à la chèvre Amalthée… De cette corne suintait l’ambroisie super-confiture qui vous conférait l’immortalité. D’ailleurs ne sommes-nous pas immortels tant que nous sommes vivants. Groove tranquillou sur lequel se surajoute une guitare qui ronronne joliment, pas vraiment l’horreur de la mort, l’on se dirige sans se presser vers on ne sait où, peut-être une côte à gravir car le son monte, le mec à la guitare nous régale, prend son pied, nous aussi, sympathique et presque pépère, un petit parfum impro hippie à la Grateful Dead, nom de circonstance, pas du tout désagréable, un lézard qui se déplace lentement pour atteindre la portion du mur ensoleillé la plus chaude. Attention on ralentit, pas de panique, faut laisser un peu de place à la basse qui chantonne tout doucement, la guitare soloïse comme la cigale qui passa l’été de la vie à chanter pour enchanter notre séjour terrestre. Une vision de l’existence, osons le dire, peu schopenhauerienne. C’est parti pour douze minutes de dérive pénardeuse. L’on attend qu’il se passe quelque chose, Anne ma sœur Anne ne vois-tu pas la mort venir, que nenni sœurette juste les champs qui verdoient et le soleil qui oroie… Ecoutez sans fausse peur, vous n'en mourrez pas. Un plaisir. Farniente à volonté.

    Bagana : même racine latine que le mot bagage bien de chez nous. Le sac ou la graine qui enveloppe les ferments du vouloir-vivre. Question musique c’est un peu la suite de la précédente, mais s’y mêlent de drôle de voix, ce qui n’empêche pas la guitare de piquer un petit solo, la batterie de continuer son pas balancé de dromadaire, une note nous précise que la voix est empruntée à de vielles publicités américaines contre la marijuana. Bon Dieu ! le sac contiendrait-il de l’herbe que le peuple hippie ne broute pas mais fume allègrement. Faudrait-il interpréter le titre précédent d’une autre manière… en tout cas l’on prend plaisir à suivre les volutes de cette guitare… Le rapport avec Schopenhauer risque de paraître lointain. Il ne l’est pas. Souvenons-nous des hippies américains (et des autres pays) adonnés aux cultures orientalisantes, ils prônaient une certaine libération de l’homme grâce à l’emploi des psychotropes, mais libéré de quoi ? de la peur de la mort ou du vouloir-vivre ? Même réponse schopenhauerienne à ceux qui affirment que la drogue ouvre les portes de la perception et donne accès à une plus grande conscience. Dans les deux cas, qu’on le cache ou qu’on s’en rapproche, il s’agit du vouloir-vivre. Que les détracteurs religieux de Schopenhauer n’ont de cesse d’identifier au néant. Fuir ou se réfugier dans le néant c’est nier la divinité affirment-ils, mais Schopenhauer ne reconnaît que le vouloir-vivre. Ce vouloir-vivre que l’on peut comparer à la notion aristotélicienne d’entéléchie. Ce qui au plus profond de notre être nous pousse à être.

    Ex nihilo nihit fit : (rien ne sort de rien) : roulette de dentiste, musique grave et profonde, plainte violonneuse avachie, l’impression se doit d’être grandiose, moteur diésel, notes de pianos en cris de souffrance, des murmures de respiration affleurent la pâte sonore, le message est simple, ex nihilo fit, rien ne naît du néant, nous vivons dans l’éternel présent, nous ne faisons que passer, avant de naître nous ne sommes que néant, une fois mort nous ne sommes que néant, plus rien. Nous sommes comme les feuilles de l’arbre, quand elles tombent d’autres les remplaceront, selon le vouloir-vivre de l’arbre, tout comme la présence du vouloir-vivre nous remplacera. Ce n’est pas que notre individuation reviendra toujours, c’est que le vouloir-vivre des choses et des hommes se renouvelle générationnellement sans cesse.

    Sobre a morte : suite funèbre, chœurs masculins qui donnent une sensation d’infini glacé, notes qui tombent comme des feuilles de plomb d’un arbre d’airain, un récitant prend la parole, il dit la tristesse de la vie, évoque-t-il ce sentiment de sereine résignation que prônait Schopenhauer face à l’inéluctabilité du vouloir-vivre, veut-il la mort, l’attend-il, le texte est terriblement ambigüe, pleure-t-il la mort d’un amour qu’il espère retrouver en se précipitant dans la mort, à moins que la mort ne soit l’éternelle fiancée que l’on attend tant que nous vivons, collée à notre chair, chevillée au creux de nos reins, une partie de nous que nous perdrons, dont nous nous débarrasserons enfin lorsqu’elle surviendra et nous recouvrera, la musique décroît lentement, quelques bribes esseulées en pointillés et puis plus rien. Très beau.

    Damie Chad

    *

    Après Thumos et l’idéale République de Platon, j’avais un peu de mal à quitter la Grèce, je ne sais si ce sont les Dieux ou 666 mister doom qui régulièrement présente sur You Tube des groupes qui vous tirent les oreilles dans le bon sens, mais nous voici encore sous le soleil d’Athènes acropolique dont est originaire Blind Sun.

    Leur origine remonte à 2016, se sont successivement nommés, Once in the Wild, Supersonic Fox et enfin Blind Sun. La composition du groupe a varié, le drumer que l’on entend sur le disque – enregistré en 2020 - a cédé la place à Antonis Aspropoulos.

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    La couve est de Manster Design qui a réalisé des dizaines de pochettes d’albums. Voir site, FB et Instagram. Jolie, toutefois un peu composite à mon goût, les amateurs de Rockambolesques ne manqueront de s’interroger sur la présence de l’ibis (mauve) à côté du serpent. Remarquez aussi le S hiéroglyphique de Sun.

    UNDER THEM STONES

    BLIND SUN

    (Février 2022 / Bandcamp)

    Xanthipie Papadopoulou : vocals / Marios Kassianos : guitar / Kostas Kotsiras : rhythm guitar  / Nick Toutias : bass / Angelo Psylas : drums.

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    Freedom in hell : dès les premières notes de leur séduisant stoner mélodique  l’on comprend qu’ils n’ont pas l’intention de révolutionner le genre, l’on s’en moque, l’on se sent bien, guitare et sur-guitare en intro et double intro, la ménagerie se met en place, vitesse de croisière atteinte en trente secondes, une voix s’élève, c’est celle de Xanthippe – nom de l’épouse ronchonneuse de Socrate, on lui pardonne, elle a les cheveux clairs de Hélène qui enflamma le cœur de Pâris et par qui plus tard la cité de Troie fut la proie des flammes, une blonde incendiaire à sa manière, un timbre de tungstène, dur et mélodieux à la fois, un bijou précieux, alors les boys lui confectionnent un coffret de bois précieux, rubis de batterie, améthyste de basse et topaze de guitares, pour sa rivière de diamants qui coule sans se soucier de rien, à tel point qu’il est nécessaire de réécouter le morceau en faisant semblant de ne pas se focaliser sur elle, difficile de prêter attention à leur travail d’orfèvres. Superbe morceau, pour une fois on ne nous entraîne pas dans l’enfer souterrain, nous restons sur terre, en plein désert, n’oublions pas que le stoner a souvent été surnommé le rock du désert par les journalistes, un véritable hymne à la solitude et à la survivance, violent, cruel, sans concession, à mettre en relation au niveau symbolique avec Born to be wild, mais cinquante ans après dans un monde désillusionné. Stoned godess : parfois le deuxième morceau d’un disque c’est comme le second roman d’un romancier que l’on attend au tournant, optent pour un groove plus lent qui enfle et se fait murmure pour accueillir the voice. Peut-être en avez-vous assez de ces filles qui se vêtent du titre de sorcière, mais qui dévêtues ne se révèlent guerre ensorcelantes, Xanthippe elle se pare de la couronne de déesse, elle laisse chanter les guitares et se répand en confidences impudiques sur le plaisir féminin, avec son riff qui monte crescendo et descend lentamento, l’on est ici sur l’autre face, obscure, des orgasmes chatoyants de Robert Plant au bon vieux temps du Zeppelin, Xanthippe se dévoile et assume ses contradictions. Viande crue. Vous risquez de saigner. Continent noir illuminé. These blues : retour au blues, les guitares rampent et le shuffle vous plie à son rythme, Xanthippe déclare sa flamme au blues, le blues est plus vieux qu’elle mais elle porte la souffrance et l’éternité du blues au creux de son esprit et dans l’épine de sa chair, les boys sont aux petits oignons, les guitares s’en donnent à cœur joie, mais Xanthippe joue à larynx de colère. Pas vraiment une déclaration d’amour, mais une déclaration de sexe meurtri de bleu. Ghost of revolutions past : la batterie démarre comme un moteur qui prend de la vitesse, et c’est parti, pour la révolution, peut-être pas, mais un morceau politique assez rare dans les groupes de rock, Xanthippe plaque les mots en shoots d’encouragements, ne jamais perdre l’espoir, accomplir ce que l’on doit faire, ne jamais abandonner l’esprit de la lutte. A peine trois minutes, mais les mots claquent comme des fusils, les boys en première ligne.

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    I am : chipotages de cordes, coups de batterie, inflation de guitare, rien à voir avec une stérile affirmation du moi, le background fait table rase, enfin Xanthippe place ces mots à la manière des boxeurs qui ne pensent qu’à tuer l’adversaire, ouragan de colère et tumeurs de rage, Xanthippe règle ses comptes à tout ce qui s’est opposé à elle. N’est pas une sorcière mais une guerrière, derrière elle et puis devant les guitares taillent dans le vif et la batterie hache menu la chair du monde.  Uppercut de haine nécessaire. Tum : repli sur soi, musique comme éloignée, parvenant du dedans de soi, groove minimal Xanthippe énonce les mots de l’incertitude, de ses doutes, de ses désarrois ; elle ne pleurniche pas, elle serre les dents du vocal, y mord dedans, refuse tout secours extérieur, la solution est au fond de nous, batterie bétonnière, guitare perforateuse, coups décisifs, tranchants de guitares, les boys dessinent la porte de sortie, Xanthippe entonne le seul chant de victoire qui vaille le coup, celle que l’on remporte sur soi-même. Mariners : bruits de vagues, aubade cordiques, intro métaphore, toute douce, toute lente, la voix s’élève, pure, céleste celle de l’espoir, soudain l’aube se fait plus fraîche, la fin de l’histoire n’est pas pour aujourd’hui, la batterie ralentit, il faut continuer à lutter, la guitare a beau forer en avant, rien n’est encore gagné, les fausses promesses sont trompeuses, Xanthippe chante en sourdine, c’est les boys qui donnent l’ampleur au rêve aux ailes brisées, maintenant elle est seule dans la nuit,  lampe à huile  qui refuse de s’éteindre. Under them stones : continuité dans la ténuité mélodique, ronronnement de guitares comme le chat au coin du feu qui brûle dans l’âme de Xanthippe, chant qui n’ose s’affirmer, comme s’il avait honte de lui-même, mais les boys attisent l’incendie alors elle élève la voix pour témoigner de son échec, généralement l’on pose des pierres dessus, mais elle donne l’impression de cacher les pierres qui ont jalonné son existence. Ambiguïté des fondations. La voix susurre et prend de l’ampleur, la batterie s’affole. Fin de partie.

    Une réussite. On attend la suite.

    Damie Chad.

     

     

    *

              Le cyberpunk est un des nombreux courants de la Science-Fiction apparu dans les années 80. Le kr’tntreader à l’esprit affuté aura tout de suite relevé le hiatus : comment le punk dont un des slogans originels de base reste le fameux et fulgurant No Future peut-il se retrouver associer à l’idée de science-fiction.

             C’est qu’il existe deux sortes de futur, le premier très lointain situé à quelques siècles, voire millénaires de notre existence, les auteurs ne sont pas d’accord entre eux, certains nous décrivent des sociétés idéales dans lesquelles nos post-progénitures auront la chance d’évoluer, d’autres   parlent d’organisation tyranniques qui font frissonner. Pas de panique dans les deux cas, des plans sur la comète, l’on a le temps de voir venir…

             Le cyberpunk regarde par le petit bout de la lorgnette, ne pousse pas très loin le curseur du futur, maximum une cinquantaine d’années, vingt ans, dix ans, peut-être cinq, même deux… son futur ressemble à notre présent. Dans ces cas-là l’avenir s’annonce plutôt sombre… Soyons positifs, tant qu’on n’y est pas, jouissons sans entraves du peu de bon temps qui nous reste. A une seule condition, de ne surtout pas lire le dernier livre de Mathias Richard. Nous propose une autre lecture. Nous vivons déjà dans notre futur proche. Vous ne le croyez pas, pour vous en persuader, il nous donne la date d’ouverture de l’ère nouvelle cyberpunky. 

    2020

    L’ANNEE OU LE CYBERPUNK A PERCE

    MATHIAS RICHARD

    ( Caméras Animales / Juin 2020 )

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    Attention ce livre de soixante-dix pages n’est pas un essai. Le but de Mathias n’est pas de persuader le lecteur, il n’a pas rédigé une thèse quadrillée avec argumentation calibrée au cordeau, ne cherche pas à vous convaincre.  Se contente de montrer. Je n’ai pas dit de désigner du doigt la lune hors de notre portée. Parle de l’intérieur. L’on entre dans ce livre comme l’on ouvre une porte. L’on se retrouve non pas dans un poème mais dans un cri de poésie brute. Prend la parole et ne la lâche pas. L’est tout seul dans son livre. N’est pourtant en rien nombrilique. Ce qu’il énonce c’est la trame existentielle de sa présence au monde. Joue le rôle du filtre des cigarettes qui garde le témoignage des poisons qui le traversent.

             Laissons cela pour le moment. Quittons la poésie pour la politique. 2020, l’année pas du tout érotique mais covidique. Ce n’est pas le pire. Virons le virus, ce n’est pas lui le coupable. N’est qu’un prétexte. Le plus dangereux c’est ce que l’Etat nous a imposé. Le confinement. Qui n’est pas un début mais la condensation de tout ce qui a précédé. De ce mouvement insidieux, de cette marche sociétale qui depuis des années fragmente les rapports humains et réduit l’individu à lui-même. Pourquoi croyez-vous que du début à la fin de son ouvrage Mathias ne parle que de lui, que de sa vie, n’emploie que la première personne, je-je-je… à la différence près que ce ‘’je’’ n’est pas l’intumescence lyrique d’un moi hypertrophique, mais un ‘’je’’ qui ne s’appartient pas, qui n’est plus lui-même, pas une girouette qui tourne selon le vent mais qui est traversée du vide du monde annihilé. D’où cette écriture que l’on peut qualifier d’impersonnelle. Mathias se raconte certes, mais surtout et avant tout, ce faisant il nous raconte. Ses errements sont nos errements. Il se regarde dans le miroir de sa nullité et lorsque nous tentons de saisir son image au fond de la glace, c’est notre portrait qui nous sourit. Ironiquement. Tout cela c’est le côté punk de Mathias. L’anti-héros par excellence qui ne comprend pas plus son époque qu’elle ne se soucie de lui.

             Reste à zieuter du côté cyber. Ce mot évoque notre dépendance à l’informatique. Pas uniquement le clic-clic de la mignonne petite souris. L’autre face qui induit nos vies, qui les surveille, qui les compartimente, qui les espionne, qui les guide, qui les désinvidualise, big brother qui nous aseptise. Nous transforme en clone de l’autre qui lui-même n’est que notre clone. Avec au bout la zone noire, celle du transhumanisme qui permet tous les possibles, d’augmenter nos possibilités de faire de nous des surhommes. Ou des suresclaves. Monde binaire, l’un ne va pas sans l’autre. L’emprise technologique qui dans les deux cas, surhumanisante, soushumanisante, nous déshumanise.

             Mais il y a plus grave. Si la cybernétique nous déshumanise, que fait-elle de la poésie. Sous-poésie ou sur-poésie. Si la poésie n’est pas à hauteur ou à démesure d’homme, elle est le produit d’une technologie d’écriture produite par une machine. Dada misait sur le hasard. La rencontre inopinée de deux termes qui a priori n’avaient rien à faire l’un avec l’autre. Une machine poétique ne peut pas compter sur le hasard. Le résultat serait trop aléatoire. La machine fonctionne selon le rythme de la répétition. Elle répète les mêmes processus, les mêmes gestes. Les mêmes mots. Avec des variantes, sans quoi sa production serait trop monotone, trop illisible. Elle peut répéter les mêmes cadres. Les mêmes structures. Encore faut-il inclure de subtiles variations qui monopolisent l’attention. En d’autres termes c’est le facteur humain des textes qui impulse ses propres algorithmes. Plus question de se laisser mener par le bout du nez. Mathias est passé maître en cette prestidigitation vocablique. Il casse la coquille des expressions toutes faites, mélange le jaune nourricier du sens avec la glaire blanchâtre du non-sens. Car un mot signifie tout ce qu’il signifie et tout ce qu’il ne signifie pas.

             Mallarmé parlait de disparition élocutoire du poëte. Mathias mise plutôt sur sa disparition scripturale. C’est à la machine du langage d’écrire le texte. Il ne suffit pas de la laisser agir toute seule, le machiniste, celui qui tire les fils de la marionnette – il est bon de relire Kleist pour entendre cela – doit s’abstenir de penser. Essayer de ne plus penser, c’est déjà penser qu’il ne faut plus penser, et penser qu’il ne faut plus penser c’est penser que l’on pense qu’il ne faut plus penser et penser… étrange ce serpent qui se mord la queue tout en ne la mordant pas, à moins qu’il ne la morde pas tout en la mordant. Pire si l’on pense que l’on pense avec les mots l’on a besoin de plus en plus de mots, même si ce sont les mêmes mots qui reviennent toujours, c’est justement et injustement de leur retour que le texte prend sens. C’est-là que survient la question subsidiaire, peut-on penser sans les mots. Reconnaissez que ce genre de vertige vous pousse, vous vacillant, dans le trou du désespoir le plus noir – l’ère cyberpunk n’est pas particulièrement heureuse, vous l’avez compris puisque vous en faites partie - reste que lorsque l’on est au fond du trou le seul espoir, non pas de s’en sortir, mais de s’en extraire, c’est de faire coucou et d’en rire.

             L’humour peut causer autant de ravage que la guerre. L’on rit beaucoup en lisant cet opus et pourtant ce n’est pas drôle. Ce que raconte Mathias Richard n’est guère joyeux.  Un peu comme ces blagues qui font toujours rire, car on les connaît. Mais là on ne les connaît pas puisqu’il parle de lui de ses intimités, les intérieures et les extérieures, hélas, on s’y reconnaît. La mouche qui bourdonne contre la vitre de son vécu, c’est nous. La vitre aussi. Le vécu aussi. Jusqu’au bourdonnement si particulier. Totalement nôtre. Du coup on ne rit plus. La comédie tourne au drame. A croire qu’il a installé une caméra dans notre appartement et une autre dans notre tête. Et qu’il a tout recopié dans son bouquin. Lecture shaker et montagnes russes.

             C’est un livre-Samaritaine, dans les rayons énumératifs on y trouve de tout, je vous rassure même du rock ‘n’roll – Mathias est musicien - mais l’on n’en ressort pas avec son dû, tout est gratuit, chacun peut se servir à son gré et choisir les éléments qui lui agréeront le mieux, et réassembler sa vie à sa guise. Un gros hic. Votre nouvelle vie, votre nouvelle personnalité, n’est pas supérieure à la précédente. Elle a le même goût déplorable. C’est à ce moment que vous comprenez que vous vivez dans une époque opaque. Qui pique. Depuis quand au juste ? Depuis l’an de disgrâce 2020.

    Damie Chad.

     

     ROCKAMBOLESQUES

    LES DOSSIERS SECRETS DU SSR

    ( Services secrets du rock 'n' roll )

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     Episode 21

    LES QUATRE COINS

    Charlie a récupéré son bec meurtrier, son regard est devenu fixe, l’on sent qu’il n’est plus lui-même, qu’une force indépendante de sa volonté s’insinue en lui, qu’il se transforme en machine à tuer. Les filles poussent de petits cris, Joël saisit un de ces poufs hirsutes fort à la mode dans les années soixante-dix, pense-t-il vraiment se défendre avec cette arme dérisoire ! Charlie s’approche à petit pas saccadés du Chef, il lève son bec et s’apprête à le transpercer lorsqu’il se retrouve englué dans un brouillard aussi épais que le fog londonien – j’en déduis que le Chef a choisi un Coronado Fumato, qui surprend toujours ses interlocuteurs. Charlie n’y voit plus rien mais il entend deux voix. Celle du Chef, douce, paisible et rassurante – pourtant le Chef déteste être dérangé quand il s’offre un Fumato - :

    • Cher Charlie, vous avez donc la mémoire plus courte qu’un Courtido, ces petits Coronados pour jeunes filles prépubères, vous avez oublié que le Grand Ibis Rouge vous a ordonné de commencer par vous débarrasser des chiens !

    Le plus terrible, c’est que le GIR lui donne raison :

    • Exactement Charlie, troue-moi d’abord la peau de ces misérables sacs à puces, il est vrai que je t’avais dit lors de notre dernière entrevue que Monsieur Lechef était une commande spéciale et autoritaire, mais d’abord les dépose-crottes, ensuite les autres.

    Les chiens n’ont pas attendu Charlie, ils se sont dispersés dans le jardin, chacun s’est réfugié sur l’emplacement d’un des buissons d’hibiscus réduits en cendres. Charlie se dirige droit vers Molossito dont la queue frétille allègrement. Molossa aboie, Charlie darde son bec vers le pauvre chiot, mais à l’ultime seconde, la courageuse bête bondit en avant, se faufile entre les jambes du batteur stonien, étonné de le  voir s’échapper, Molossito traverse le jardin vers le quatrième buisson et s’assoit sur le tapis de cendres. Watts se retourne et fonce sur lui. Hélas pour lui, les cabotos sont enchantés de se livrer à une superbe partie de quatre coins. S’amusent à changer de place dès que Charlie fait mine de se diriger vers l’un d’eux.

    Charlie ne sait plus où donner du bec. Les chiens le narguent, l’appellent, ont l’air de se moquer de lui, détalent, ralentissent, accélèrent, empruntent comme des fous les deux diagonales. De grosses gouttes de sueur coulent sur son front, nous nous moquons de lui, nous l’ houspillons, ‘’ Cours plus vite Charlie’’, ‘’ Cut across shorty’’, nous rions franchement aux éclats. Qui ne partagerait pas notre joie ! Evidemment le Grand Ibis Rouge, aussi rubicond qu’un homard ébouillanté :

    • Bougre d’idiot, tu es ridicule, arrête-toi trente secondes que je t’insuffle le maximum de force que tu puisses supporter !

    Pas de paroles en l’air ! Charlie est gonflé à bloc, il a gagné en vigueur, ses foulées sont plus longues, il est beaucoup plus rapide et à diverses reprises les

    Chiens lui échappent par miracle. Comme d’habitude une idée géniale me traverse l’esprit :

    • Il faut aider les chiens, mettons-nous sur sa trajectoire pour le gêner et ralentir sa course.

    Nous apportons une aide précieuse à nos amis. Molossito adopte une nouvelle tactique, de temps en temps, par derrière il s’en vient mordiller les mollets de Charlie. Par deux fois, Watts s’écroule. Il se relève avec célérité, nous remarquons qu’il ne se fatigue plus, par contre les quatre pattes moulinent un tantinet, ils tirent une langue démesurée, si Molossa et Molossito s’en tirent encore assez bien, Rouky, plus massif, moins jeune est à la traîne. Charlie s’en est aperçu, il se concentre sur lui, ignore les deux autres, il le traque, ne lui laisse plus une seconde pour reprendre souffle. Nous avons beau essayer de le freiner, tirant même sur ses habits pour le retenir. Hélas, en pure perte.

    Charlie est parvenu à coincer Rouky, dans un coin, entre les deux murs. La pauvre bête est acculée. Le bec s’abaisse, se relève, s’apprête à frapper. Les yeux implorants de Rouky se lèvent vers lui. Je sais que les balles n’ont pas d’effet sur Charlie, je sors tout de même mon arme pour lui tirer dans le dos espérant que le choc des projectiles le déstabilisera quelque peu. Le Grand Ibis Rouge exulte :

    • Bien Charlie tue-le, sans pitié, doucement, cruellement, qu’il souffre un maximum !

    Charlie va frapper, et brusquement Rouky saute dans ses bras, il a passé ses deux pattes autour de son cou et lui lèche la partie du visage que le bec d’acier   laisse dégagé. Les mains de Charlie se referment sur son dos, et esquissent une caresse.  Charlie est tombé à genoux, Il a rejeté son masque, Molossa et Molossito s’en emparent et décampent avec.

    • Charlie : obéis – le Gir s’étrangle de rage - fais ton devoir, souviens-toi que vous avez signé, si je ne peux rien contre un mort, pense au reste du groupe, à ceux qui sont vivants, tes amis Mick, Keith, et Ron, ma vengeance sera terrible !

    Charlie a entendu. Il se retourne, lève les yeux et accorde au Grand Ibis Rouge, un pâle sourire, suivi – je ne m’attendais pas à ce geste de la part d’un gentleman comme Charlie Watts, ni d’un anglais si bien élevé, un superbe bras d’honneur !

    Qui produisit son effet. Il fut immédiatement suivi d’un intense éclair rouge. Le Gir n’était plus là. Disparu en une fraction de seconde !

    SOIREE RECREATIVE

    Il faut le dire, pour un mort Charlie était en pleine forme. Encore un soupçon d’énergie et les filles devenaient ses groupies attitrées. Nous étions rentrés dans l’abri et devisions sereinement. Les chiens se virent offert un plateau de charcuterie pantagruellique. Bien Mérité. Rouky le dévorait couché au pied de son maître. Charlie lui tapotait la tête :

    • Mon Rouky, quand j’aurai terminé mon contrat, je te jure que je t’emmènerai avec moi au pays des morts, nous ne nous quitterons plus.
    • Dites-moi, cher Charlie, de quel contrat parlez-vous, vous serait-il possible de nous en communiquer les termes exacts, ce genre d’informations ne peut que nous aider à comprendre les dessous de cette affaire. Attendez toutefois une minute que j’allume un Coronado, ce genre d’activité ne supporte pas la moindre inattention !
    • C’est très simple, nous les Rolling Stones avons signé un contrat collectif. Le Grand ibis Rouge, nous promettait fortune, réussite et célébrité toute notre vie. Il a tenu parole. Nous devons le reconnaître. En échange nous nous engagions une fois morts à tuer mille personnes. Il était en outre spécifié qu’un seul d’entre nous pourrait être chargé de cette tâche macabre. Nous avons cru à une plaisanterie, nous avons apposé nos paraphes au bas du document sans sourciller. A peine la pierre tombale s’était-elle refermée sur mon cercueil que le Grand Ibis Rouge m’est apparu et m’a déclaré qu’il m’avait choisi pour tuer les mille personnes qu’il me désignerait. Qu’après quoi le contrat rempli nous serions quitte.
    • Parfait, dit le Chef, cher Charlie nous allons vous tirer d’affaire. Quel malheur quand je pense que cette palpitante aventure tire à sa fin ! Gros dodo, ce soir, demain nous avons du travail.

    Nous nous endormîmes du sommeil du juste.

    A suivre…